"Deux secondes d'air qui brûle", le pre­mier roman à la langue rare de Diaty Diallo

Une ville de banlieue, un quartier, un parking, une friche, une dalle et un immeuble en pyramide. Astor, Chérif, Issa, Demba, Nil et les autres. Ils vont « là où ça chill ». Et leurs journées sont émaillées de contrôles policiers. Jusqu’à celui de trop. Un récit au style qui claque, qui doit autant à Faïza Guène qu’à Virginie Despentes. Une langue du bitume bien rare en littérature. C’est le premier roman de Diaty Diallo.

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Diaty Diallo © Bénédicte Roscot

Causette : Quel est votre parcours, avant ce roman ?
Diaty Diallo : Je viens du master de création littéraire de l’université Paris VIII, que j’ai fini cette année. J’y étais entrée en 2020, avec un projet qui est devenu ce livre. J’ai longtemps eu une pratique quotidienne de l’écriture, une pratique compulsive, proche de la prose poétique mais pas du tout dans la fiction. J’écrivais aussi des chansons, en anglais notamment, pour les chanter. Le roman, c’est venu avec un burn-out en 2019 et 2020, consécutif à un emploi que j’ai eu dans l’associatif, à Paris. Une fois surpassé, ce burn-out m’a fait aller plus au fond des choses. Et l’écriture est revenue naturellement.

Quel a été le déclic, pour Deux secondes d’air qui brûle ?
D. D. :
C’était assez conceptuel, au départ. J’ai d’abord eu des idées de lieux, de thèmes, sur lesquels j’avais envie d’écrire. La ville, avant tout. J’aimais l’idée que celle-ci se découpe en espaces. Et que chacun d’eux corresponde à une histoire. Voilà pourquoi il y a ce quartier, cette place, cette pyramide. Je m’intéressais à certaines personnes qui font la ville. Notamment ceux qui font de l’exploration urbaine, l’« urbex1 », ou encore ceux qu’on a appelés les juicers, qui récupèrent des trottinettes en libre-service pour les recharger et ensuite les redéposer. Comme les livreurs à vélo, ce sont des travailleurs du clic, des exploités des temps modernes. Ces derniers, on ne les voit pas, mais ils régulent pas mal de choses. Travaillant le sujet de la ville et de la banlieue, j’ai eu l’idée de la thématique des violences policières de manière quasi naturelle. J’avais envie d’exploiter autant la radicalisation politique que la récupération politique qui peuvent en découler. Car je suis moi-même radicale dans mes idées politiques. J’ai milité dans des collectifs informels, très loin des syndicats ou des partis, qui ne me représentent ni moi, ni les miens, ni mes communautés.

Ce qui frappe, c’est votre langue : un rythme et un flow ahurissants...
D. D. :
Ce que j’aime avant tout, c’est la musique. J’écoute plus de musique que je lis de livres. J’ai une obsession pour le rythme. Donc, il faut que ma langue sonne, sinon c’est un échec. C’est pourquoi je relis à voix haute, tout le temps. Ensuite, il y avait un challenge littéraire : décrire une situation qui allait exploser. Je devais rester visuelle. Je fais moi-même de la photo, j’ai donc pu partir de cadres, d’images et de visions que j’avais eues. J’avais envie de quelque chose qui enflamme.

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Deux secondes d’air qui brûle, de Diaty Diallo. Seuil, 176 pages, 17,50 euros.

  1. L’urbex, abréviation d’« exploration urbaine », est la pratique consistant à visiter des lieux construits et abandonnés par l’homme.[]
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