En deux ans, les prix de nombreux produits vendus en pharmacie ont flambé, notamment dans le secteur de la petite enfance. Mais laboratoires et pharmacies peinent à expliquer ces augmentations.
L’inflation frappe jusque dans les rayons de nos pharmacies. Alors que selon l’Insee, la hausse générale des prix à la consommation a atteint 6,1% en juillet, il semble que la flambée des prix ne se limite plus aux matières premières et aux produits alimentaires. Selon Le Parisien, les pharmacies sont, en effet, particulièrement touchées par l’inflation. Le quotidien a dressé, lundi 1er août, un comparatif des tarifs de certains produits vendus sans ordonnance par rapport à la période pré-covid. Notamment des produits de première nécessité liés à la petite enfance. Le Parisien souligne ainsi les augmentations de 10,9% à 33,1% de neufs laits infantiles entre janvier 2020 et juillet 2022. Pire encore, les couches pour bébé de la marque Pampers ont subi une augmentation de 91,3% sur la même période.
D’autres produits sont impactés par cette inflation. Le Bion3, ce complément alimentaire censé renforcer les défenses immunitaires, a, selon les informations du Parisien, augmenté de 68,3%. Dans une moindre mesure, le dentifrice de la marque Fluocaril a lui aussi augmenté de 9,7% et les suppositoires pour enfants Coquelusedal de 6,8%. « De nombreuses références coûtent aujourd’hui, 6, 7 ou 8 euros de plus qu’avant la crise du Covid », assure Pierre-Olivier Jacquot, à la tête d’une pharmacie dans l’Est de la France.
« Chaque jour, des patients repartent sans acheter tel ou tel produit devenu trop cher. »
Pierre-Olivier Jacquot, pharmacien
Des augmentations qui, selon le pharmacien, impactent directement la santé des consommateur·trices. « De plus en plus de Français arrêtent de prendre leurs traitements, faute de pouvoir les financer : spray nasal, contraceptif non remboursé par la Sécu, etc. Chaque jour, des patients repartent sans acheter tel ou tel produit devenu trop cher », constate-t-il auprès du Parisien.
Justifications floues
Comment expliquer ces hausses de prix ? Les raisons invoquées par les fabricants sont brumeuses et peinent surtout à convaincre les pharmacien·nes et grossistes. « Les couches et le lait bébé augmentent, et les laboratoires ne nous expliquent pas forcément pourquoi », affirme au micro de RTL Audrey Lecoq, fondatrice de Pharmazon, un grossiste qui achète des produits de parapharmacie et des médicaments aux industriels, avant de les revendre aux pharmacien·nes. Concernant spécifiquement l’augmentation des couches Pampers, Audrey Lecoq regrette le manque de clarté du fabriquant Procter & Gamble. « Quand on l’interroge aujourd’hui, on n’a pas de réponse claire », déplore-t-elle. Selon Le Parisien, du côté du géant parapharmaceutique américain, qui produit aussi le complément alimentaire Bion3, on insiste sur la volonté de proposer « des marques de confiance qui offrent à la fois une performance supérieure et une forte valeur ajoutée ».
Le conflit ukrainien est également évoqué pour expliquer l’augmentation du prix de la poudre de lait infantile. Certaines matières premières fabriquées en Ukraine ont vu leurs cours s’envoler, comme celui de la caroube, une céréale notamment utilisée contre la constipation, ce qui en fait l’ingrédient majeur de certains laits pour bébé. « Pour les jeunes parents, dont le budget “lait” dépasse souvent cent euros par mois, la situation est parfois très tendue, surtout quand il s’agit de laits spécifiques, comme les anticoliques ou les antirégurgitation, car on ne trouve pas l’équivalent en grande surface », estime Audrey Lecoq au micro de RTL. Le lait anticolique de la marque Gallia a par exemple augmenté de 14% en deux ans.
Nouvelles hausses de prix à prévoir
Une tendance qui devrait par ailleurs se poursuivre à la rentrée. « Concrètement, un lait qui va être en moyenne à 20 euros, il va passer entre 22 euros et 24 euros », prévient Patrick Sitbon, pharmacien, auprès de France Info. Depuis plusieurs semaines, il reçoit en effet des courriers de ses fournisseurs, qui annoncent d'ores-et-déjà de nouvelles hausses de prix pour la rentrée. « Elles seront de 7% à 15% selon les laboratoires », affirme-t-il.
Si les prix augmentent de façon générale, il semble néanmoins que face à l’inflation, des disparités existent entre les grandes marques – Pampers ou Gallia – et les petites structures. Selon Le Point, ces dernières ont vu leur prix augmenter, mais dans une proportion moindre. Par exemple pour le dentifrice, le Fluocaryl a pris 9,7% quant à celui fabriqué par Gum a augmenté seulement de 3,75% sur la même période, entre janvier 2020 et juillet 2022. De quoi s’interroger, pour Audrey Lecoq : « Certains profitent-ils de la conjoncture pour augmenter leurs marges ? »