Cette nouvelle adaptation télé en 4 épisodes de l’Affaire Agnès Leroux, portée par une Michèle Laroque inattendue, épouse le point de vue de Renée Leroux, la mère inconsolable de cette riche héritière mystérieusement disparue en 1977. Un portrait de femme puissante et opiniâtre …
Il est des énigmes criminelles qui fascinent plus que d’autres, piquant sans relâche la curiosité des médias et du public… comme l’imaginaire des scénaristes. L’affaire Agnès Leroux est de celles-là, qui connait aujourd’hui une nouvelle adaptation télé, à découvrir à partir du 1er décembre sur la plateforme Paramount + pour les plus pressé.es ; et début janvier sur France 2 et france.tv pour les plus patient.es ou les moins fortuné.es (la série sera alors en libre accès).
Petit mémo rapide en guise de « teaser » : ladite affaire démarre en 1977, à la disparition d’Agnès Leroux, jeune héritière du Palais de la Méditerranée, un grand casino niçois, et ne cessera d’alimenter les chroniques judiciaires pendant près de 40 ans, jusqu’au dernier procès du principal suspect, Maurice Agnelet, ex-amant de la disparue, et sa condamnation pour assassinat en 2014.
Rocambolesque et tragique
La Côte d’Azur, un casino objet de toutes les convoitises, une femme seule face à la mafia (Renée Leroux, la mère d’Agnès, ancien mannequin devenue femme d’affaires), un avocat à la personnalité très trouble (Maurice Agnelet, insaisissable jusqu’au bout), une petite fille riche malmenée par un amant dominateur et véreux (ledit avocat), une lettre de « suicide » non datée, des alibis, des secrets, des psychodrames familiaux et des procès à répétition, un retournement de dernière minute et, surtout, un corps qui demeure introuvable (celui d’Agnès) : on comprend que ce « true crime », passablement rocambolesque et tragique, ait échauffé les esprits, les plumes et les caméras. Et cela de toutes les manières possibles, comme si sa richesse scénaristique et sa puissance dramatique semblaient impossibles à circonscrire en une seule fois.
De fait, après un long métrage inégal réalisé en 2014 (L’Homme qu’on aimait trop d’André Téchiné, avec Guillaume Canet, Adèle Haenel et Catherine Deneuve, mazette quel casting !), puis une série documentaire impressionnante de rigueur diffusée en 2023 (Tant qu’ils ne retrouvent pas le corps, de Rémi Lainé et Pascale Robert-Diard, toujours disponible sur arte.tv), voici donc Tout pour Agnès, une série librement adaptée du livre "Agnès Leroux : enquête sur la disparition d'une jeune femme riche", de Roger-Louis Bianchini.
Maternel et sec
Clairement destinée à un (plus) grand public, elle se propose d’épouser le point de vue de la mère d’Agnès, Renée Leroux, afin de décliner ses 4 épisodes autour de son combat au long cours. L’angle n’est pas anodin : il permet de dresser un portrait de femme puissante, opiniâtre, courageuse, un peu sèche mais inébranlable, car prête à tout sacrifier (sa fortune, son travail, sa vie) pour faire condamner celui qu’elle désigne d’emblée comme l’assassin de sa fille. Une femme impressionnante, en somme, quoique touchante (elle est dévorée par un sentiment de culpabilité, se reprochant d’avoir fait entrer Agnelet dans sa famille et de ne s’être pas assez occupée de sa fille de son vivant). Incarnée comme il se doit par une actrice populaire – Michèle Laroque – dans la grande tradition des fictions en « prime time », elle frise donc gentiment le cliché… avant de nous entrainer vers d’autres sillons plus intéressants.
A travers sa raideur, un brin sévère sinon compassée, et son autorité, l’on sent bien que les auteurs (Nicolas Jean, Isabelle Dubernet, Olivier Eloy et Vincent Garenq) visent une approche moins consensuelle de la maternité, en tout cas plus complexe. Certes, l’on n’atteint pas les hauteurs de la tragédie grecque (!), mais l’on s’élève quand même au-dessus du niveau moyen des adaptations télé de faits divers. Nombre d’éléments du récit – ses décors, qui jouent souvent avec l’idée de la transparence et du faux semblant ; ses lumières, vintage sinon déclinantes ; ses flash-backs – favorisent ainsi un climat mélancolique, ambigu, intranquille. Comme l’est le jeu tout en finesse de Yannick Choirat dans le rôle pivot d’Agnelet, véritable némésis de Renée Leroux. Une forme de tristesse, jamais tentée par le pathos, finit par s’échapper. Sobrement concoctée par Vincent Garenq (auteur et réalisateur remarqué de Présumé coupable et L’Enquête, deux films également inspirés de faits divers), elle a le mérite, en tout cas, d’offrir une autre saveur à cette célèbre affaire.
Tout pour Agnès, de Vincent Garenq. 4 épisodes de 52 mn, à découvrir à partir du 1er décembre sur Paramount +, et début janvier 2024 sur France 2 et France.tv en libre accès.
Tant qu’ils ne retrouvent pas le corps, série documentaire de Rémi Lainé et Pascale Robert-Diard. 3 épisodes de 52 mn, à retrouver sur arte.tv jusqu’au 30 mars 2024.