Dans cet essai, la journaliste décortique la vieillesse qui révèle non seulement les inégalités de genre, mais les amplifie.
Le scandale des Ehpad, les débats sur la fin de vie et la réforme des retraites ont en commun d’avoir récemment soulevé plusieurs questions brûlantes, comme les inégalités d’espérance de vie ou le travail des « seniors ». Le nouvel essai de Fiona Schmidt (chroniqueuse chez Causette) tombe donc à pic. Comme une vanité, il a le mérite de nous confronter à notre propre mortalité et de rappeler que le vieillissement concerne – à plus ou moins long terme – tout le monde... pas uniquement les aîné·es. Vieille Peau interroge donc la construction de cette catégorie de la population dont Simone de Beauvoir – encore elle – s’est saisie la première dans La Vieillesse (1970), pointant du doigt l’infériorisation et l’altérisation des personnes âgées, vues comme des « sous-espèces d’adultes ». À mesure que le nombre de personnes âgées augmente, leur marginalisation croît et la pathologisation de la vieillesse accompagne sa relégation sociale.
La journaliste examine ici ces réjouissants constats au prisme de sa propre biographie, mêlant essai personnel et étude de données sur le genre : car, ne l’oublions pas, la majorité des personnes âgées – et de celles qui s’en occupent ! – sont des femmes. Et le « double standard du vieillissement » pointé jadis par l’essayiste américaine Susan Sontag continue d’affecter différemment femmes et hommes – qui se bonifient avec l’âge et à qui l'on ne demande pas d’« assumer » leurs tempes grisonnantes ou leurs poils aux oreilles. De plus, selon Fiona Schmidt, le vieillissement révèle non seulement les inégalités de genre, mais les amplifie. Exemple d’actualité, la conception productiviste de la retraite qui prévaut chez nous ouvre des droits sociaux et économiques, mais exclut de fait toute une partie de la population (devinez laquelle) ayant occupé son temps à des activités non ou peu rémunérées, et lui refuse une existence autonome. L’enjeu est donc de taille.
L’autrice s’étonne, enfin, que les luttes collectives contre les discriminations âgistes soient aussi peu investies, à tel point, écrit-elle que « l’âgisme n’est pas perçu comme une discrimination » : le problème, insiste-t-elle, n’est pas la décrépitude mais bien le regard social porté dessus. Il est donc urgent de politiser la vieillesse.