photo florence dellerie 2021
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Portrait : Florence Dellerie, éthique ani­male et esprit critique

Cette illustratrice naturaliste, devenue végane il y a six ans, propose sur son site des fiches d’information gratuites sur l’éthique animale ou la nutrition végétale. Son credo : promouvoir la défense des « autres animaux » de manière scientifique et critique.

Une antilope aux élégantes cordes annelées, un poisson pyjama qui semble sourire ou un Velociraptor un rien flippant. Le « book » de l’illustratrice Florence Dellerie ne laisse aucune place au doute : le monde animal est l’un de ses sujets de prédilection. Un tropisme qu’elle attribue à une enfance passée à la campagne, en Ardèche, où elle réside toujours à 37 ans. « Toute petite, j’étais entourée d’animaux, de rivières et de forêts, raconte-t-elle. Et comme j’ai toujours dessiné, je me suis spécialisée dans l’illustration naturaliste, en particulier zoologique et botanique, mais également mycologique. » Car Florence Dellerie dessine aussi cèpes de Bordeaux ou trompettes des morts, pour lesquels elle confesse une passion. « Ça peut sembler curieux, admet-elle en riant. C’est lié à la diversité des espèces, qui est fascinante. Certains ressemblent à des étoiles de mer rouges, d’autres montent très haut. Et puis il y a évidemment le plaisir gustatif qu’ils procurent ».

La chasse aux champignons est la seule que l’illustratrice naturaliste affectionne. Elle est devenue végétarienne en 2014 après avoir été « une viandarde biberonnée à la charcuterie et au fromage de chèvre ». L’année suivante, elle devient végane et exclut donc tous les produits d’origine animale de sa vie quotidienne. Rapidement, elle décide de concevoir des fiches informatives pour faciliter cette évolution à ceux·celles qui le souhaiteraient. Elles sont accessibles gratuitement sur son site Questions Animalistes, où Florence Dellerie qualifie son approche de radicale, sceptique et bienveillante. « Mon idée était de diffuser des informations auxquelles on a très peu accès, explique-t-elle. J’aurais bien aimé savoir qu’on peut devenir végétarien·ne sans forcément s’exposer à des carences ou comprendre plus tôt ce qu’est l’antispécisme (ndlr : fait de considérer que le critère d’espèce n’est pas un critère pour accorder une considération morale à un individu) ». Ses fiches donnent la liste des matières animales à exclure ou expliquent pourquoi les codes sur les œufs, qui permettent de distinguer les systèmes d’exploitation des poules, donnent bonne conscience aux consommateurs. Voilà pour l’approche radicale.

L’autre credo de Florence Dellerie étant l’esprit critique, on trouve aussi sur son site des topos sur les biais cognitifs ou les niveaux de preuve façon Clément Viktorovich, de même que des textes intitulés Ce qu’est le véganisme et ce qu’il n’est pas ou Homéopathie et véganisme. « Je ne cherche pas à convaincre absolument mais à déconstruire les idées reçues sur le véganisme ou l’alimentation végétale, précise-t-elle. Certaines personnes sont par exemple encore persuadées que les poissons ne souffrent pas. En miroir, ça m’intéresse aussi que celles déjà convaincues par la nécessité de respecter davantage les intérêts des animaux sachent développer de meilleurs arguments et agissent correctement pour leur santé. » L’illustratrice fait donc régulièrement la peau à l’idée que se supplémenter en vitamine B12 (ndlr : absente des végétaux sous une forme assimilable) lorsqu’on est végétarien serait problématique parce que « non naturel ». Elle incite aussi les véganes à se faire vacciner contre la Covid-19, même si cela a impliqué des tests préalables sur des animaux. « C’est nécessaire puisqu’il n’existe actuellement aucune alternative, insiste-t-elle. Le véganisme n’est pas un concours de pureté. Le but est de continuer à vivre pour militer en faveur des animaux. »

Un dessein que Florence Dellerie poursuit de manière hyperactive en étant également éditrice à L’Armorce, une revue contre le spécisme ; confondatrice du Projet Méduses, un collectif sentientiste (qui promeut la prise en compte des intérêts de tous les êtres sentients) ; en participant à des podcasts ; en menant des conférences… Avec, toujours, la bienveillance au cœur de sa démarche. « Les employés des abattoirs, dont on parle très peu, sont parfois désignés dans les milieux animaliers comme des monstres alors qu’ils sont souvent cassés psychologiquement, soulève-t-elle. Les éleveurs vivent parfois dans des conditions difficiles. Je ne suis pas favorable à une confrontation directe avec ces personnes qui tirent leurs revenus de l’exploitation des autres animaux. Je trouve plus productif d’essayer de modifier un système qui leur est à eux aussi nuisible en les accompagnant dans des démarches de reconversion ou de transition. » Cette amoureuse du monde du vivant pense-t-elle qu’une révolution animaliste est possible ? « Cela va être difficile de sortir globalement de l’exploitation animale, admet-elle. Mais il y a eu aussi beaucoup de changements positifs ces dernières années. Il est par exemple plus facile de végétaliser son alimentation et on en sait plus sur les conditions d’abattage grâce à l’association L214. Et puis il est établi que l’on peut convaincre les gens si on réfute correctement les discours mensongers. Car personne n’aime être manipulé. »

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