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Voyage de l’abbé Pierre en Terre Sainte avec Lucie Coutaz, janvier 1959. © Emmaus International / Roger Dick

Qui était Lucie Coutaz, la BFF de l’abbé Pierre ?

Zappée par l’Histoire, la cofon­da­trice d’Emmaüs a vécu qua­rante ans avec l’abbé Pierre et est mise à l’honneur dans le film L’Abbé Pierre, une vie de com­bats, sor­ti mercredi.

C’est la décou­verte du nou­veau bio­pic consa­cré à l’abbé Pierre : celui-​ci avait un binôme (trop) mécon­nu, Lucie Coutaz. Cofondatrice du mou­ve­ment Emmaüs, elle a été sa secré­taire, mais sur­tout sa meilleure amie et sa colo­ca­taire pen­dant qua­rante ans. “Son âme sœur”, selon le réa­li­sa­teur du film, Frédéric Tellier, qui résume : “Sans Lucie Coutaz, il n’y a pas d’abbé Pierre.”

Le cinéaste se sou­vient de la pré­pa­ra­tion du film et de la décou­verte de cette femme oubliée : “J’ai décou­vert avec beau­coup d’émotion l’existence de cette femme. Tous deux sont enter­rés côte à côte en Normandie [à Esteville, ndlr]. Cela m’a bou­le­ver­sé.” Il ajoute : “Je pen­sais faire un film sur l’abbé Pierre et j’ai fait un film sur un couple.” De son côté, la comé­dienne Emmanuelle Bercot, qui incarne Lucie à l’écran, dit avoir accep­té le rôle pour “remettre Lucie Coutaz dans la lumière”.

"Lulu la terreur"

Savoyarde née au tour­nant du siècle der­nier, Lucie Coutaz est long­temps han­di­ca­pée : la légende dit qu’elle gué­rit de sa para­ly­sie des ver­tèbres à Lourdes. Sténographe chez Lustucru et enga­gée dans un syn­di­cat chré­tien de la région lyon­naise, elle ren­contre l’abbé Pierre, qui s’appelle encore Henri Grouès, pen­dant la Seconde Guerre mon­diale. Ce der­nier s’est enga­gé dans la Résistance dans le Vercors, où émerge un mou­ve­ment très actif d’aide aux jeunes fuyant le STO. Débordé, il cherche de l’aide : on lui recom­mande les ser­vices de Lucie Coutaz, de treize ans son aînée. “Ils vont être d’accord sur pas mal de choses et une grande com­pli­ci­té se noue entre eux,” détaille Frédéric Tellier. Ils ne se quit­te­ront plus et lorsque l’abbé Pierre, au sor­tir de la guerre, ima­gine les pré­mices d’un mou­ve­ment de lutte contre la pau­vre­té, logi­que­ment, il demande à Lucie Coutaz d’en être. Elle devient son assis­tante par­le­men­taire lorsqu’il est élu dépu­té de Meurthe-​et-​Moselle. Puis celle-​ci cofonde avec lui Emmaüs en 1949 et devient sa secré­taire par­ti­cu­lière : elle gère les dons et les centres d’hébergement, assure des confé­rences… Un poste qui explique en par­tie l’oubli dans lequel a été relé­guée. “Lui était très média­tique et elle avait pour fonc­tion d’organiser. C’était une grande résis­tante qui avait l’art du camou­flage, de la dis­cré­tion et qui ne vou­lait pas s’exposer, avance le cinéaste. Évidemment, il y avait un condi­tion­ne­ment socio­lo­gique des femmes à l’époque, qui devaient for­cé­ment être dans l’ombre.”

Lucie Coutaz et l’abbé Pierre emmé­nagent ensemble dans un appar­te­ment à Charenton-​le-​Pont (Val-​de-​Marne) où ils vivront ensemble durant qua­rante ans et jusqu’à sa mort, en 1982. Ils forment des années durant un duo insé­pa­rable : “Ils étaient com­plé­men­taires. Lui était bor­dé­lique, elle était métho­dique. Il l’appelait “La tour de contrôle” et “Lulu la ter­reur”. Elle était d’une rigueur et d’un sérieux à toute épreuve.” Et si la ques­tion amou­reuse taraude encore aujourd’hui les expert·es, Frédéric Tellier est for­mel : leur amour était pure­ment pla­to­nique. “Elle était très pra­ti­quante, je pense qu’il n’y a pas eu d’histoire d’amour dans sa vie.” A part celui-​ci, peut-être ? 

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