La réalisatrice Claire Simon décortique la relation d’emprise et d’amour entre l’écrivaine Marguerite Duras et son jeune amant, Yann Andréa.
En littérature, et plus encore au cinéma, Marguerite Duras n’a cessé de chercher la mémoire du passé… tout autant que son oubli. Ce qui explique en partie la lenteur hypnotique de ses longs-métrages, leurs silences, leurs lieux fantomatiques, leurs figures somnambules et parfois statufiées.
Qu’aurait-elle pensé de Vous ne désirez que moi, nouveau film de Claire Simon ô combien loquace, incarné et délié, qui raconte sa relation passionnelle avec Yann Andréa, jeune admirateur de trente-huit ans son cadet et son dernier compagnon ? Peut-être l’aurait-elle dézingué ?
Une fois n’est pas coutume, il adopte en effet le point de vue de l’amant, puisqu’il s’agit d’une adaptation de Je voudrais parler de Duras, un livre d’entretiens que Yann Andréa (décédé en 2014, dix-huit ans après Duras) a accordés à la journaliste et grand reporter Michèle Manceaux en 1982.
Elle aurait eu tort, Marguerite, car ce film tout entier consacré à la parole installe une atmosphère à la fois artificielle et totalement vraie, crue et lucide, exhalant un sentiment d’absolu hyper « durassien » pour le coup. Si Yann Andréa veut parler, encore et encore, dans la pénombre progressive de leur maison de Neauphle-le-Château, c’est parce qu’il veut y voir plus clair. Mettre des mots, sincères, sur ce qui l’enchante et le torture dans son histoire d’amour complexe. Des mots d’autant plus puissants, vibrants et articulés qu’ils sont proférés par Swann Arlaud, captivant de bout en bout dans ce rôle pourtant difficile d’amant sous emprise.
Vous ne désirez que moi, de Claire Simon. Avec Swann Arlaud, Emmanuelle Devos et Christophe Paou (1h35).