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©Steve Hix/Getty images

Témoignages : c’est l’amour au bou­lot ah-​ouh cha cha cha

Chaque mois, Causette donne la parole à un duo sen­ti­men­tal pour com­prendre com­ment les visions diver­gentes de chacun·e n’empêchent pas (tou­jours) le ménage de tour­ner. En couple depuis sept ans, Marie et François, jour­na­listes en Suisse, tra­vaillent ensemble. Ils ont lan­cé en 2017 leur propre média, Gotham City, qui traque les crimes finan­ciers et économiques.

Marie

39 ans

« À l’époque où j’ai ren­con­tré François, on tra­vaillait tous les deux comme jour­na­listes pour L’Hebdo [maga­zine suisse, ndlr]. On a sym­pa­thi­sé et, rapi­de­ment, on a eu envie d’enquêter davan­tage sur les crimes éco­no­miques et finan­ciers. On quitte notre rédac­tion en 2013 pour se lan­cer comme pigistes. On tombe amou­reux trois ans plus tard. On se sépare de nos conjoints res­pec­tifs et l’année d’après, on lance Gotham City.

Monter une entre­prise à deux, c’est clai­re­ment se jeter dans le vide. Au début, c’était

d’ailleurs un peu le bor­del,
on fai­sait tout ensemble. Le
truc, c’est que dans le tra­vail,
on est très dif­fé­rents. C’est
évi­dem­ment une force, on est
plu­tôt com­plé­men­taires, mais
cela com­porte ses revers. François ne com­mu­nique pas tou­jours très bien alors qu’au contraire, j’en ai besoin. Il ne va pas, par exemple, me faire un point le matin pour me don­ner son pro­gramme de la jour­née. Il va d’abord faire les choses et me pré­ve­nir après.

Les pre­miers temps, j’ai sou­vent eu l’impression de tra­vailler plus que lui parce que je suis assez rapide. J’enchaîne les tâches, j’ai sans cesse de nou­veaux pro­jets en tête alors que François est davan­tage dans l’analyse et dans la réflexion. Je peux avoir fini mon pre­mier article de la semaine le lun­di midi, quand il peut pas­ser la jour­née sans écrire.

Cette charge men­tale pro­fes­sion­nelle s’est ajou­tée à celle quo­ti­dienne : comme j’étais plus effi­cace au tra- vail, j’en fai­sais plus à la mai­son. Ça a créé énor­mé­ment d’engueulades, sur­tout au début. Depuis, on a appris à mieux com­mu­ni­quer et même si on se dis­pute encore 

à ce sujet au quo­ti­dien, on a natu­rel­le­ment com­pris qu’il est néces­saire de se répar- tir les tâches. On a cha­cun nos com­pé­tences, qu’il faut mettre à pro­fit sans se mar- cher des­sus. Nous n’avons pas de bureaux, notre tra­vail se mélange à notre vie de famille recom­po­sée déjà bien rem­plie, avec quatre enfants. Mais on a beau­coup de moments à nous.

Ça fait cinq ans main­te­nant qu’on a lan­cé Gotham, six qu’on vit ensemble. Je peux dire que ça n’a pas été simple, mais sans François, je n’aurais pas pu lan­cer ce média dont je suis très fière, c’est lui qui m’a trans­mis son goût d’enquêter sur les crimes financiers. » 

François

46 ans

« Travailler en couple a été une grande sur­prise dans ma vie. Pour être hon­nête, je n’aurais jamais ima­gi­né que cela puisse m’arriver un jour. Il faut dire qu’avant Gotham City, j’avais une image assez néga­tive du tra­vail en couple. Pour moi, ça res­sem­blait à l’enfer sur terre. Finalement, l’expérience avec Marie s’est révé­lée être tout l’inverse. J’ai tou­jours eu cet inté­rêt pour les affaires finan­cières, à mes yeux, c’est une manière de dénon­cer les abus des puis­sants. Marie a per­mis de trans­for­mer cet inté­rêt en quelque chose de concret. Je n’aurais jamais créé Gotham sans elle et je pense qu’elle ne l’aurait pas fait sans moi.

Parce qu’on y traite de sujets
assez sen­sibles, on est régu­liè­re­ment pour­sui­vis en jus­tice par les per­sonnes dont on dénonce les abus. Ça pour­rait ajou­ter une pres­sion sur notre couple, mais ce n’est pas le cas. On y pense sur­tout quand le fac­teur sonne, on se dit : “Une nou­velle plainte ?”. C’était dur au début, mais nous nous y sommes habi­tués. Il faut tout de même noter que si neuf fois sur dix nous gagnons nos pro­cès, cela nous coûte tou­jours en temps et en argent, ce qui impacte l’entreprise qui nous fait vivre.

Marie et moi avons des per­son­na­li­tés dif­fé­rentes mais com­plé­men­taires. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a jamais de fric­tions ou de mal­en­ten­dus entre nous. Marie est plus rapide et a ten­dance à s’emporter faci­le­ment alors que je suis plus lent et calme. J’avais peur qu’on soit tout le temps l’un sur l’autre, or on se par­tage les tâches en fonc­tion de nos inté­rêts. Répondre aux lettres des avo­cats, ça m’amuse, alors que Marie, pas du tout. Et pour les choses qui n’amusent ni l’un ni l’autre comme l’administratif, on s’y colle à deux. Ce sont ces dif­fé­rences qui font notre force. Ça nous aide à réflé­chir sur nos manières de faire, de com­mu­ni­quer et de travailler.

Nous n’avons plus de bureaux depuis qu’on a emmé­na­gé dans un plus grand appar­te­ment. L’organisation phy­sique, c’est peut-​être le plus dur à gérer fina­le­ment. Mais je ne pense pas que cela soit très dif­fé­rent chez les per­sonnes en télé­tra­vail. Je dirais qu’on vit deux pas­sions : une amou­reuse et une pro­fes­sion­nelle. Les deux se com­plètent sans empié­ter l’une sur l’autre, même si j’adore regar­der Marie quand elle réflé­chit, ça me donne envie de l’embrasser. »

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