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Maïalen Mallet © Louise Huet

Législatives : Maïalen Mallet, la can­di­date qui se bat pour rajeu­nir l’Assemblée nationale

Série : Les primo-candidat·es en campagne 5/6 

Causette a suivi Maïalen Mallet, la candidate parisienne du parti Allons Enfants aux législatives, lors d’une séance de tractage au marché Convention dans le 15ème arrondissement de Paris. L’occasion de mieux comprendre son engagement, sa vision de la politique, et les difficultés de faire campagne avec une très petite équipe.

« Bonjour, je suis candidate aux législatives. » Tout sourire, Maïalen tend un tract à une passante. Stupéfaite, la dame prend le papier et continue d’arpenter le marché. À tout juste 24 ans, Maïalen Mallet surprend souvent les habitant·es du quartier. Cheveux au vent, gilet à motif bariolé et jean noir, son style simple et décontracté lui donnerait plutôt des airs d'étudiante.

Pourtant, la militante n’est définitivement plus à l’école. Propulsée dans la cour des grands, elle défend avec hargne sa candidature aux législatives depuis plusieurs mois, pour la 13ème circonscription de Paris. Sous quelle étiquette ? Allons Enfants, parti fondé en 2014, avec pour credo principal : réconcilier les jeunes et la politique en les intégrant dans les organes institutionnels. Composé de membres âgé·es de 18 à 27 ans, Maïalen s’y trouve comme un poisson dans l’eau. « On est comme une petite famille. Après le tractage on se pose toujours pour prendre un verre, c’est très sympa et ça permet de décompresser », raconte la vingtenaire à Causette.

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Pierre, Maïalen, Victor et Gary © L.H.
Une organisation bien rodée

À quelques jours du premier tour des élections législatives, la candidate est constamment sur le pont. Aux sorties de métro les soirs de semaines, aux événements du quartier les weekends, Maïalen sillonne les rues de sa circonscription en dehors de ses horaires de travail pour tenter de rallier quelques habitant·es à son projet démocratique. Une organisation millimétrée qui nécessite l’aide des autres militants du parti. Ce jour-là, ils ne sont que trois à porter la candidature de leur collègue, Victor, Gary et Pierre, répartis aux quatre coins du marché. Ce dimanche matin au marché Convention, la séance de tractage ne décolle pas beaucoup. « Aujourd’hui, c’est plus compliqué que d’habitude. Je crois que j’ai dû distribuer trois tracts en trente minutes », s’étonne Pierre, juriste en droit public.

Mais la petite équipe ne se laisse pas décourager. « Le tractage, ça forge le caractère. On se prend beaucoup de vents, mais c’est le jeu. Il ne faut pas avoir un gros ego pour faire ça », plaisante Pierre. « Et puis dès qu’il y a une conversation, un vrai échange avec quelqu’un, ça nous rebooste complètement. On se dit qu’on ne fait pas ça pour rien », ajoute Maïalen avec un petit sourire. 

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Maïalen Mallet en pleine discussion avec une passante © L.H.
La démocratie, mais autrement

La jeune femme originaire de Tours s’est lancée dans cette folle course aux législatives avec des idéaux en tête et des rêves d’une société plus juste. Sa candidature entend montrer que les jeunes sont tout à fait compétent·es pour s’organiser politiquement. Au moment même où elle nous parle de son programme, un homme d’un certain âge s’avance. Pierre lui tend un tract et entame la discussion avec lui. « Mais moi, à 20 ans, j’étais totalement immature, je me faisais rire moi-même ! », s’exclame le monsieur aux cheveux blancs en comprenant le projet d’Allons Enfants.

« On est tout le temps confronté à ce discours, “il faut gagner de l’expérience, vous êtes trop jeunes…”, mais ce n’est rien d’autre que de la culture de l’infantilisation et du patriarcat où l’homme âgé est favorisé au détriment de la femme et de l’enfant. Quand l’enfant sort de son cadre, ça dérange. Nous on souhaite justement casser ce système », défend Pierre après le départ de l’homme. 

Pour eux, les jeunes portent les messages et les combats de demain : l’égalité homme-femme, l’importance de l’écologie, la lutte anti-raciste, les enjeux de la tech… « L’idée de notre parti et de ma candidature est de mettre un coup de pied dans la fourmilière, et d’éviter de reproduire ce schéma de hiérarchie basée sur l'ancienneté. Il n’y a personne de mieux placé que les jeunes pour agir et améliorer la vie des jeunes ! » Avec beaucoup de sensibilité, Maïalen explique qu’elle redoute le moment où elle devra placarder ses affiches : « Je n’aime pas du tout voir ma tête en énorme. Ce qui compte, ce sont nos valeurs, le collectif, et non la personne qui l’incarne directement », avoue-t-elle.

Les difficultés d’être un parti très peu connu

Cette sensibilité, Maïalen en est imprégnée. Adossée contre le métro, les mains agrippant ses tracts, elle décrit la charge mentale à supporter quand on mène campagne : « On n’imagine pas toutes les règles sur le grammage du papier, les coûts du bulletin de vote, les couleurs pour un tract… » Des codes très spécifiques que le petit parti doit gérer lui-même, à plein temps. Leur plus grand défi ? Se faire connaître. « Le plus cher, c’est le coût de l'invisibilité de nos actions, alors qu’on a de grandes idées. La plupart des gens arriveront pour voter le 12 juin, verront mon nom et se diront : “c’est qui celle-là ?” » 

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Maïalen et Pierre en plein tractage © L.H.

À côté d’elle, Pierre acquiesce. Avec les huit candidatures d’Allons Enfants investies dans toute la France, le parti détient en tout et pour tout 7000€ pour soutenir leurs campagnes. En face, la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) a mobilisé 30 000€ seulement pour sa candidate de la 13ème circonscription, Aminata Niakate. « On est réaliste, notre objectif c’est de faire au moins 1%. » L’autre écueil auquel la jeune femme fait face, l’auto-censure. « Je ne me sens pas encore suffisamment légitime pour être dans ce monde là, mais j’essaie de m'auto-convaincre que j’ai toute ma place. » Si elle regrette de devoir constamment prouver ses compétences, la juriste ne désespère pas. Au contraire, elle voit derrière toutes ces difficultés l’occasion de prendre confiance en elle : « Cette expérience m’apprend à argumenter mes idées, à gagner en aisance à l’oral, à me tenir plus droite et fière dans mes convictions. »

Concurrence acharnée avec les autres partis

En plus d’avoir peu de ressources, la concurrence est rude. À seulement quelques mètres, la candidate Nupes tracte avec des militant·es à côté du kakemono à son effigie. Une rue plus loin, c’est Renaissance (ancienne République en marche). Même heure, même endroit, mais pas les mêmes moyens. Une position d’infériorité pour Allons Enfants qui force souvent l’équipe de Maïalen à changer de place. « Il y a une vraie guerre de l’espace entre les différents partis, personne ne nous respecte », souffle la jeune femme. « C’est usant de voir cette rivalité, ce climat hostile. »

Pourtant partageant des idées proches, la Nupes n’a pas pris le temps d'inclure Allons Enfants dans leur accord entre partis de gauche. Médiatiquement, l’union se fait avec les colosses de la politique. Sans rancune, Maïalen n’est pas totalement convaincue par ces négociations. « C’est encore et toujours les mêmes visages d’hommes vieux qui sont mis en avant. On a besoin de candidatures jeunes, féministes. Dans la Nupes, les personnes racisées sont totalement invisibles, et ils mettent les femmes dans des circo non gagnables, simplement pour dire qu’ils respectent la parité », regrette la jeune candidate. « Nous, aucune de nos circo ne sont gagnables, donc on aura pas le problème d'être accusé de non-parité ! », renchérit Pierre.

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L'équipe d'Allons Enfants © L.H.
 L’après ? Une grande pause

11h30. Le tractage a duré une heure, suffisant pour un lendemain de soirée. Au café du coin, les quatre militant·es se retrouvent pour débriefer de la matinée. Au total, Pierre et Maïalen ont distribué une dizaine de tracts. Un maigre bilan. Quand on lui demande si ça ne la décourage pas, la juriste rit jaune. « Pour l’instant, je ne me pose aucune question, je me donne à fond pendant les quinze derniers jours. Après, je ferai une grosse pause sur la politique », confie-t-elle. « Il y a beaucoup de négatif et c’est très éprouvant, mais j’ai tellement appris sur moi-même, sur les autres. C’est une aventure folle à vivre, et je ne regrette rien », assure la jeune femme. 

Les militant·es finissent leur café et préparent déjà le prochain meeting de leur candidate. Il est bientôt l’heure de partir, mais pas le temps d’une sieste pour Maïalen. Elle doit aller chercher ses affiches de campagne à l’imprimerie, puis organiser les groupes de collage du lendemain. Un planning toujours très chargé, mais pour encore seulement quelques jours.

Lire aussi : Législatives : dans les coulisses du meeting de campagne de Rachel Keke

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