Le lance-​flammes de Fiona Schmidt : « La san­té men­tale est indexée sur les dis­cri­mi­na­tions sociales et de genre »

Ce mois-​ci, Fiona Schmidt nous parle de san­té men­tale dont la Journée mon­diale se tient chaque 10 octobre depuis trente ans.

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Fiona Schmidt ©F.S.

J’avais espé­ré que cette chro­nique puisse débor­der un peu sur les 136 pages de ce numé­ro tant il y a à dire sur le sujet, mais j’ai mal négo­cié et c’est donc avec
une muse­lière à chaque doigt et un cor­set autour du cer­veau que je m’apprête
à par­ler de san­té men­tale, dont la 30e Journée mon­diale a lieu ce 10 octobre.

On le sait depuis tou­jours, seules les gon­zesses ont des pro­blèmes à ce niveau-​là, qui sont liés au grand huit hor­mo­nal, à leur esprit moins éclai­ré qu’un sous-​sol de par­king, et bien sûr, à leur défi­cit de pénis. Ce que l’on sait moins, ou plu­tôt, ce que l’on ignore sciem­ment, c’est que la san­té men­tale est indexée sur les dis­cri­mi­na­tions sociales et de genre.

Ainsi, les popu­la­tions défa­vo­ri­sées sont jusqu’à trois fois plus impac­tées que les autres1. Remboursez le mythe du pauvre bien­heu­reux qui se satis­fait de ce qu’il a, c’est-à-dire : des dettes. Les per­sonnes LGBTQIA+ sont, elles aus­si, plus expo­sées : 56 % des per­sonnes trans ont connu un épi­sode dépres­sif en 2020, contre 24 % des femmes les­biennes ou bisexuelles, 13 % des femmes hété­ros et 6 % des hommes hété­ros2. En cause, l’éducation gen­rée dopée aux valeurs du capi­ta­lisme, qui asso­cie troubles men­taux et défaillance per­son­nelle : pas-​tous-​les-​hommes-​mais- beaucoup-​quand-​même choi­sissent de refou­ler leurs émo­tions néga­tives pour pré­ser­ver leur viri­li­té, ce qui ali­mente le pré­ju­gé selon lequel la dépres­sion est une mala­die de femmes, donc pas une mala­die sérieuse mais plu­tôt un caprice d’enfant gâté (l’infantilisation est tou­jours plus effi­cace quand on l’assaisonne d’une bonne dose de culpabilisation).

Éduquées à nous méfier de nous mêmes, on refoule à notre tour, ce qui aggrave les symp­tômes dépres­sifs et/​ou anxieux, qui poussent eux-​mêmes sur un ter­rain fer­tile. Car on cumule les fac­teurs de risques : fluc­tua­tions hor­mo­nales durant le cycle mens­truel et à la méno­pause, dépres­sion post-​partum qui concerne 20 % des par­tu­rientes, charge men­tale, charge émo­tion­nelle, affres de la paren­ta­li­té solo, vio­lences sexuelles, dis­cri­mi­na­tions sexistes, notam­ment au tra­vail. Auxquels il convient d’ajouter les petits nou­veaux : l’écoanxiété – qui touche davan­tage les femmes que les hommes, sans doute parce qu’elles sont les pre­mières vic­times de la crise cli­ma­tique – et les vio­lences en ligne – dont les prin­ci­pales vic­times, selon Amnesty, sont… je vous laisse deviner.


L’ironie dans l’histoire ? La san­té men­tale est dou­ble­ment un pro­blème de femmes, parce que les per­sonnes qui s’en chargent – et sont invi­tées par le gou­ver­ne­ment à se démer­der avec un bout de ficelle éli­mé et 2 euros – sont, là encore, des femmes. Elles repré­sentent 88 % des psy­cho­logues3 qui doivent gérer les consé­quences en termes de sur­charge de tra­vail et de manque à gagner du « chèque psy », mis en place en février der­nier pour sou­la­ger le nombre expo­nen­tiel d’étudiant·es en souf­france psy­chique. Tant que la pro­blé­ma­tique de la san­té men­tale ne sera pas abor­dée sous le prisme du genre, elle per­du­re­ra. Et s’aggravera. 

  1. Magazine Science, no 6522, décembre 2020.[]
  2. Rapport de Santé publique France, mai 2021.[]
  3. Au 1er jan­vier 2022, selon une étude Adeli/​Drees.[]
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