3 trois questions à Timothée de Rauglaudre, journaliste et coauteur de l’ouvrage Le Nouveau Péril sectaire, qui analyse l’évolution des mouvements d’emprise dans la société française.
Causette : Comment les mouvements à tendance sectaire ont-ils évolué
ces dernières années ?
Timothée de Rauglaudre : On assiste à un éclatement du phénomène. Quand on parle de mouvement à tendance sectaire – le mot secte n’est plus employé –, le grand public songe aux grands groupes très structurés autour d’un leader charismatique mis en avant dans les années 1990. Certaines grosses structures, comme la scientologie, sont toujours actives, mais on dénombre aussi plus de 500 groupes de petite taille avec une communauté en ligne. Les thématiques aussi ont évolué : la religiosité est moins présente au profit des questions de santé et de bien-être.
La crise liée au Covid a‑t-elle augmenté le phénomène ?
T. R. : Oui. La Miviludes 1 le souligne dans son dernier rapport. Beaucoup de groupes se sont servis de la pandémie et ont adapté leur discours en disant, à l’instar des témoins de Jéhovah, que c’était la preuve de la fin du monde. Beaucoup de choses se sont cristallisées autour de la vaccination. Le discours en vogue dans les mouvements new age selon lequel les maladies n’existent pas et les médicaments seraient inutiles, voire dangereux a eu du succès.
La Miviludes a‑t-elle les moyens de lutter contre ces dérives ?
T. R. : Elle n’a clairement pas les armes pour faire face. Outre la baisse des effectifs et des budgets, il y a une perte d’autonomie de cette instance. Certains mouvements ont réussi un travail de lobbying exploitant l’argument de la liberté religieuse. L’idée n’est pas de faire la chasse aux modes de pensée alternatifs, mais de se rappeler que ces groupements continuent de faire des victimes.
- Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires. [↩]