![Témoignages : perdre du poids pour une PMA 1 99 couple © Ana Harff](https://www.causette.fr/wp-content/uploads/2020/06/99-couple-©-Ana-Harff-658x1024.jpg)
« Aimer, c’est regarder ensemble dans la même direction. » La maxime est charmante. Mais dans la vraie vie, les destinées amoureuses sont rarement aussi simples. Chaque mois, Causette donne la parole à un duo sentimental pour comprendre comment les visions divergentes de chacun·e n’empêchent pas (toujours) le ménage de tourner. Voici Coline et Paul, qui ont traversé ensemble le choix de Coline de faire réduire la taille de son estomac pour perdre du poids afin de pouvoir bénéficier d’une procréation médicalement assistée.
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Coline
39 ans
« C’est l’envie d’un bébé qui m’a conduite à changer totalement de silhouette, il y a deux ans et demi. J’étais mère de deux enfants quand j’ai rencontré mon deuxième mari, en 2010. Il rêvait d’être père et j’ai eu envie de lui faire ce cadeau. Après plusieurs mois d’essais infructueux, on s’est lancés dans un processus de procréation médicalement assistée (PMA). Et, même si j’avais réussi à mener à terme deux grossesses malgré mes 134 kilos pour 1,76 m, le service de PMA a exigé que je perde du poids. Les régimes, le sport, les compléments alimentaires… j’avais déjà tout essayé. Je suis grosse depuis que je suis petite. J’ai donc décidé de pratiquer une sleeve et de me faire enlever les deux tiers de l’estomac. À part mon mari, seuls ma mère et mes enfants étaient au courant. J’avais une peur bleue des opérations, je connaissais les dangers de ce type d’interventions, mais l’envie de fonder une famille avec Paul était plus forte que tout.
Le lendemain de l’opération, j’avais déjà 12 kilos de moins. Mais dans le miroir, je me voyais toujours obèse. La psychologue m’avait prévenue : vous pouvez souffrir de dysmorphophobie et avoir du mal à vous réapproprier ce nouveau corps. Trois mois après l’opération, j’avais perdu 50 kilos. Pourtant, je continuais à aller dans les rayons grandes tailles. C’est surtout dans le regard des gens que j’ai perçu le changement. Finalement, être gros, c’est un filtre à cons. Des gens qui m’ignoraient au travail se sont mis à me parler. Lors des rendez-vous médicaux, on ne s’adressait plus à moi comme à une demeurée. Aujourd’hui, je peux manger des sandwichs dans la rue sans être jugée. Même si je n’aime toujours pas mon corps nu, j’ai gagné confiance en moi. Les hommes se retournent sur moi dans la rue ! Jamais je n’aurais pensé vivre ça un jour ! Mon mari m’a aimée grosse et ne m’a jamais demandé de changer. Mais je ne me supportais plus et cela devenait compliqué : je cachais les miroirs avec un drap pour ne plus me voir. Il a été d’une grande patience, mais en a forcément souffert. Sexuellement, ça m’a libérée. Je me cache moins, j’accepte qu’il me regarde et me caresse, ce qui n’était plus possible avant la sleeve. Il adore mon ventre qu’il appelle “sa petite pâte brisée”. À ce jour, nous n’avons toujours pas eu de bébé, mais nous continuons à essayer… »
Paul
42 ans
« Je suis tombé amoureux de ma femme avec ses rondeurs. Si le milieu médical ne nous avait pas imposé cette perte de poids, elle n’aurait peut-être rien changé et cela m’allait très bien. Cette intervention était risquée : elle peut entraîner des complications sérieuses et implique un réel changement en termes d’hygiène de vie. Mais quand Coline a pris la décision de se faire opérer, je l’ai soutenue. On peut difficilement s’opposer à ma femme quand elle a une idée en tête [rires]. Une fois la date de l’intervention fixée, j’ai senti son empressement. Le dégoût qu’elle avait pour son corps s’est accentué. Il y avait une urgence à se débarrasser de ces kilos qui l’encombraient. Ils la complexaient tellement qu’elle ne voulait plus que je la regarde ni ne la touche. Je m’en accommodais. Mettre en veilleuse mes envies sexuelles, je peux le faire. La seule chose qui me fait souffrir dans la vie, c’est de voir ma femme malheureuse. Et là, elle l’était.
Elle a fait preuve d’une extrême volonté après l’intervention. Elle a radicalement changé son alimentation (le volume d’un de ses repas tient désormais dans le creux de sa main) et s’est mise à marcher 10 kilomètres par jour. Je l’ai aidée à visualiser sa nouvelle silhouette en la prenant en photo toutes les semaines et en faisant un montage. C’était une façon de l’encourager et de l’aider à gagner confiance en elle. Elle ne réalisait pas sa transformation. Son cerveau a mis du temps à l’assimiler. Ce n’est qu’au bout de trois mois qu’elle a vu que son corps était métamorphosé.
Avec ses 50 kilos en moins, ma femme est plus joyeuse. Elle aime sortir. On va au restaurant, à des concerts, elle éprouve du plaisir à faire les boutiques. Autant de choses qu’elle s’interdisait avant pour éviter le regard des autres ou les remarques assassines. Elle me disait : “Je ne veux pas te faire honte.” Je suis consterné de voir à quel point la société condamne la différence et juge les gros. Je n’ai jamais prêté attention au physique des gens. Je ne dois pas être comme tout le monde… »