Politisée et littéraire, la comédienne de 27 ans révélée dans Divines revient, en majesté, à l’affiche de deux films ce mois-ci, Robuste et Entre les vagues.

Fracassante entrée dans le cinéma que de commencer sa carrière par un César. Une éclatante consécration autant qu’un écrasant poids à porter : « Je me le dis encore aujourd’hui. Quand ça arrive, on a l’impression de marcher sur des braises. On se demande pourquoi c’est allé vite pour moi et moins pour d’autres », s’étonne rétrospectivement Déborah Lukumuena.
À l’époque, elle avait auditionné par curiosité pour faire de la figuration dans Divines, flamboyant buddy movie qui se déployait dans une cité francilienne avec toute la démesure et l’outrance d’un film de gangsters. En 2017, elle remportait à 22 ans le précieux sésame pour un second rôle dans ce premier film de Houda Benyamina. Sur la scène de la Salle Pleyel, la jeune femme, ployant sous les applaudissements, lisait au micro un texte griffonné à la hâte dans le RER.
De la puissance des femmes
La trajectoire ascensionnelle du film, propulsé de Cannes aux Golden Globes et cumulant 400 000 entrées au box-office français laisse aujourd’hui un héritage contrasté : « Ça a été un chapitre dans le cinéma français qui a permis à d’autres fictions du même genre de voir le jour, analyse la comédienne. Le film a aussi démocratisé une discussion autour de la puissance des femmes, qui sont capables de violence, ce n’est pas uniquement un attribut masculin. » Un épiphénomène qui n’a pourtant pas suffi à altérer en profondeur les structures d’une industrie au visage uniforme et désespérément blanc.
La sortie de Divines n’a pas non plus dissipé le mirage persistant selon lequel des interprètes amateur·rices issu·es de milieux populaires seraient découvert·es de manière providentielle, puis se contenteraient de transposer leur vie en improvisant face caméra. Certains médias se sont gargarisés du miracle méritocratique permettant à une jeune fille de banlieue de « monter à Paris » faire du cinéma, oubliant au passage que rares sont celles et ceux à se glisser dans les interstices d’un milieu dominé par la reproduction sociale et l’entre-soi.
Or, le parcours de Déborah Lukumuena prend à[…]