Manfred Werner Tsui CC by sa 4.0 Die Blumen von gestern Osterreichpremiere 2017 14 Adele Haenel
© Manfred Werner (Tsui) - CC by-sa 4.0 / Wikimedia Commons

#MeToo : pro­cès requis contre le réa­li­sa­teur Christophe Ruggia, accu­sé d’agressions sexuelles par Adèle Haenel

Le parquet de Paris a requis le renvoi en correctionnelle du réalisateur Christophe Ruggia pour des agressions sexuelles sur Adèle Haenel au début des années 2000, alors qu’elle était mineure. En 2019, la prise de parole de l’actrice avait provoqué une déflagration #MeToo dans le cinéma français.

Christophe Ruggia sera finalement poursuivi. Le parquet de Paris a requis mercredi le renvoi devant le tribunal correctionnel du réalisateur pour “agressions sexuelles sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité” sur l’actrice Adèle Haenel. Des sources proches du dossier ont confirmé, jeudi, cette information, révélée par RMC. La décision finale sur un procès est désormais entre les mains de la juge d’instruction.

Pour l’heure, “lire dans ce réquisitoire que les faits sont suffisamment caractérisés, corroborés par des témoignages et que mes déclarations sont constantes, précises et crues me touche beaucoup. C’est une étape du processus judiciaire mais, à l’évidence, elle est importante”, a commenté Adèle Haenel auprès de Mediapart. Selon les sources proches du dossier, deux circonstances aggravantes ont été retenues par le ministère public : la minorité d’Adèle Haenel au moment des faits reprochés – à partir de ses 12 ans – et la position d’autorité de Christophe Ruggia, premier réalisateur à l’avoir dirigée dans un long-métrage.

C’est dans une longue enquête et interview à Mediapart – qui avait révélé l’affaire – qu’Adèle Haenel avait dénoncé, fin 2019, l’“emprise” du réalisateur, peu connu du grand public, pendant la préparation et le tournage du film Les Diables. L’actrice avait dans un premier temps refusé de saisir la justice, avant de finalement porter plainte quelques jours après l’ouverture d’une enquête préliminaire par le parquet de Paris, le 6 novembre 2019. Christophe Ruggia avait alors été mis en examen le 16 janvier 2020 pour “agressions sexuelles sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité sur la victime”, et placé sous contrôle judiciaire.

Le “caractère systématique” de ces attouchements

Il résulte des déclarations circonstanciées, constantes, précises et datées d’Adèle Haenel […] et des éléments recueillis au terme de l’instruction que Christophe Ruggia lui a imposé des agressions sexuelles, nonobstant les dénégations de celui-ci”, écrit le parquet dans ses réquisitions datées de mardi. À l’appui des déclarations d’Adèle Haenel, ce dernier évoque également des lettres de l’intéressée, cinq “confidents”, deux témoins visuels de “l’attitude déplacée” du réalisateur, ainsi que le témoignage de la mère de la plaignante.

Alors âgé de 36 à 39 ans, Christophe Ruggia aurait reçu tous les samedis après-midi Adèle Haenel, entre septembre 2001 et février 2004. Les réquisitions évoquent un “caractère systématique” des attouchements subis par la jeune actrice lors de ces “visites”. Auprès des enquêteur·rices, Adèle Haenel décrit ces violences : “Il commençait à me caresser les cuisses en remontant vers mon sexe, comme ça, l’air de rien. Il touchait alors aussi mon sexe, il m’embrassait dans le cou […] et il touchait ma poitrine.” Le parquet souligne par ailleurs des “épisodes de chantage affectif lors de festivals à Marrakech et Yokohama”.

Après la déflagration de ces accusations, Christophe Ruggia s’était présenté comme “sans doute le premier admirateur d’Adèle Haenel” et avait réfuté “les gestes physiques et le comportement de harcèlement sexuel dont elle [l]’accuse”. Dans un langage qui fait écho aux révélations ébranlant actuellement le cinéma français, il avait à l’époque reconnu avoir “commis l’erreur de jouer les pygmalions […]. Emprise du metteur en scène à l’égard de l’actrice qu’il avait dirigée et avec laquelle il rêvait de tourner à nouveau”.

Lire aussi I La comédienne Judith Godrèche porte plainte pour “viols avec violences sur mineure de moins de 15 ans” contre le cinéaste Benoît Jacquot

Figure

Fin 2019, l’entretien accordé à Mediapart par Adèle Haenel avait provoqué le choc nécessaire pour libérer la vague #MeToo au sein du cinéma français, resté jusque-là imperméable au mouvement malgré de premières accusations, comme celles en 2018 visant le cinéaste et producteur Luc Besson, écartées depuis par la justice française. Depuis, de nouvelles plaintes continuent de ponctuer l’actualité. Dans sa déclaration à Mediapart, Adèle Haenel s’est notamment dite “bouleversée” par les récentes révélations de l’actrice Judith Godrèche.

L’héroïne de Portrait de la jeune fille en feu a plusieurs fois dénoncé “la complaisance généralisée du métier vis-à-vis des agresseurs sexuels”. Depuis sa sortie historique contre Roman Polanski lors de la cérémonie 2020 des César – où elle s’était écriée : “La honte !” –, Adèle Haenel fait figure de symbole de la révolte contre l’impunité au sein du cinéma français.

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