pink and yellow roses in close up photography
© Nick Fewings

Couple hété­ro : pour la Saint-​Valentin, faites les comptes avec votre +1

Chaque mois, l'autrice féministe Fiona Schmidt livre pour Causette ses réflexions sur ce qui ne tourne pas rond.

Saviez-vous qu’une journée mondiale du mariage catho précédait la Saint-Valentin de quelques jours ? Elle est célébrée le deuxième dimanche de février depuis la bénédiction apostolique de Jean-Paul II en 1993. La saison des amours tombe donc juste après celle de la crise de foi(e) du grand chelem réveillons-Épiphanies-Chandeleurs1, et ce n’est peut-être pas un hasard, plutôt un appel de phares du karma féministe. En 2020, selon les derniers chiffres de l’Insee, le nombre de mariages a atteint son niveau le plus bas depuis la Seconde Guerre mondiale. En cause, la crise du Covid, mais aussi l’effet Kiss (pas) Cool de la libération des mœurs couplée à un « biais de romantisme » : en gros, amour et contrat sont antinomiques, le mariage à l’ancienne est patriarcal, vive l’union libre ou le contrat égalitaire avec séparation des biens.

Les féministes des générations précédentes se sont battues pour que les femmes deviennent autonomes financièrement. L’idée était géniale, bien sûr, à condition que l’égalité économique entre femmes et hommes advienne. Or guess what ? On l’attend toujours. D’après la dernière enquête Emploi du temps de l’Insee, les femmes en couple avec enfant(s) travaillent 54 heures par semaine, contre 51 heures pour les hommes en couple avec enfant(s). Or pour les hommes, ce travail est professionnel pour les deux tiers, donc rémunéré, alors que la proportion est inverse chez les femmes. Ainsi, le travail gratuit des femmes continue d’enrichir les hommes : dans 75 % des couples hétéros, l’homme gagne davantage que la femme, et le taux désormais conjugalisé de l’impôt bénéficie aux hommes.

Par ailleurs, l’augmentation du nombre d’unions libres a coïncidé avec celle du nombre de séparations, puisqu’elles les facilitent. Or dans 8 cas sur 10, c’est la mère qui a la garde principale des enfants : après une séparation, le niveau de vie des femmes baisse de 23 %, contre à peine 3 % pour les hommes. Et ceux-ci retrouvent plus vite leur niveau de vie initial, sachant qu’ils se remettent en couple plus facilement.

Dernière conséquence de l’union libre : attribuée sous conditions aux veuves pour compenser l’écart entre les retraites – de l’ordre de 40 % –, la pension de réversion
est amenée à disparaître. Résultat : entre 1998 et 2015, les inégalités de patrimoine entre les femmes et les hommes ont quasiment doublé, passant de 9 à 16 %2, et elles devraient continuer sur cette voie, puisque chaque crise fait reculer l’égalité de plusieurs années. Moralité : quand on aime, on ne compte pas, mais on devrait commencer, et vite.

Lire aussi l Impôts et prestations sociales : pourquoi la politique « familialiste » de l'État français crée des injustices financières pour les femmes

  1. Au pluriel, rapport aux recompositions familiales en série.[]
  2. Toutes les données sont issues du livre de Céline Bessière et Sibylle Gollac, Le Genre du capital. Comment la famille reproduit les inégalités, éd. La Découverte poche, 2022.[]
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