Depuis la mort de George Floyd, le sujet anime le mouvement antiraciste et s’est carrément transformé en débat militant. Derrière ces réflexions, plusieurs visions du rôle de soutien à la cause, lorsqu’on est blancs·blanches. On a donc posé la question à quatre personnalités engagées dans la lutte, aux points de vue complémentaires.

en soutien au collectif Justice pour Adama. © AC
Depuis la mort de George Floyd, cet homme noir tué par un policier lors de son arrestation à Minneapolis (États-Unis), le mouvement antiraciste a pris un nouvel essor dans le monde. En France, outre les manifestations dénonçant le racisme, menées par Assa Traoré, se sont multipliés les signes de soutien sur les réseaux sociaux ou les conseils de lecture pour se déconstruire. Dans la foulée, Virginie Despentes a publié une lettre ouverte dans laquelle elle incitait les personnes non-racisées à réfléchir à la notion de privilège. « Je ne peux pas oublier que je suis une femme. Mais je peux oublier que je suis blanche », écrit-elle. Des réactions parfois controversées, qui posent la question du rôle dans la lutte lorsque l’on n’est pas du côté des victimes et que l’on souhaite agir. Une position souvent résumée par le terme « d’allié·e », lui-même source de débats.
Version longue, sous forme d’interview, de notre rubrique « Éclairage public » du numéro d’été.
Causette : Quelle position doit adopter quelqu’un qui veut s’impliquer dans la lutte antiraciste, mais qui ne fait pas partie du groupe des victimes ?
Jennifer Padjemi, journaliste indépendante, créatrice du podcast Miroir Miroir : La meilleure manière de s’engager, c’est de s’informer. Et il ne faut pas attendre des personnes concernées qu’elles fassent ce travail : il faut que l’impulsion vienne de soi. C’est hyper important de se poser soi-même les questions, se demander où sont nos lacunes, nos limites, est-ce qu’on a nous-mêmes nos propres biais ? Ça fait dix ans qu’on évoque le sujet dans le féminisme, la lutte antiraciste, le milieu LGBTQI+… Il y a énormément de choses à lire. On peut simplement se demander, quand on va à la librairie, si on se conforte dans nos choix habituels ou si on va s’intéresser à des autrices noires comme Maya Angelou. Regarder des films ou des séries d’auteurs ou d’autrices racisé·es, qui sont aujourd’hui plus visibilisé·es, pour les soutenir. Après, quand on a envie d’être allié·e ou de s’intéresser à la question, ça doit être quelque chose de régulier.
Eva Doumbia, metteuse en scène, autrice et militante antiraciste : Pour moi, cela implique de laisser les personnes qui vivent une situation de racisme en France s’exprimer en premier. Car il est difficile de se mettre à leur place. Je ne me vois pas, par exemple,[…]