Chloé Charles (Top Chef) : « On peut cui­si­ner éco-​responsable sans faire culpabiliser »

La candidate de la saison 12 de Top Chef Chloé Charles est une cheffe indépendante de 34 ans, aussi gourmande qu’engagée. Véritable nomade multi-casquettes, elle peut aussi bien préparer des repas pour des soirées privées que conseiller les collectivités pour réduire leurs pertes alimentaires. Rencontre avec une cuisinière militante, à l’aise avec son époque et son métier.

Chloé Charles crédit Louise Primel
Chloé Charles © Louise Primel

Causette : Qu’est-ce qui vous a décidée à devenir cheffe ?
Chloé Charles :
C’est quelque chose qui est venu assez tardivement car je n’avais même pas idée que c’était un métier. J’ai toujours été gourmande, j’aimais passer de bons moments à table et cuisiner en famille mais pour moi, c’était plus un plaisir de vacances. En classe de 3ème, une de mes camarades est partie en CAP charcutier-traiteur et là j’ai compris qu’on pouvait vivre de la cuisine. J’ai décidé que c’était ce que je voulais faire et ai tout mis en œuvre pour intégrer l’école Ferrandi, à Paris.

Causette : Après des expériences dans différents établissements, vous proposez désormais vos services en tant que cheffe privée et décuplez vos activités. Pourquoi ce choix, plutôt atypique, de l’indépendance ?
Chloé Charles :
Comme beaucoup, je comptais ouvrir mon propre restaurant pour mes trente ans. Finalement, j’ai préféré créer mon entreprise et suivre une voie moins classique, où je me sentais plus à l’aise. J’aime la liberté de ne pas être rattachée à un seul établissement, d’avoir des journées qui ne se ressemblent pas, d’avoir du temps pour être bénévole et avec ma famille. Un jour, je peux préparer un barbecue pour un anniversaire et le lendemain, j’organise un dîner très guindé au ministère de la Culture. Je propose aussi des services de conseil en ouverture de restaurant ou en réduction des pertes alimentaires auprès des collectivités. En fait, je me laisse porter au gré des opportunités. Je ne m’ennuie jamais !

Causette : Votre rencontre avec Adrien Cachot, candidat de la saison 11 de Top Chef, vous a incitée à participer à la nouvelle saison de l’émission. Vous êtes-vous, là aussi, laissée porter ?
Chloé Charles :
On peut dire ça. Ce n’était pas forcément une émission qui me faisait envie à la base et d’ailleurs, j’ai souvent dit que je ne voulais pas la faire. Je trouve que le programme a quand même beaucoup évolué, il est davantage porté sur la cuisine que sur le show et a gagné en qualité. La période étant délicate du fait de la pandémie, je me suis dit "pourquoi pas essayer". Je ne regrette absolument pas. Top Chef a été une super expérience, qui m’a permis d’avoir des retours constructifs sur ma cuisine, de la part de chefs renommés, qui m’ont beaucoup appris. L’émission est un vrai accélérateur qui fait grandir super vite, c’est génial.

Causette : Le programme vous présente dès le début comme une cheffe engagée, notamment sur la limitation des déchets alimentaires. Comment en êtes-vous venue à développer une cuisine éco-responsable ?
Chloé Charles :
Dès ma première expérience en cuisine, j’ai appris à cuisiner les produits dans leur entièreté, mais c’était davantage pour des raisons économiques qu’écologiques. Aujourd’hui, ça me paraît naturel et juste cohérent de faire attention à ce que je fais. À 34 ans, en 2021, on ne peut que se soucier de l’écologie. J’ai toujours eu à cœur d’avoir un impact sociétal positif et je me suis rendu compte, notamment lorsque j’ai travaillé au restaurant Fulgurances (à Paris), que je pouvais faire passer beaucoup de messages à travers mes assiettes. J’essaie juste de ne pas tomber dans une approche culpabilisante ou moralisatrice car la cuisine, c’est avant tout du plaisir. Le meilleur moyen de convaincre les plus réticents est de leur proposer une cuisine éco-responsable accessible et ludique. Je me sers aussi d’Instagram pour démocratiser cette approche et, j’espère, la normaliser.

Causette : Vous êtes aussi membre du conseil d’administration de l’Ecole comestible, une association fondée par la journaliste Camille Labro qui propose des cours d’éducation à l’alimentation. En quoi est-ce important de sensibiliser les plus jeunes à ce sujet ?
Chloé Charles :
De nos jours, on n’apprend plus à nos enfants à faire à manger. Avant, c’était surtout les mères qui s’en chargeaient mais aujourd’hui les femmes travaillent davantage, et tant mieux d’ailleurs. Globalement, les gens ont de moins en moins de temps à consacrer à la cuisine. Il est indispensable que l’école prenne le relai car on ne peut pas se nourrir que de plats tout prêts et je suis triste de voir que certains enfants ne savent pas reconnaître un poireau. L’industrialisation de l’alimentation nous a d’abord semblé géniale car on n’avait plus qu’à réchauffer une barquette au micro-ondes pour se nourrir. Le problème, c’est que certaines familles se sont tellement désintéressées de la nutrition que leurs enfants ne savent pas comment faire du bien à leur corps. Avec l’association, on souhaite familiariser les enfants aux bons produits qui les entourent, leur apprendre à aimer les légumes et à avoir une alimentation équilibrée.

Causette : Comment parvenez-vous à vous adapter à cette période compliquée et qu’espérez-vous du fameux « monde d’après » ?
Chloé Charles :
Pour l’instant, tout s’est arrêté mais je travaille sur différents projets pour rebondir. Je suis par exemple en train de développer des produits d’épicerie fine et je planche aussi sur des recettes et astuces à diffuser via Instagram, pour encore plus pousser les gens à cuisiner chez eux. J’ai également collaboré avec Seazon [service de livraison à domicile de repas préparés], pour qui j’ai imaginé des recettes avec certaines contraintes. Pour ce qui est du monde d’après, je ne suis pas sûre qu’il y en aura un. L’urgence écologique était là avant la pandémie. Tout ce que je souhaite, c’est qu’on retourne au resto, qu’on se parle entre inconnus et qu’on trinque avec bonne humeur.

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