La sélec­tion de février 2020

Nüdak, Tim Dup et Grise Cornac : dans nos oreilles ce mois-ci.
© V. Thomas

À cru, de Nüdak

Sur la pochette de leur disque, s’affiche une patate douce en cours de ger­mi­na­tion. Une drôle d’image qui raconte à mer­veille l’étrange éner­gie poé­tique qui émane du pre­mier album de Nüdak, un trio finis­té­rien qui mérite toute notre atten­tion. Extrêmement sur­pre­nant, tant du point de vue du son – mix de chan­son fran­çaise et d’électro-acoustique, mâti­nés de trip-​hop et de noise (quand un vio­lon tsi­gane ne vient pas empor­ter le tout !) – que du point de vue des textes qui nous emmènent loin, très loin, dans des pay­sages oni­riques hyper trip­pants. On y croise une belette insom­niaque qui sort en boîte pour noyer sa dépres­sion, un guer­rier indien du XIXe siècle, un bouton‑d’or qui s’épanouit au prin­temps. Chaque chan­son est un petit conte autant qu’un tableau men­tal. Un voyage. De folles caval­cades ultra ryth­mées à tra­vers champs. La voix un peu magique de Clémentine Page fait le reste. Une vraie décou­verte qu’il fau­dra abso­lu­ment voir sur scène. S.G.

À cru, de Nüdak. Inouïe Distribution.

Qu’en restera-​t-​il ?, de Tim Dup. 

Son flam­boyant coup d’essai en 2017, Mélancolie heu­reuse, révé­lait son goût de l’oxymore. Avec Qu’en restera-​t-​il ?, Tim Dup confirme son pen­chant pour cette figure de style. On pour­rait ain­si évo­quer ses chan­sons « douces-​amères » ou en « clair-​obscur ». Entre les contrastes, pour­tant, le chan­teur de 25 ans laisse écla­ter une jus­tesse sidé­rante. Avec sa poé­sie concrète jaillie d’un jet, jaillie d’un jeu, ses mots pré­cieux sur­fant sur un pia­no, une élec­tro mini­ma­liste qui vire à l’envi au lyrisme, il décrit son quo­ti­dien, ses virées noc­turnes, ses his­toires d’amour, l’effondrement du monde… Et ses textes, por­tés par sa voix fêlée, cri­blée de lumières, ses chan­sons mêlées de rap, prennent l’allure de pay­sages, de voyages, de contrées urbaines, de ciel et de mon­tagnes, par­cou­rus d’un souffle uni­ver­sel… Qu’en restera-​t-​il ? demande l’album. Après l’avoir écou­té sub­sistent un sou­rire, un cœur qui bat et l’émotion d’assister à l’éclosion d’un « grand » de la chan­son fran­çaise. A‑L.L.

Qu’en restera-​t-​il ?, de Tim Dup. Columbia. 

Tout baigne, de Grise Cornac. 

Grise Cornac est un duo ange­vin for­mé il y a dix ans par Aurélie Breton, autrice-​interprète, et Quentin Chevrier, com­po­si­teur arran­geur multi-​instrumentiste. Leur uni­vers sonore sin­gu­lier doit autant au rock qu’à la chan­son. Une liber­té musi­cale qui s’affranchit des codes, bous­cule les genres, et rap­pelle par ins­tant la folie douce des Rita Mitsouko. Les arran­ge­ments élec­tro­niques aériens, déli­cats et mini­ma­listes concoc­tés par Quentin laissent l’espace aux mots por­tés par le chant géné­reux d’Aurélie. La voix, tou­jours cha­leu­reuse, par­fois mutine ou éraillée, vaga­bonde sur les atmo­sphères pour nour­rir la rêve­rie et les envies buco­liques. Optimistes, les paroles sont des hymnes sen­suels à la vie, par­se­més de petits détails qui nous trans­portent dans un monde enso­leillé et oni­rique. Tout baigne se déguste comme une gour­man­dise. C.K.

Tout baigne, de Grise Cornac. Rockwithyou/​Inouïe Distribution.

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