À l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, le 25 novembre, Causette fait la sélection des docus les plus importants à voir à la télé ou en replay.
La Spéciale d'Envoyé – Quand les femmes sont prises pour cible
Envoyé spécial consacre une soirée aux violences faites aux femmes : parmi les documentaires diffusés, Juger les hommes violents nous embarque au tribunal de Clermont-Ferrand (Auvergne-Rhône-Alpes). Le modèle espagnol, avec ses tribunaux spécialisés, est encore loin, mais ici, les violences conjugales sont jugées lors de journées d’audience à part, trois à quatre fois par mois et plus rapidement qu’ailleurs (il faut compter environ six mois). Un bon début. Autre particularité : les audiences sont préparées par une juriste spécialisée dans les violences intrafamiliales, un poste qui n’existe pas dans les autres tribunaux. L’équipe d’Envoyé spécial pose longuement sa caméra dans ces salles d’audience un peu spéciales, où tous les prévenus assistent aux audiences précédentes et, en théorie, en retirent un enseignement. Et si la plupart des hommes concernés nient ou minimisent les faits en arrivant, à la sortie, aucun ne fait appel. Une lueur d’espoir.
À voir sur France 2, le 23 novembre à 21 h 10, puis en replay sur le site de France TV.
Complément d’enquête – Violences conjugales : quand l’agresseur porte l’uniforme
Dans le dernier numéro de Complément d’enquête, la journaliste Sophie Boutboul s’attaque à l’un des angles morts des violences conjugales : quand ces dernières sont commises par des hommes incarnant la loi et l’autorité. Depuis 2021, 437 gendarmes et 473 policiers ont été impliqués dans des violences conjugales selon le ministère de l’Intérieur. Pour obtenir ces chiffres glaçants et jamais rendus publics auparavant, les équipes de Complément d’enquête précisent avoir dû relancer pendant dix mois la place Beauvau. Un délai qui illustre bien l’omerta et l’impunité du milieu. Intimidations, menaces avec l’arme de service, surveillance quasi policière, esprit de corps, protection de la hiérarchie… Face à la caméra, les victimes racontent les mêmes rouages d’un système où tout est mis en œuvre pour les empêcher de parler.
Le documentaire se penche aussi sur les cas de gendarmes et de policiers qui recueillent les plaintes de femmes victimes de violences conjugales, alors qu’ils sont eux-mêmes auteurs de violences conjugales. Pourtant, depuis l’indignation sociétale provoquée par le féminicide de Chahinez Daoud – et la découverte que le gendarme qui avait enregistré sa plainte pour violences conjugales avait lui-même été condamné –, tout policier condamné pour ces faits ne peut plus être en contact avec le public, dans l’attente d’une décision du conseil de discipline. On découvre pourtant dans le documentaire de France 2 que, deux ans après cette annonce, des auteurs de violences conjugales – parfois condamnés – continuent à accueillir des victimes dans les brigades et commissariats français.
À voir sur France 2, le 23 novembre à 23 heures, puis en replay sur le site de France TV.
Infrarouge – Survivantes
“Il m’a éclaté la tête contre le sol de la cuisine à deux reprises.” Le témoigne d’une victime de violences conjugales, qui ouvre ce numéro d’Infrarouge, est brut, difficile à entendre, mais nécessaire pour comprendre l’engrenage dans lequel tombe certaines femmes. Pendant plusieurs mois, le réalisateur de documentaires Éric Guéret a posé sa caméra au sein du Centre Flora-Tristan, situé dans les Hauts-de-Seine, qui accueille les survivantes de relations violentes, parfois de manière urgente, parfois de manière plus pérenne pour les accompagner dans leur réinsertion. On suit les travailleuses sociales dans leur travail quotidien, de la prise de parole de ces femmes à l’accompagnement au commissariat, où des policier·ères ne sont toujours pas bien formé·es pour prendre en charge les plaintes. On découvre aussi comment ces survivantes de violences conjugales se reconstruisent à travers des cours de boxe, en rencontrant une psychologue et lors de moments de discussions collectives. Toutes, les professionnelles comme les personnes accompagnées, se heurtent au manque de places et à ce que certaines qualifient d’un manque d’action politique. En intervenant une seule fois dans ce documentaire, lors d’une courte question, Éric Guéret se met en retrait et permet vraiment d’entrer dans la vie du Centre Flora-Tristan. Un sentiment d’injustice et d’impuissance nous traverse face à ces réalités racontées sans aucun filtre, qui méritent d’être prises en considération le plus vite possible.
À voir sur France 2, le 29 novembre à 22 h 50, puis en replay sur le site de France TV.
Infrarouge – Le Prix d'une vie. Violences sexuelles dans l'Église
Dans ce documentaire Infrarouge, les victimes de pédocriminels au sein d’institutions religieuses racontent leur histoire, de la prise de conscience des abus qu’ils et elles ont subis, à la recherche de réparation pour la part d’elles et eux-mêmes perdue. En Bretagne ou dans les Pays de la Loire, tous et toutes ont été abusé·es dans leur enfance par des représentants de l'Église auxquels ils et elles avaient été confié·es.
Les témoins décrivent en détail et avec une grande pudeur les attouchements et les viols. L’un d’elles·eux regarde, attendri, une photo de lui enfant, en uniforme de petit écolier. Un autre parle de lui comme un “petit bonhomme” (en France, 80 % des victimes de membres du clergé sont des jeunes garçons). Tous et toutes font le deuil de l’enfant qu’ils et elles étaient et de l’adulte qu’ils et elles auraient pu être. “L’enfant est morte ce jour-là, à même pas 10 ans”, déclare une victime que le traumatisme des abus a menée à une tentative de suicide et à de l’anorexie sévère. “J’ai toujours aussi mal”, raconte en larmes un autre témoin, preuve que le temps ne soigne rien.
Membres de groupes de soutien et d’action, ces victimes françaises se rencontrent, se soutiennent et demandent réparation. Elles s’interrogent aussi sur la notion même de réparation (financière), maigre geste qui reconnaît leur drame mais ne l’efface en rien. Deux ans après le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase) – qui faisait état de 216 000 victimes d’abus de la part d’un membre du clergé depuis 1950 –, la parole de ces témoins apparaît encore et toujours indispensable pour comprendre l’ampleur du phénomène des violences sexuelles dans l'Église et la profondeur de la peine de ses victimes.
À voir sur France 2, le 5 décembre à 22 h 45, puis en replay sur le site de France TV.