![Série « Épifounie » : Marta s'autoexplore jusqu’à l’éjaculation féminine 1 Collage 144](https://www.causette.fr/wp-content/uploads/2023/08/Collage-144-647x1024.jpg)
C’est une histoire qui commence en post-partum. L’année qui suit la naissance de sa fille, Marta est un peu perdue dans ses sensations. Entre la grossesse, l’accouchement par césarienne, l’allaitement, la pose d’un DIU (stérilet) au cuivre qui modifie ses sensations, le temps grignoté par la maternité, elle a du mal à se retrouver. « Je me sentais expropriée. La pénétration était douloureuse. Je ne sais plus comment ça m’est venu, mais j’ai voulu me réapproprier ma sexualité, ma libido, mon anatomie. J’ai commencé à beaucoup me masturber », raconte-t-elle. La jeune mère a envie de découvrir de nouvelles sensations dans son vagin pour qu’il redevienne un lieu de plaisir. À ce moment-là, elle regarde beaucoup de films pornos queer. Une scène d’éjaculation féminine dans le film Too Much Pussy !, de la réalisatrice et pornographe Émilie Jouvet, la trouble. Ce visionnage oriente ses explorations onanistes, jusqu’à devenir un objectif personnel.
Marta, documentariste bisexuelle en couple polyamoureux, a alors 33 ans et elle n’a jamais expérimenté la chose dans son corps. Par contre, elle a déjà provoqué elle-même cette réaction physiologique chez l’une de ses amantes. Cette manifestation corporelle la fascine. Elle a envie de la reproduire sur elle. Curieuse, elle se lance à la recherche de sa propre source, qui pourrait la faire fontaine. C’est une exploration solitaire, même si elle n’exclut pas de l’appliquer plus tard dans sa sexualité avec son compagnon ou avec ses autres partenaires. Tout au long de ses expérimentations, elle n’en parle à personne et préfère vivre les choses de son côté. Elle explique : « C’était une façon de reprendre possession de mon intimité. Donc c’était très important pour moi de le faire seule, et que ça ne vienne pas d’un partenaire providentiel qui tirerait une sorte de gloire de m’avoir arraché ça. Je ne voulais pas laisser ce geste de réappropriation à quelqu’un d’autre. »
« Je me suis concentrée sur cette sensation, jusqu’à sentir mon vagin se gorger d’eau et avoir cette première émission de liquide »
Comment s’y prend-elle concrètement ? « J’ai commencé à stimuler cette zone un peu rugueuse située en haut, un peu après l’entrée du vagin. C’est une sensation très subtile, que j’ai apprise à cultiver », décrit-elle. Cette fameuse zone G correspond à la jonction entre deux branches internes du clitoris au-dessus du vagin. Marta s’explore pendant plusieurs semaines avec ses doigts ou avec des sex toys pour provoquer l’inondation qu’elle recherche et qui n’arrive pas tout de suite. Elle y consacre du temps et de l’énergie, comme à une pratique artistique que l’on découvrirait pour la première fois. Elle se souvient : « C’était la première fois que j’explorais mon intimité physique aussi scrupuleusement. »
Un verrou saute…
Un jour qu’elle est seule chez elle, la trentenaire s’installe sur son canapé, qu’elle a pris soin de couvrir. « Je me suis concentrée sur cette sensation, jusqu’à sentir mon vagin se gorger d’eau et avoir cette première émission de liquide. C’est assez surprenant au début, car c’est abondant. C’était très différent de ce que je connaissais, comme l’orgasme clitoridien par stimulation externe qui est court et où on sent la montée, puis le paroxysme et la décharge d’adrénaline. Là, c’était beaucoup plus de l’ordre du lâcher-prise. Il y a eu cette espèce de sensation d’un verrou qui saute et de tous les sphincters qui se détendent en même temps. » Marta fait d’ailleurs la différence entre orgasme et éjaculation. Ce jour-là, elle a l’impression d’être arrivée au bout d’une quête passionnante. Comme si une barrière mentale en elle était tombée.
« Ça a relancé une dimension ludique dans ma sexualité. Mes partenaires étaient plutôt amusés et y ont volontiers pris part »
La suite de son aventure consiste à reproduire le phénomène tout en le contrôlant pour ne pas éjaculer à chaque fois, quand elle a la flemme de changer les draps. Car sa zone G est devenue hypersensible. « Une fois que j’ai eu maîtrisé tout ça, je savais que c’était disponible, que je pouvais retrouver cette sensation de me gorger d’eau sans pour autant laisser couler la fontaine, et m’en trouver très bien », décrit-elle.
Une expérience à transmettre
Aujourd’hui, elle a 43 ans et, avec le recul, elle analyse cet apprentissage comme une forme de réconciliation avec son corps post-partum de l’époque. « Ça a relancé une dimension ludique dans ma sexualité. Mes partenaires étaient plutôt amusés et y ont volontiers pris part », poursuit-elle. Pour boucler la boucle, Marta a même fini par animer un atelier consacré à l’éjaculation féminine dans un festival sexpositif. Elle a ainsi pu transmettre ses connaissances à d’autres personnes désireuses de faire jaillir la fontaine qui sommeille en elles…
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