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Un an après la prise de pou­voir des tali­bans, le fléau des mariages d’enfants

Le 15 août prochain marquera le sinistre premier anniversaire du retour des talibans en Afghanistan. 365 jours d'un brouillard sans fin pour les petites filles du pays : sous le régime des talibans, les mariages forcés d'enfants ont explosé.

ÉDITO. Elles s’appellent Habiba, Rukia, Farishteh, Afasana, Shokriya, ou encore Sherafzada. Elles n’ont même pas dix ans et leurs dents de lait ne sont pas toutes tombées que, déjà, elles ont le regard grave de celles et ceux qui n’ont pas eu d’enfance. Leur enfance à elles s’est arrêtée tout net, il y a presque un an jour pour jour, le 15 août 2021, lorsque les talibans ont repris Kaboul après vingt ans d’absence. Deux décennies pendant lesquelles l’occupation de l’armée américaine avait pu sonner comme un maigre répit pour les droits de leurs mères et de leurs grand-mères. Un répit désormais envolé car voilà qu’aujourd’hui, à même pas dix ans, elles vont devoir se marier.

Bien sûr, les mariages forcés d’enfants existaient dans les familles les plus pauvres et traditionnelles bien avant le retour des talibans. Mais la pratique ancestrale s’est intensifiée de manière alarmante depuis un an. Si aucun chiffre n’a encore été publié sur cette augmentation, d’après un récent rapport approfondi d’Amnesty International, « selon des organisations nationales et internationales présentes sur place, des militants locaux et d’autres experts, les taux de mariages d’enfants précoces et forcés ont considérablement augmenté sous le régime des talibans ».

En cause, les crises économiques et humanitaires dont les sillons se creusent inexorablement depuis le départ des troupes américaines ainsi que l’absence d’opportunité scolaire et professionnelle pour ces jeunes filles. Beaucoup de familles appauvries par vingt années de conflit, de sécheresse et de famine se résignent donc à marier leur fille mineure parfois très jeune pour rembourser des dettes ou se nourrir. À l’image d’Habiba, Farishteh, Afasana, Shokriya, Rukia, et Sherafzada, de nombreuses jeunes afghanes sont donc promises et seront mariées de force, vendues par leur famille à des hommes bien plus âgés qu’elles pour quelques centaines d’euros. 

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Une fois la somme versée, elles devront dire au revoir à leurs proches. Des au revoir qui auront, pour beaucoup d’entre elles, le goût des adieux. Car si ces mariages précoces et forcés sont perçus comme un moyen d’assurer pour un temps la survie d’une famille, ils sont pour ces gamines le début d’un calvaire sans nom. En devenant la propriété d’hommes ayant deux ou trois fois leur âge, ces fillettes afghanes encourent viols en série, grossesses non désirées, accouchements compliqués allant jusqu'à la mort, violences conjugales, répudiation et féminicides. 

Lundi 15 août marquera le premier et sinistre anniversaire du retour au pouvoir des talibans qui a, depuis, plongé le pays sous une chape de plomb, une nuit sans fin. Une nuit encore plus sombre pour les femmes et les filles afghanes qui n’ont désormais presque plus d’existence officielle, autre que celle d’obéir aux lois répressives des talibans. Tant que ces derniers n’octroieront pas d’ailleurs des droits minimaux à toutes et tous, dont celui à l’éducation, ils ne pourront prétendre au retour de l’aide internationale, pourtant essentielle pour contrer une misère galopante. 

Alors, ici, à 7 234 km de Kaboul, notre devoir est de soutenir plus que jamais les efforts de l’ONU pour faire pression sur le régime des talibans pour qu’Habiba, Farishteh, Afasana et toutes les autres ne soient pas pour toujours une génération sacrifiée. 

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