Prostitution dans les salons de mas­sage : la jus­tice veut s'attaquer à « la mau­vaise foi » des bailleurs

Dans une interview accordée au Parisien, la cheffe de la lutte contre la délinquance organisée au parquet de Paris Julie Colin explique les stratégies de la justice contre les salons de massage chinois à Paris, qui abritent des réseaux de proxénétisme.

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Un salon de massage chinois à Paris © A.T.

« Nous allons demander aux enquêteurs de remonter systématiquement aux propriétaires [des murs des salons de massage incriminés] », a assuré au Parisien Julie Colin, dans une interview parue lundi 7 février. La magistrate à la tête de la lutte contre la délinquance organisée au parquet de Paris a dévoilé au quotidien les méthodes qui seront les siennes en 2022 pour lutter contre les réseaux proxénètes que cachent environ entre « 300 et 400 salons » selon les estimations du parquet dans la capitale.

Tout en continuant « d'infliger de fortes amendes dissuasives aux gérants de salon proxénètes », le parquet entend désormais « lutter contre la mauvaise foi des loueurs » en « saisissant leurs biens ». « Régulièrement, ces personnes déclarent qu'elles ne savaient pas que leur local abritait une activité de prostitution, observe Julie Colin, alors que nous avons parfois assez de preuves pour démontrer le contraire. » Implantés dans tout Paris mais principalement dans les XIè, XIXè, XXè et XVIè arrondissements, ces salons prétendument de massage sont les lieux de passes payées entre « 20 et 100 euros avec d'importants profits pour les souteneurs », indique Le Parisien. Les femmes qui s'y prostituent sont des primo-arrivantes majoritairement chinoises (85% selon les statistiques avancées par Le Parisien), puis thaïlandaises (14%).

En septembre, l'association Zéro Macho publiait une enquête sur ces maisons closes qui ne disent pas leur nom, en soulignant que les 300 recensées vivotaient dans l'indifférence des riverain·es et des autorités publiques, bien qu'elles aient pignon sur rue. « Ces femmes sont victimes d’une superposition de racisme, de dédain de classe et de misogynie », nous disait Frédéric Robert, co-rapporteur de l'enquête. Zéro Macho avait envoyé, à l'appui de cette étude, un signalement au Procureur de la République. De son côté, Julie Colin assure avoir saisi la brigade de répression du proxénétisme (BRP) à la suite de cette information, ainsi qu'avoir demandé à l'association la liste des salons qu'elle soupçonne de proxénétisme, sans réponse à ce stade. Problème : Zéro Macho, contacté par Causette, assure n'avoir jamais reçu une telle requête. « Nous sommes contents que les autorités s'emparent du sort de ces femmes contraintes par les réseaux de se prostituer, mieux vaut tard que jamais, ironise celui qui pointe l'indifférence, jusqu'ici, des pouvoirs publics. Si nous recevons une demande, nous réfléchirons à l'opportunité de confier une liste d'établissements à la police mais cela nous surprend : il suffit de consulter les sites de petites annonces proposant des services de "massages tantriques" ou "massages nus" pour savoir quels sont les salons qui prostituent leurs employées, donc on ne voit pas trop en quoi la police aurait besoin de nos services. »

Lire aussi l Prostitution : l'asso Zéromacho saisit la justice au sujet des salons de massage chinois de Paris

La magistrate a également livré les derniers chiffres disponibles sur la pénalisation de ce système : « Aujourd'hui, sept dossiers terminés sont en attente d'être jugés. Cinq affaires significatives sont ouvertes à l'instruction et trois enquêtes préliminaires ont été lancées sous l'autorité du parquet. » Enfin, elle souligne l'importance de l'accompagnement des victimes lorsque l'un de ces réseaux prostitutionnels est démantelé, via des associations partenaires.

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