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©Jean-Luc Hauser

Violences conju­gales : après le retrait d’Adrien Quatennens, malaise et dis­sen­sions chez LFI

Reconnaissant avoir giflé son épouse, qui a déposé une main courante contre lui, le député s’est mis en retrait de ses fonctions de coordinateur de La France insoumise (LFI) dimanche 18 septembre. Une décision qui a provoqué des réactions ambiguës dans les rangs de LFI, notamment chez Jean-Luc Mélenchon.

Adrien Quatennens est sorti du silence. C’est via un long communiqué que le député insoumis du Nord a pris la parole dimanche 18 septembre en fin de matinée. Une prise de parole tardive qui fait suite à la révélation, mercredi dernier par le Canard enchaîné, d'une main courante déposée par son épouse, Céline Quatennens, le 7 septembre. Dans cette main courante, révélée contre l’accord de cette dernière, l'épouse du numéro 2 de la France insoumise (LFI) accuse son mari de faits de violences commis fin août après qu’elle lui a annoncé sa volonté de divorcer.

Dans le communiqué publié sur Twitter « dans un souci de transparence et d’apaisement », Adrien Quatennens reconnaît des faits de violences conjugales envers son épouse et annonce quitter son poste de coordinateur du mouvement politique. « Je me mets en retrait de ma fonction de coordinateur de la France insoumise pour protéger le mouvement, ses militants et toutes celles et ceux qui comptent beaucoup pour moi », écrit l’homme qui conserve donc ses fonctions de député du Nord.

Lire aussi I Révélant une main courante contre Adrien Quatennens, le "Canard enchaîné" s'en prend à… Sandrine Rousseau

Celui que l’on présente comme l’héritier politique de Jean-Luc Mélenchon décrit une situation de divorce particulièrement conflictuelle depuis que son épouse - avec qui il est marié depuis 2014 - lui a exprimé cet été son intention de divorcer. « Depuis cette annonce de séparation, nous avons eu des disputes. Dans l’une d’entre elles, dans un contexte de rupture de communication entre nous, je lui ai saisi le poignet, expose Adrien Quatennens. Dans notre dernière dispute, probablement celle qui a justifié son choix de déposer une main courante, je lui ai pris son téléphone portable. Voulant le récupérer, elle m’a sauté sur le dos. Je me suis dégagé et, en me relâchant, elle s’est cognée le coude. » Adrien Quatennens a également admis avoir « envoyé de trop nombreux messages à [son épouse] pour tenter de la convaincre que [leurs] difficultés de couple pouvaient être dépassées ».

Le député LFI a aussi décrit un autre fait de violences conjugales plus ancien, daté d’un an, dans lequel « dans un contexte d’extrême tension et d’agressivité mutuelle », il a donné une gifle à son épouse. « J’ai profondément regretté ce geste et je m’en suis alors beaucoup excusé », déclare l’élu qui estime ne pas « [être] un homme violent ». En fin de communiqué, le trentenaire annonce donc se mettre en retrait de ses fonctions de coordinateur de LFI. 

Des députées LFI saluent « l'honnêteté » et « l'abnégation » 

La décision a beaucoup fait réagir. Si la députée écologiste de Paris Sandrine Rousseau et la conseillère EELV de Paris Raphaëlle Rémy-Leleu souhaitent le voir rendre aussi son écharpe d’élu de la nation – au même titre que d’autres militantes féministes – une autre musique s’est fait entendre dans les rangs de LFI. 

Notamment chez les député·es Sophia Chikirou, Antoine Léaument et Danièle Obono, qui ont apporté leur soutien personnel et politique à Adrien Quatennens. « Il y a le couple d’amis qu’on aime et qu’on déteste voir se déchirer. Il y a le dirigeant politique qu’on admire pour son honnêteté et son abnégation. Laissez-les tranquille maintenant ! », s’est ainsi exclamée la députée de Paris Sophia Chikirou sur Twitter.

 Même admiration du côté de l’élu essonnien Antoine Léaument, qui salue sur Twitter la décision d’Adrien Quatennens de se mettre en retrait du mouvement « après avoir fait la transparence ». Une décision « honnête et juste », selon le député. De son côté, l'élue de Paris Danièle Obono a rappelé notre « responsabilité collective quant aux violences conjugales » en précisant qu’ « Adrien n’est, selon [elle], ni un salaud, ni un héros »

Soutien de Jean-Luc Mélenchon 

Même son de cloche à la tête du mouvement. Dans un tweet publié dans la foulée du communiqué de Quatennens, Jean-Luc Mélenchon a ainsi « salué [la] dignité et [le] courage » du député. « Adrien décide de tout prendre sur lui », a réagi l’ex candidat à la présidentielle, fustigeant « la malveillance policière » et le « voyeurisme médiatique » dans ce « divorce conflictuel ». Jean-Luc Mélenchon a aussi adressé à Adrien Quatennens « [sa] confiance et [son] affection ».

Un tweet de quarante-trois mots et aucun pour la victime présumée, Céline Quatennens. Caroline De Haas, fondatrice du collectif Nous toutes et soutien de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle, a donc proposé une version modifiée de son message. « Les violences au sein du couple sont intolérables, quels que soient les conflits qui existent. J’exprime mon soutien à Céline. Je prends acte des excuses et du retrait d’Adrien de ses fonctions au sein du mouvement. Tout mon soutien aux femmes victimes, partout dans le monde », a-t-elle écrit sur Twitter.

« Indignation à géométrie variable »

Faisant face à de nombreux critiques pour son absence de considération envers Céline Quatennens, Jean-Luc Mélenchon a finalement publié un second message trois heures plus tard. Un tweet dans lequel il évoque cette fois nommément Céline Quatennens. « Céline et Adrien sont tous deux mes amis. Mon affection pour lui ne veut pas dire que je suis indifférent à Céline. Elle ne souhaitait pas être citée. Mais je le dis : une gifle est inacceptable dans tous les cas. Adrien l'assume. C'est bien. » 

Trop tard, le malaise est là chez LFI. « C'est une question épineuse », a commenté Mathilde Panot, cheffe du groupe LFI à l’Assemblée nationale et députée du Val-de-Marne sur LCI, pour justifier le temps entre la publication du Canard enchainé et l'annonce du retrait de Quatennens.

Les prises de positions conciliantes chez LFI ont été condamnées par d'autres forces politiques, notamment LaREM et le Modem. « Il y a la violence, inacceptable et que rien ne justifie, ni n'excuse jamais, a commenté Aurore Bergé, patronne du groupe LaREM à l'Assemblée nationale sur Twitter. Pire, il y a l'indignation à géométrie variable. On condamne sans preuve ses opposants politiques et on préfère pardonner, excuser, protéger les siens. Et à la fin, ce sont les femmes qui trinquent. » Tandis que Perrine Goulet, députée Modem de la Nièvre a rappelé que « peu importe le parti et le contexte, gifler une femme, lui confisquer son téléphone, l’empoigner… sont des actes de violences et c’est intolérable. »

« Ce n'est pas un conflit, ce sont des violences »

La présidente de la Fondation des femmes, Anne-Cécile Mailfert, appelle Jean-Luc Mélenchon à « se former » sur le sujet des violences conjugales. « Si une personne de votre entourage reconnaît : des violences physiques (pousser, gifler, frapper, tirer les cheveux), des violences psychologiques (harcèlement par texto, menaces, chantage...) et surtout dans un contexte de séparation qui n’est pas accepté, ce n'est pas un conflit, ce sont des violences », a-t-elle publié sur Twitter. 

A la suite de la main courante déposée par Céline Quatennens, le parquet s’est saisi de l’affaire pour ouvrir une enquête. Une suite judiciaire contre le gré de Cécile Quatennens, qui résulte de la consigne donnée aux juridictions en août 2021 par le ministère de l’Intérieur de faire systématiquement remonter au parquet les signalements de violences conjugales. 

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