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La nou­velle série de « Un pod­cast à soi » s'intéresse à la vio­lence des femmes et aux détenues

Chaque mois, Charlotte Bienaimé propose un nouveau numéro de sa superbe série « Un podcast à soi » sur Arte Radio. Causette est fan, et parfois partenaire de ce travail d’expertise et d’intimité qui décrypte, à l’aide de témoignages et de réflexions,
des thèmes qui nous sont chers. La nouvelle série en cours interroge la violence,
la colère et les relations entre genre et prison.

Causette : Le cœur de cette nouvelle série, c’est la violence des femmes ?
Charlotte Bienaimé : Pas seulement. Au départ, je voulais parler des prisons, de la détention. Rapidement, j’ai axé ma réflexion sur les femmes en prison, puis j’ai réalisé que j’avais envie de développer, de creuser le parcours qui y mène, ce qui se passe dans les lieux de détention et ce qu’il advient après. J’avais envie d’une thématique globale.

Le premier épisode est donc consacré aux femmes auteures de violences, et à leur parcours...
C. B. : J’avais envie de faire parler des femmes invisibles : qui est plus invisible que les femmes en prison ? J’ai senti chez elles une colère immense. Elles ne sont pas prises en considération ; la plupart du temps, leurs actes sont niés, ou mal compris. Il faut se rappeler qu’il y a quelques années encore, il était difficile de faire entendre que les femmes pouvaient être violentes. La société ne les envisage dans leur réalité, sans fantasmagorie, que depuis peu.

Vous avez choisi de donner la parole à Ève, qui a poignardé plusieurs conjoints violents, et à Zineb, une jeune délinquante devenue proche des réseaux djihadistes. Pourquoi elles ?
C. B. : J’ai rencontré beaucoup de femmes auteures de violences, y compris parfois envers d’autres femmes. Elles sont toutes différentes bien sûr, mais elles ont un point commun : toutes ont été victimes de violences masculines (tout comme beaucoup d’hommes violents, d’ailleurs). Ève et Zineb sont très représentatives de ce parcours.

Leur personnalité a compté aussi, sans doute ?
C. B. : En effet, elles ont une façon de raconter, de ­partager leur vécu sans fausse retenue, qui est nécessaire dans l’exercice du podcast. Et puis elles ne sont pas « lisses »… elles assument leurs contradictions avec honnêteté.

Y a-t-il des éléments qui vous ont surprise dans leurs discours ?
C. B. : Je m’attendais à des parcours de vie fracturés, en miettes… Pour chacune de ces rencontres, j’ai été surprise par leur force et leur puissance, et aussi par leurs convictions féministes, qu’elles se sont forgées par l’expérience. J’ai été impressionnée par le recul qu’elles ont sur leurs parcours. Il faut dire qu’en prison, on vous demande sans cesse de vous raconter. L’enfermement oblige à faire un retour sur soi. C’est, comme le dit la sociologue Natacha Chetcuti-Osorovitz, « “une chambre à soi” maudite* ».

Pourtant, Ève raconte qu’on lui demande de parler d’elle, mais lorsqu’elle le fait, on lui reproche d’être narcissique …
C. B. : En effet, si on ne cesse de se raconter en prison, il faut correspondre à ce qu’on attend de vous. Elles parlent, mais n’ont pas l’impression d’être entendues. En fait, on leur demande de se raconter pour réfléchir à leurs actes, et au final, uniquement pour qu’elles reconnaissent leurs torts. Ce qui ne résout rien. On demande à ces femmes de parler de leur vie, mais la justice s’interroge peu sur les parcours, ne prend pas en compte la structure sociale qui les entoure, le patriarcat, la domination, le racisme. Tout ce qui pousse ces femmes à la violence.

Les épisodes

Épisode 1 : Des femmes violentes

Épisode 2 : Prisonnières et visiteuses (30 juin)
En écoutant les voix de prisonnières ainsi que les témoignages de conjointes, mères ou amies de détenu·es, Charlotte Bienaimé interroge les conditions d’incarcération.

Épisode 3 : L’heure de la vengeance (septembre)
Est-ce que la prison protège les femmes ? Étant donné que les violeurs et les hommes violents sont très peu emprisonnés et que, lorsqu’ils le sont, ils sortiront un jour... qu’en faire ?

Épisode 4 : Que faire des violeurs ? (octobre)
En écoutant des réunions entre hommes auteurs de violences sexuelles et conjugales et femmes victimes de ces violences qui ont exprimé le besoin de se rencontrer, nous découvrirons les concepts de « justice restaurative » et de « justice transformative ».

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