Alix Desmoineaux brise l'omerta des vio­lences sexuelles dans le milieu de la téléréalité

Celle qui s'est faite connaître en 2017 dans des émissions de téléréalité a pris depuis 2020 un autre virage. L'ex-candidate Alix Desmoineaux brise aujourd'hui l'omerta des violences sexuelles dans le vase clos très fermé qu'est la téléréalité.

thumbnail PHOTO 2021 10 28 18 56 14
Alix Desmoineaux

C’est par visio que nous rencontrons Alix Desmoineaux, alias Alix DMX sur les réseaux sociaux. À distance, non pas à cause du Covid mais parce que la jeune femme de 28 ans, découverte en 2017 dans des programmes de téléréalité française, s’est installée il y a peu dans une villa de la luxueuse station balnéaire espagnole de Marbella. Si l’influenceuse aux deux millions d’abonné·es n’est pas allée aussi loin que nombre de ses pairs s’exportant depuis quelque temps sous le soleil de Dubai, c’est peut-être parce qu’Alix ne fait pas comme tout le monde. Après avoir participé à La Villa des cœurs brisés, aux Marseillais ou encore aux Princes et Princesses de l’amour, la flamboyante brune a définitivement raccroché les caméras en 2020, alors même qu’elle était au zénith de sa popularité. Sa dernière participation aux Marseillais avait d’ailleurs pulvérisé les records d’audience toutes saisons confondues.

« C’est une vidéo d’agression sexuelle »

Mais si Alix s’est mise à l’heure espagnole pour « se protéger d’une surmédiatisation en France », elle ne s’est pas pour autant fait oublier. Mieux, elle est devenue il y a quelques semaines l’une des fers de lance du #metoo de la téléréalité qui agite le microcosme depuis quelques mois. Il faut se rendre à l'évidence : que ce soit sur petit écran, sur Instagram ou en visio, une chose reste immuable chez la jeune femme aux longs cheveux lisses : son franc-parler. Verbe haut, débit rapide, l'aisance orale d'Alix est aussi spontanée que ses convictions sont fortes. « Les gens qui me connaissent savent bien que je ne parle jamais pour rien dire », lance sans sourciller la jeune femme à Causette assise en tailleur sur son canapé crème. Alix Desmoineaux fait référence à la diffusion, début novembre, par Melty d’une interview dans laquelle elle dénonce une vidéo qu’elle a vu sur le téléphone d’un autre candidat en août 2019 lors de la conférence de presse de la saison 4 des Marseillais vs Le reste du Monde à laquelle elle venait de participer. Et les faits qu’elle révèle sont graves : « c’est une vidéo d’agression sexuelle, témoigne Alix. On voit une jeune fille de 16 ans et le candidat en question essayait de lui mettre son truc dans la bouche et elle pleure, il la tient par les cheveux, elle se débat, elle pleure. Puis, il la jette sur le lit et lui dit “vas-y t'es pas marrante je vais voir ta copine”. »

Déflagration

Ni dans l’interview de Melty ni sur le plateau de TPMP où elle se rendra quelques jours plus tard, ni même par visio avec Causette, Alix ne donnera le nom et le prénom du candidat. Si Alix ne cite pas de nom, tous les regards convergent aussitôt vers une seule et même personne, Illan Castronovo. Une star de la téléréalité de 28 ans qui a déjà été citée dans de nombreux témoignages comme ayant eu des comportements très problématiques vis-à-vis d’autres candidates.

La révélation d’Alix Desmoineaux met les réseaux sociaux en ébullition et secoue le milieu très fermé de la téléréalité. Elle refuse, pour autant, qu’on lui prête le titre de « lanceuse d’alerte ». « Je ne suis ni une victime ni un témoin direct, je n’ai aucune preuve matérielle. J’ai seulement dit ce que j'avais vu et que je trouvais extrêmement grave, afin de donner confiance aux victimes, les pousser à parler et d’arrêter de se dire “c’est normal, c’est la télé”, raconte l’ex-candidate. Moi, je suis seulement une porte-parole. » Une prise de parole difficile dans un milieu où règne un climat profondément patriarcal. « Il était temps de balancer ce qu’il se passe dans ce vase clos. C’est extrêmement difficile de dénoncer des violences car, pour beaucoup, ce n’est pas envisageable de critiquer notre gagne-pain, poursuit Alix Desmoineaux. Pourtant, plein d’autres candidats sont mouillés dans des affaires de violences sexuelles, chaque candidate est une proie potentielle. » Là-dessus, elle n’en dira pas davantage. 

 « Les productions savaient mais n'ont pris aucune position. C’est toujours comme ça, elles rassurent seulement les personnes qui dénoncent des faits de violences sexistes et sexuelles dans le milieu en leur promettant de faire quelque chose, mais seulement plus tard. » 

Alix Desmoineaux

Si elle ne se voit pas aujourd’hui comme une lanceuse d’alerte, Alix avait pourtant tiré la sonnette d’alarme à plusieurs reprises dans cette affaire. La candidate a ainsi alerté par deux fois, depuis 2019, les deux productions mères dans le milieu sur l’existence de cette vidéo. Sans succès. « Les productions savaient pour la vidéo et savent ce qu’il se passe sur les tournages et en dehors mais ne prennent aucune position, déplore Alix. C’est toujours comme ça. Elles rassurent les personnes qui dénoncent des faits de violences sexuelles en leur promettant de faire quelque chose, mais seulement plus tard. »

L'influenceuse dénonce un système dans lequel des productions savent mais ne font rien mais aussi où des agences d'influence préfèrent étouffer les affaires de violences sexuelles plutôt que de devoir renoncer à un candidat qui leur rapporte beaucoup d’argent en placement de produits. Celle qui vit d’ailleurs aujourd’hui principalement de ses placements n’est pas – à la différence de ses anciens collègues – représentée par une agence de communication et de marketing d’influence. « C’est un véritable électron libre dans le milieu, témoigne Paola Gougne, son attachée de presse. Elle est indépendante et en cela, elle dérange forcément certaines personnes de ce milieu. »

Lire aussi l Féminisme et téléréalité : la synergie est-elle possible ?

Un électron libre qui s’est également engagé contre les violences policières et les contrôles au faciès. Lors des débats sur la loi « sécurité globale » à l’Assemblée en 2020, elle organise ainsi un live Instagram avec Arié Alimi, l’avocat parisien spécialiste des affaires de violences policières pour expliquer la proposition de loi. Un live qui génèrera plus de trois millions de vues dont une majorité de jeunes. « L’engagement, que ce soit contre les violences sexistes et sexuelles, contre les violences policières ou pour rendre accessible la politique aux nouvelles générations est quelque chose qui l’anime profondément, souligne Paola Gougne. Alix est une jeune femme droite dans ses bottes qui est extrêmement sensible aux injustices et qui refuse de se taire. »  

Engagement

Quand on remonte l’histoire d’Alix Desmoineaux, on mesure combien son attachement à la liberté a dicté sa vie jusqu’à, finalement, la pousser à quitter définitivement le milieu de la téléréalité. Son enfance parisienne est faite « de déchirures et de conflits familiaux entre ses deux parents », résume-t-elle. Alors que son grand-père, ancien militaire, rêve de la voir entrer à la maison d’éducation de la Légion d’honneur1, Alix rêve, elle, d’indépendance. « J’ai pris un appartement éducatif à 15 ans, j’ai arrêté l’école juste avant le bac, raconte en souriant la jeune femme. J’ai enchaîné les petits boulots alimentaires et aussi les petites conneries d’ado. » 

Machine médiatique

C’est en 2017 qu’Alix Desmoineaux, alors âgée de 24 ans, plonge dans le grand bain de la téléréalité. « C’est une opportunité qui m’a ouvert les portes », affirme-t-elle. L’opportunité s’appelle Zéro Complexe. Un programme éphémère de la chaîne Star 24 TV dont le principe est de regarder une brochette de candidat·es complexé·es par leur physique passer sur le billard d’une clinique tunisienne. « Ça faisait déjà quelque temps que je réfléchissais à faire refaire ma poitrine donc j’ai accepté », explique simplement Alix. La machine médiatique s’emballe. En quatre ans, elle participera à sept programmes en tout genre. À la télé, son physique de mannequin et son côté « grande gueule » crèvent l’écran. Derrière, les choses se révèlent rapidement plus compliquées. « Je n’ai pas toujours rencontré les bonnes personnes et je me suis parfois sentie très seule, confie Alix. Je ne regrette absolument pas d’avoir participé à ses programmes qui m’ont beaucoup apporté et particulièrement la situation financière que j’ai aujourd’hui, mais ce milieu m’a rendue aigrie et malheureuse. » 

« C’est terminé pour elle la téléréalité, c’est ce qui a fait qu’elle gagne bien sa vie aujourd’hui mais elle ne veut plus faire partie de ce système »

Paola Gougne

Sur les tournages, l’accompagnement psychologique est quasiment inexistant alors même que les productions poussent toujours plus les candidat·es. « Ils font tout pour qu’il y ait des scandales, indique Alix Desmoineaux. Par exemple, ils envoient d’abord les hommes en couple seuls dans les émissions pour créer des infidélités. » Après la neuvième saison des Marseillais, Alix intégrera une dernière émission avant de tourner définitivement les talons en 2020. « C’est terminé pour elle, la téléréalité, affirme Paola Gougne. Elle ne regrette rien mais elle ne veut plus faire partie de ce système. »

Raccrocher les caméras

En finir avec la téléréalité, c’est aussi pour la jeune femme un moyen de reprendre entièrement le contrôle de son image. « Dans ce milieu, tu tombes sur des gens qui te stigmatisent uniquement sur ce qu’ils voient à la télé, confie Alix. La majorité des gens pensent que toutes les candidates ont le même profil : une bimbo écervelée, ancienne escort-girl au passé familial compliqué. »

Si Alix Desmoineaux a raccroché les caméras de la téléréalité, elle a toujours mille et un projets dans la tête. Au-delà de l’influence et des placements de produits, la jeune femme qui vient d’ailleurs de sortir un livre de développement personnel, Glow Up, aux éditions Hugo Image a des envies de cinéma et l’ambition de continuer ses prises de parole politiques avec toujours le même mot d’ordre : rester droite dans ses bottes.


L'affaire Illan Castronovo

À l'instar d'Alix Desmoineaux, Illan Castronovo a été convié, début novembre, sur le plateau d’Hanouna. Le candidat actuellement tête d’affiche de la nouvelle saison des Princes et Princesses de l’amour y a formellement démenti l’existence de cette vidéo avant d’affirmer quelques semaines plus tard, à Checknews, qu’il en existe bien une mais que la jeune femme filmée était majeure et consentante. Une enquête a récemment été ouverte à Nice auprès du procureur de la République à la suite de la dénonciation de la vidéo vue par Alix par un autre candidat, Jonathan Matijas. Ce dernier aurait en effet enregistré une conversation téléphonique avec le candidat censé être le détenteur de la vidéo, Sébastien Dubois.

En outre, d’après CheckNews, une plainte vise actuellement Illan Castronovo pour des faits de harcèlements et d’agressions sexuelles, déposée par une ancienne candidate de téléréalité, Nathanya Sion. Illan Castronovo affirme de son côté sur ses réseaux sociaux avoir déposé plainte à Paris mi-décembre pour diffamation, dénonciation calomnieuse, harcèlement et cyber harcèlement à l’encontre des candidat·es, dont Alix. La jeune femme nous précise n’avoir reçu, à ce jour, aucune citation à comparaitre.

  1. Un établissement scolaire réservé aux filles, petites-filles et arrières petites-filles des décoré·es français·es.[]
Partager
Articles liés

Inverted wid­get

Turn on the "Inverted back­ground" option for any wid­get, to get an alter­na­tive sty­ling like this.

Accent wid­get

Turn on the "Accent back­ground" option for any wid­get, to get an alter­na­tive sty­ling like this.