À l'issue d'un périple parlementaire de longue haleine, l'IVG a intégré la Constitution ce lundi, grâce à 780 voix favorables au Congrès réuni à Versailles. Un moment historique pour plusieurs centaines de féministes réunies au Trocadéro face à la tour Eiffel afin de vivre en direct et dans la joie le vote des parlementaires.
À 780 voix pour contre 72, le Congrès réuni à Versailles ce lundi 4 mars a adopté la révision constitutionnelle actant la “liberté garantie” des femmes à avoir recours à l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Une standing ovation a suivi le vote, qui a sanctuarisé à une écrasante majorité (la révision constitutionnelle nécessite les trois cinquièmes du Congrès, soit 512 voix) l’IVG dans la Constitution, avant que des parlementaires et des personnes dans le public entonnent l’hymne des femmes, chanson du MLF.
Le moment est historique, au Congrès comme dans la foule rassemblée au Trocadéro à Paris. “Ça fait chaud au cœur de voir la France sanctuariser ce droit” : comme Brigitte Tirot, 72 ans, militantes féministes et anonymes sont venues pour suivre sur écran géant le vote du Congrès pour inscrire l’IVG dans la Constitution.
Dès 15 h 30, des dizaines de personnes se sont regroupées face à un écran géant, installé non loin de la tour Eiffel, pour suivre en direct la réunion du Parlement au Château de Versailles pour faire de la France le premier pays au monde à inscrire explicitement dans sa Constitution l’IVG.
Parmi la foule, des personnes de tout âge, dont une majorité de femmes. Debout, sur les pavés parisiens, elles écoutent en silence les discours des représentants des différents groupes politiques, dans une ambiance solennelle, en attendant le vote. Brigitte Tirot, retraitée du secteur des transports, arrivée à Paris en 1975 à l'époque des manifestations pour soutenir la loi Veil, espère que "plus personne ne pourra remettre en question ce droit".
Après la série des discours politiques, les 925 parlementaires du pays, sénateur·rices et député·es, ont voté pour inscrire dans la Constitution “la liberté garantie” des femmes à avoir recours à l’IVG.
Une majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés était requise pour approuver cette révision constitutionnelle. Elle devait toutefois être atteinte sans difficulté : les député·es et les sénateur·rices s’étaient déjà prononcé·es massivement en faveur, chacun·e de leur côté. “Le ceintre, plus jamais”, “4 mars on écrit l’histoire” ou encore “V comme victoire” : quelques militantes brandissaient des pancartes.
Marie Manzana, 24 ans, un grand drapeau blanc de l’association Osez le féminisme sur l’épaule, tenait à être présente pour partager “ce moment d’émotion” : “C’est beaucoup de joie et de soulagement car il y a eu des phases où l’on s’est dit que ça n’allait pas passer”, confie-t-elle à l’AFP.
"Un réel espoir"
Le vote au Congrès correspond en effet au dénouement d'une longue bataille politique initiée par la gauche, portée par les associations féministes et finalement embrassée par le gouvernement après plusieurs initiatives parlementaires.
En attendant le résultat du vote, l’ambiance s’est faite plus festive, les haut-parleurs diffusant de la musique dynamique entre les prises de paroles de différentes associations. “Il fallait un dispositif à la hauteur de cette victoire historique”, déclare à l’AFP Floriane Volt, porte-parole de la Fondation des femmes, qui a organisé l’événement en partenariat avec la Mairie de Paris, dans ce lieu emblématique du 16e arrondissement, qui offre une vue plongeante sur la tour Eiffel.
Des touristes venu·es découvrir la Dame de fer s’interrogeaient elles·eux sur la nature de ce rassemblement. Martina Toniolo, 23 ans, étudiante italienne venue rendre visite à une amie, s’est enthousiasmée quand elle a appris que l’avortement allait être inscrit dans la Constitution française : “Pour nous, les Italiennes, ce genre d’événement représente un réel espoir, j’espère que ça influencera l’Italie, où ce droit ne fait que régresser.” Ola Tomczyk, Polonaise de 27 ans, s’est montrée elle plus réservée. “En Pologne, la loi est trop stricte, elle ne permet pas aux femmes d’avorter, mais je ne vois pas non plus d’un bon œil le fait qu’on banalise l’avortement au point de l’inscrire dans la Constitution.”
Dans la foule se trouvait également quelques familles. Parmi elles, Farid Azib, 53 ans, de passage à Paris, a tenu à venir avec ses trois enfants pour leur inculquer certains principes : “Ce genre d’événement, c’est l’occasion d’aborder des sujets importants avec des ados, comme la liberté et le libre arbitre des femmes quand il s’agit de leur corps.” Son aînée, âgée de 16 ans, acquiesce : “C’est important de voir ça en direct. Quand un changement positif important comme celui-là est voté, ça me rassure et me donne espoir en tant que femme.”
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