Dimanche c'est la fête des mères. L'occasion de vous conseiller trois façons d'explorer le lien mère-fille, thème éternel et jamais épuisé. Aujourd’hui, le sujet est porté à la scène mais il fait aussi l’objet d’un touchant podcast et d’une rigolote BD.
Femmes de Boue
Plus que deux samedis pour aller voir Femmes de Boue, une pièce enlevée, profonde, mais aussi très marrante, créée collectivement par quatre comédiennes à partir d’entretiens réalisés avec leurs propres mères. « Qu’est-ce que ça a représenté pour toi de devenir mère ? » « Est-ce que ça a changé quelque chose en toi ? » « Est-ce qu’il y a quelque chose que tu es heureuse de m’avoir transmis ? » « Si tu pouvais revenir en arrière, est-ce qu’il y a quelque chose que tu ferais différemment, notamment avec moi ? » Voici certaines des questions que Juliette, Coralie, Armelle et Fanny ont posé à Mireille, Michèle, Yolande et Mado, leurs mamans.
Selon un protocole de 18 questions, défini par elles-mêmes en amont de leur travail de création, elles ont mené cette enquête en territoire intime. De cette matière-là, mêlée à un travail d’improvisation, elles ont tiré une pièce qui n’esquive pas les névroses et les tensions propres à ce lien puissant parfois noueux, mais qui célèbre malgré tout le féminin et la transmission intergénérationnelle. Avortement, rapport au corps, aux hommes, à la maternité, aux pères, à la fratrie… qu’est ce qui reste, qu’est ce qui s’en va. Qu’est ce qui marque à vie, qu’est ce qui se transcende, qu’est-ce qui saute, ou pas, les générations ? Autant de questions que le spectacle pose. Sa force est de ne pas s’en tenir là mais d’y ajouter de la comédie en invoquant, sur scène, Médée, Lady Diana et la Vierge Marie toutes trois conviées à un talk-show imaginaire littéraire et féministe : Le Cercle des influenceuses historiques, animé par Dorothée (oui oui Dorothée du Club Dorothée) qui, 25 ans après son licenciement abusif, a décidé de faire son come-back cathodique. L’ensemble s’avère aussi touchant que divertissant. Et résolument féministe.
Femmes de Boue, jusqu’au 4 juin, au théâtre La Flèche, 77 rue de Charonne, 75011 Paris. Avec Juliette Duret, Coralie Emilion-Languille, Armelle Gerbault, Fanny Pascaud.
Mère, Fille & co
Autre medium, autre style. Dans Mère, Fille & co, la scénariste et dessinatrice Clothilde Delacroix explore avec humour la relation entre une mère célib’ quadra et sa jeune ado de fille. Les petites scènes de vie s’enchainent planche après planche et en filigrane se dessine le décalage entre deux générations (car oui, chères quarantenaires qui nous lisez, ça y est, aux yeux de votre progéniture, vous êtes de vieilles daronnes à l’ouest) mais aussi les valeurs et la complicité qui les relient. Ben oui, car si, comme la mini héroïne de cette BD sympatoche, votre enfant est désormais plus féministe que vous, elle ne le tient pas de nulle part.
L’air de rien, Clothilde Delacroix dessine le portrait d’une époque et fait émerger tout un tas de questionnements sur nos injonctions contradictoires, le fossé entre nos idéaux et nos pratiques (que son ingrate mais adorable fille ne manque pas de pointer du doigt à chaque occasion), et sur la difficulté parfois de laisser sa progéniture se libérer vraiment, alors qu’on l’a soi-même éduquée comme ça. Bourrée d’auto-dérision, de tendresse et plus profonde qui n’y parait au premier abord.
Mère, Fille & co, de Clothilde Delacroix , Pataquès-Delcourt, 72 p, 13, 50 euros.
Et ta mère…
Sortez les mouchoirs pour vous atteler à ce podcast réalisé par Elodie Bastat. Monteuse de documentaires depuis 15 ans et réalisatrice de podcasts, elle a lancé sur toutes les plateformes d’écoute habituelles, une série intitulée « Et ta mère… ». L’idée, (ou plutôt la nécessité ?), a surgi à ses quarante ans, l’âge qu’avait sa mère quand elle est décédée. « Depuis sa mort, je n’avais jamais envisagé de lui survivre », explique la réalisatrice dont le sort en a finalement décidé autrement.
Les angoisses de cette mère l’ont elle marquée pour toujours ? Saura-t-elle transformer son histoire personnelle pour ne pas répéter le schéma ? Pour sécuriser sa fille, quand elle-même a grandi dans l’incertitude permanente d’être aimée ? Sommes-nous condamnées à reproduire les modèles maternels ? Pour tenter de répondre à toutes ces questions qui l’ont traversée à partir de la naissance de son enfant, Elodie Bastat a décidé de tendre le micro à de nombreuses femmes qui racontent leur histoire avec leurs mères et leurs filles. Les récits sont multiples, tantôt joyeux, tantôt apaisés, tantôt traumatiques. Toujours émouvant.
Podcast Et ta mère