Féministe, fougueux et fidèle, le Festival international de films de femmes de Créteil (FIFF) déroule sa 46e édition, riche en événements et engagements, du 15 au 24 mars prochain. Décryptage en trois “F”, forcément.
F comme festival
F… comme fort bonne idée, pour commencer ! Le Festival international de films de femmes de Créteil a été créé en 1979, sous la houlette motivée de Jackie Buet et d’Élisabeth Tréhard et dans le sillon du festival Musidora, pionnier du genre, un one shot qui se tint à Paris en avril 1974 et fut marrainé par Agnès Varda, Delphine Seyrig et Jeanne Moreau (belle affiche !).
Son héritage féministe, option “deuxième vague”, est donc évident : l’interrogation sur l’image et les modes de représentations des femmes sont même au cœur de sa démarche et de sa réflexion, cela bien avant #MeToo. Et son objectif est clair : défendre le cinéma des femmes du monde entier, injustement relégué, minoré, invibilisé, sinon empêché. L’idée étant de “sonder les évolutions de la création et celles de la place des femmes dans les métiers du cinéma”, mais encore de “lutter contre les censures, autocensures et d’ouvrir une porte aux professionnelles du cinéma sur les circuits de distribution, de diffusion et de financement”, comme le précisent ses responsables dans le dossier de presse. Bref, ça fait quarante-cinq ans que ça dure, l’âge de la maturité dit-on, et ça n’est pas près de s’arrêter !
Concrètement, le festival déroule ses avant-premières, sections parallèles, rencontres professionnelles, master class, cartes blanches, ciné-concerts, ateliers d’écriture, séances jeune public et autres soirées spéciales pendant dix jours (du 15 au 24 mars), à la Maison des arts et de la culture de Créteil, dans le Val-et-Marne), mais aussi au cinéma La Lucarne et aux Cinémas du Palais (toujours à Créteil).
F comme films
Entrons dans le cœur du réacteur, précisément : après un 45e anniversaire célébré l’an dernier aux côtés de fortes personnalités comme Michelle Perrot et Annie Ernaux, et de talentueuses réalisatrices comme Agnès Jaoui, Coline Serreau ou Rebecca Zlotowski, le Festival 2024 propose, fidèle à ses engagements, une édition bouillonnante de films inédits en compétition (fictions comme documentaires) ou en sections parallèles (dont celle dénommée “Elles font genre”, qui explore la présence croissante des réalisatrices sur le terrain des films de genre), tous réalisés par des femmes bien entendu. Au programme également : du cinéma queer européen détonnant, des films dédiés aux femmes et aux sports (JO 2024 obligent et parce qu’“être une femme artiste est un sport de combat”, rappelle fort à propos Jackie Buet, la directrice du FIFF). Et, bien sûr, un panorama de films sur les luttes partout où les droits des femmes ne sont pas respectés.
F… comme fantastique, donc ! À noter sur vos tablettes, deux soirées événements. La cérémonie d’ouverture d’abord, le vendredi 15 mars à 20 h 30, avec la projection de Hard Fast And Beautiful, d’Ida Lupino, belle actrice anglo-américaine qui a traversé avec grande classe l’Âge d’or d’Hollywood ( des années 1930 à 1950), avant de s’imposer comme l’une des très rares femmes cinéastes de sa génération, cela en seulement six films remarquables de clarté, de maîtrise et d’engagement (sur des sujets aussi peu amènes que le viol, la bigamie ou une relation mère/fille toxique). Et puis, bien sûr, la cérémonie de clôture, le vendredi 22 mars à 20 heures, avec la projection en avant-première du documentaire québécois Au lendemain de l’odyssée, d’Helen Doyle (en présence de sa réalisatrice), un récit choral, poignant et très actuel qui fait entendre la voix de Nigérianes arrivant en Italie au terme d’un périple dantesque.
F comme femmes
Lieu de création, d’ouverture et d’inclusion, le festival est aussi un lieu de débats. Par-delà son foisonnement de films, le FIFF se caractérise par des rencontres en chair et os avec de nombreuses invitées… qui crèvent littéralement l’écran ! Cette année, la sémillante comédienne Léa Drucker vous donne ainsi rendez-vous le samedi 16 mars pour le traditionnel, et toujours roboratif, “Autoportrait d’une actrice” (une master class, une carte blanche, et la projection du film L’été dernier, juste avant un échange avec elle et la réalisatrice Catherine Breillat). Un moment qui promet d’être vif ! Vanessa Springora (Le Consentement) viendra également faire un tour du côté de Créteil, d’abord en tant que présidente du jury de la compétition fiction, ensuite pour une table ronde sur “l’adaptation au cinéma” calée le 19 mars. Enfin et surtout, une rencontre exceptionnelle avec la productrice Marie-Ange Luciani, le producteur David Thion et la réalisatrice Justine Triet, trio gagnant d’Anatomie d’une chute, est programmée le vendredi 22 mars, histoire d’“autopsier” leur formidable aventure, de la Palme d’or aux Oscars, mais aussi de sonder le lien si singulier qui, comme ici, unit une cinéaste à sa productrice. F… comme faut y aller sans délai !
Festival international de films de femmes de Créteil, du 15 au 24 mars. Accès, programme, tarif sur Filmsdefemmes.com