Un questionnaire interne à Polytechnique, dont les résultats ont été dévoilés cette semaine par Le Monde, révèle plusieurs faits de viols, de tentatives de viols et d'agressions sexuelles au sein de la prestigieuse école d'ingénieur·es.
Une sombre photographie de la vie étudiante dans les grandes écoles. Entre septembre 2018 et février 2022, onze viols ou tentatives de viols ont eu lieu au sein de Polytechnique, selon une enquête interne dont les résultats ont été dévoilés par Le Monde lundi et mis en ligne ici. Dix femmes et un homme victimes sont concerné·es par ces faits les plus graves, et les personnes accusées sont toutes des hommes.
Entre le 19 janvier et le 6 février, la prestigieuse école d'ingénieur·es a envoyé un questionnaire à 3424 étudiant·es, récoltant 2097 réponses, concernant les atteintes sexuelles et sexistes au sein de leur scolarité. Les résultats sont très parlants concernant l'ambiance qui règne dans ces grandes institutions, où les femmes sont peu présentes. À l'X, un peu moins de 20% de femmes font partie des promotions d'ingénieur·es, selon son site, contre 28 % dans l’ensemble des écoles d’ingénieur·es, selon Le Monde.
Ainsi, 11,3% des femmes interrogées disent avoir reçu des propositions sexuelles insistantes malgré leur refus, 23,1% affirment avoir été victimes d'une agression sexuelle (seins ou fesses touché·es, bisou forcé, frottements non consentis…), et 3% ont été forcées à faire ou à subir des attouchements des parties génitales. Trois jeunes indiquent également avoir été drogué·es à leur insu lors d'un événement organisé par une association étudiante ou lors de soirées sur le campus. Dans les conclusions du rapport, il est précisé que les victimes, tout fait confondu, sont « majoritairement des femmes » et les auteurs « majoritairement des hommes ».
L'école « choquée » par les résultats
Auprès de Franceinfo, François Bouchet, le directeur général de Polytechnique, a affirmé que les encadrant·es de l'école ne pensaient pas avoir « autant de cas » et être « très choqués par les résultats ». « Nous faisons tout pour qu'il n'y ait plus jamais ce genre d'actes dans notre école. Évidemment, nous souhaitons des suites judiciaires. Cependant, en l'état, nous ne pouvons que signaler des cas qui sont anonymes. Nous ne pouvons qu'encourager les victimes, et les témoins, à déclarer ce qu'elles ont vécu, ce qu'ils ont vu », a‑t-il ajouté, révélant qu'un signalement a été fait auprès du procureur de la République de l'Essonne.
Dans son rapport, l'X dévoile un premier plan d'action qu'elle compte mettre en place. L'école souhaite reconduire ce questionnaire de façon régulière, impliquer directement les élèves en organisant des groupes de travail obligatoire afin d'enrichir ce plan et organiser des formations de premier niveau pour que les étudiant·es soient formé·es sur ces questions. Les responsables associatifs seront concerné·es par des formations de deuxième niveau. Polytechnique annonce également qu'elle va renforcer sa cellule Harcèlement, Discrimination, Violences à caractère sexuel ou sexiste (HDVS) et le soutien psychologique apporté, afin d'encourager la libération de le parole. Enfin, elle indique vouloir formaliser sa politique « tolérance zéro », à travers des procédures de sanctions administratives ou disciplinaires possibles à l'égard des membres du personnel et des élèves. Et qu'elle transmettra les faits graves à l'autorité judiciaire et mettra en place des mesures conservatoires dès que possible.
Comme le rappelle Le Monde, ce n'est pas la première fois qu'une telle enquête ébranle le monde des grandes écoles. Les résultats d'un questionnaire similaire avaient été dévoilés à l'automne 2021 concernant l'école d'ingénieur·es CentraleSupélec : 51 femmes et 23 hommes déclaraient avoir été victimes de harcèlement sexuel, 46 femmes et 25 hommes d’une agression sexuelle et 20 femmes et 8 hommes d’un viol.