Avec Le temps des sardines, Klaire fait Grr nous offre un spectacle musical « poético-rigolo » dans lequel la comédienne interprète des chansons… sans les chanter.

Il est bientôt 20 heures et les rangs de la Comédie des 3 Bornes dans le 11ème arrondissement de Paris affichent complet. À l’affiche de ce jeudi soir ? Le temps des sardines, dernier spectacle de Klaire fait Grr. À en croire les applaudissements lorsque les lumières s’éteignent et que s’ouvre le rideau de velours rouge, l’enthousiasme est de rigueur dans la petite salle parisienne. Vêtue d’un perfecto et de bottes de cuir rose, Klaire apparaît au milieu de la scène du théâtre dans un décor graphique et coloré. Elle est accompagnée par Odile Huleux, sa compositrice et pianiste. Une rapide présentation du duo et un tacle lancé au ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin plus tard, le ton est donné. Il sera corrosif.
Insolite aussi. À mi-chemin entre un « seule en scène » humoristique et un concert de slam, Le temps des sardines est un spectacle musical « poético-rigolo » qui surprend dès la première minute pour ne plus lâcher l’auditoire jusqu'à la dernière. Pendant une heure, Klaire1, artiste touche à tout qui se définit elle-même comme « autrice, illustratrice, podcasteuse et comédienne », interprète avec un second degré décapant quatorze de ses chansons… sans pour autant les chanter. Quatorze textes et des centaines de rimes qu’elle récite comme des poèmes, avec une facilité et une énergie déconcertante.
Émotions
Dans la salle, on peut entendre fuser des éclats de rire et la minute d’après voir scintiller des perles aux coins des yeux de nos voisin·es. Rire, tendresse, tristesse, colère… à travers les rimes de Klaire et les mélodies d’Odile, on est transporté·es d’une émotion à l’autre sans jamais perdre le fil. On redécouvre les doux souvenirs de nos dix ans. On explore le deuil et la rupture amoureuse. On rit aussi à l’évocation d’une surprenante demande en mariage dans une cuisine, au cours de laquelle la promesse de s’aimer toujours se fait à l'aide d'une boîte de sardines qui ne se périme pas. À l’occasion, on s’indigne aussi. Et on s’interroge. Car Klaire a l’art de poser les bonnes questions en chansons. Sur la place, par exemple, que la société patriarcale donne aux « corps féminins qui périment » ou sur la responsabilité qui incombe aux femmes dans l’IVG avec ce refrain : « je connais un garçon qui a avorté trois fois ».
Un peu plus d’une heure plus tard, Le temps des sardines s’achève, les lumières se rallument sur les mines réjouies et émues des spectateur·rices. Et avant que l’épais velours rouge ne se referme, Klaire et Odile saluent une dernière fois l’auditoire sous une salve d’applaudissements à la hauteur du moment passé avec elles. Yves Montand chantait que Le temps des cerises était court, nul doute que le public gardera lui aussi du Temps des sardines, « des souvenirs au cœur ».
Le temps des sardines, de Klaire fait Grr accompagnée au piano par Odile Huleux. Mis en scène par Karim Tougui. Chaque jeudi jusqu'au 27 janvier 2022 à la Comédie des 3 bornes.
- Klaire qui tient dans nos pages la rubrique des « photonulles », un hommage aux photos ratées qu’on oublie dans notre pellicule.[↩]