Nos choix en salles : "Poppy Field" et "Le Sixième Enfant"

Macho men

Radicalité des sujets, intel­li­gence de la mise en scène : le ciné­ma rou­main est l’un des plus âpres et des plus lucides qui soient. Poppy Field s’inscrit dans cette « nou­velle vague rou­maine », l’humour grin­çant en moins. De fait, il s’est don­né pour héros Cristi, un gen­darme qui garde son homo­sexua­li­té secrète vu l’extrême machisme envi­ron­nant, jusqu’au jour où il est appe­lé en ren­fort dans une salle de ciné­ma pour dis­per­ser un groupe d’ultra-nationalistes homo­phobes venus sabo­ter une pro­jec­tion queer… Jalonné de huis clos (une voi­ture, un appar­te­ment, un ciné­ma), por­té par des plans-​séquences inouïs de ten­sion, ce récit ful­gu­rant (1 h 21) frappe d’autant plus qu’il n’est jamais mani­chéen. À la fois vic­time et com­plice, Cristi per­met à Eugen Jebeleanu, jeune auteur pro­met­teur, de son­der fine­ment les méca­nismes de la vio­lence comme d’en poin­ter les impasses. 

Poppy Field, d’Eugen Jebeleanu. Sortie le 28 septembre.

Mal de mères

Confronter le désir (pro­fond) de mater­ni­té à la morale et à la loi : tel est l’enjeu cos­taud de ce pre­mier long-​métrage fran­çais. Fort heu­reu­se­ment, il échappe aux lour­deurs habi­tuelles du film-​dossier ! Son scé­na­rio est habile et son récit ten­du, ser­ré, hale­tant. Quant aux acteurs, ils sont épa­tants de finesse. Judith Chemla est même impec­cable dans le rôle déli­cat de Meriem, une femme de fer­railleur très croyante, aux abois finan­ciè­re­ment, qui se retrouve enceinte d’un sixième enfant, tan­dis que Sara Giraudeau impres­sionne dans le rôle ambi­gu d’Anna, une avo­cate confor­ta­ble­ment ins­tal­lée qui se déses­père de ne pas avoir d’enfants, jusqu’au jour où elle croise Meriem… et lui pro­pose une tran­sac­tion impen­sable autour de ce bébé à naître. Un « arran­ge­ment » par-​delà la loi des hommes qui va, de fait, autant les rap­pro­cher que les bou­le­ver­ser. Et nous donc !

Le Sixième Enfant, de Léopold Legrand. Sortie le 28 septembre.