Série « Nouveaux départs » – « Au début, la musique n'était qu'un hob­by » : com­ment la chan­teuse Silly Boy Blue a fait de sa pas­sion son métier

Série d’été « Nouveaux Départs », 5/9

Cet été, Causette s'intéresse aux nouveaux départs et tournants que peut prendre la vie. Silly Boy Blue, de son vrai nom Ana Benabdelkarim, est une jeune chanteuse de 27 ans qui vient de sortir un superbe deuxième album, Eternal Lover, aux influences pop et rock, sur les vicissitudes de l'amour. Cette ancienne journaliste se souvient pour nous du moment où elle a tout arrêté pour basculer, pleinement, dans la musique et se consacrer à ce qu'elle ne pensait être qu'une simple passion.

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Silly Boy Blue (© Louis Lepron)

"Je fais de la musique depuis que je suis très jeune. Je joue du piano, parce que mon frère en avait un, et de la guitare électrique, après en avoir reçu une à mes 13 ans. Mais je n'ai jamais vraiment pris de cours, à part quatre de guitare. Pour le piano, j'ai appris sur le tas, à l'oreille, en essayant de maîtriser les quatre accords principaux. Et pour la guitare, j'imprimais des tablatures de mes morceaux préférés que j'essayais de reproduire. Très vite, j'ai monté mon premier groupe avec ma meilleure amie au collège, en troisième, puis j'ai enchaîné les formations plus professionnelles. Au lycée, à 16 ans, je suis devenue la chanteuse d'un groupe dont les membres avaient 30 ans. Quand mes amis faisaient la fête, moi je faisais des concerts avec eux à Nantes, d'où je suis originaire, et aux alentours.

En 2013, après le lycée, j'ai fait un DUT Information-Communication à Bordeaux car je ne savais pas vraiment quoi faire et que mon copain de l'époque se lançait dedans. Il m'a larguée en juin, juste avant les oraux pour cette formation, mais je suis quand même allée m'installer là-bas pour suivre les cours. J'ai quitté le groupe de musique qu'on formait et j'ai continué à jouer dans mon coin. Je suis ensuite partie à Paris en 2015, où j'ai enchaîné avec une licence et deux masters en journalisme. Pour moi, la musique était alors une passion, un hobby, je voulais suivre des études sérieuses. J'ai alors rejoint à ce moment-là un nouveau groupe, Pégase, avec lequel j'avais un peu collaboré et qui se trouvait à Nantes. Je faisais le plus possible d'allers-retours entre les deux villes pour répéter avec lui et enregistrer des morceaux. On est même partis en tournée alors que j'étais encore en étude. À l'époque, je crois que je ne me rendais pas compte que tout mon temps libre allait dans la musique.

« Je me suis rendu compte que la musique était véritablement le seul point fixe de ma vie »

En 2017, le jour où j'ai commencé une alternance de deux ans en journalisme, on a arrêté Pégase. Je me suis alors lancée en solo, avec un label qui n'existe plus, et j'ai sorti mon premier EP. Tout en continuant mes études. Mais au cours de l'alternance, trois événements m'ont poussée à plaquer le journalisme pour la musique. J'ai, tout d'abord, eu la possibilité de faire les premières parties de nombreux artistes comme Jeanne Added et Fishbach, ce qui m'a obligée à poser toutes mes semaines de congés payés que j'avais en 2019. Ensuite, le 14 février de cette même, je m'en souviendrais toujours, pour la première partie du concert de Flavien Bergé au Stéréolux à Nantes, je n'avais plus de moyen de m'absenter du travail. J'ai alors demandé à mon boss de couvrir. Je suis arrivée au boulot avec ma guitare, j'ai pris un train pour Nantes, à 18h j'arrivais à la gare, 19h je faisais la balance, 20h je jouais, puis à 6h du matin j'étais de nouveau dans le train pour retourner à Paris. Enfin, quelques mois après, je remportais le trophée des jeunes talents au Printemps de Bourges et je jouais au Fnac Live Festival, en plein pendant la rédaction de mon mémoire. Là, je me suis dit que je vivais quelque chose de beaucoup trop intense.

Je me suis posée et je me suis rendu compte que la musique était véritablement le seul point fixe de ma vie. Le 8 octobre 2019, une semaine après la fin de mon contrat dans mon média, j'ouvrais mes droits pour devenir intermittente du spectacle. J'aimerais dire que j'ai eu un début de carrière très fluide, mais en fait il s'agissait pleinement d'un nouveau départ, d'un changement de vie total. J'ai énormément stressé au début, alors que financièrement ça allait, et du coup je disais à mes parents que je pouvais peut-être refaire un BTS. Là ils m'ont clairement répondu qu'il fallait que j'arrête de m'inquiéter et qu'il était temps d'arrêter les études. J'ai eu beaucoup de mal à me sentir légitime en tant que chanteuse, étant donné que c'était tout nouveau pour moi. Je gardais encore mes cartes de presse dans mon porte-monnaie pour me dire que j'étais un peu journaliste. D'ailleurs, aux yeux de ma famille éloignée, j'étais un peu la saltimbanque de service. Ils ne m'ont prise au sérieux que lorsque je suis passée à la télévision, sur Taratata, en 2021.

C'est un changement de vie radical, qui m'a permis de rencontrer des gens extraordinaires, mais j'ai aussi toujours mon cercle d'amis de Nantes et du journalisme pour m'aider à garder les pieds sur terre. Aujourd'hui, j'ai deux albums à mon actif, je suis signée chez Sony, et j'ai toujours le même manager, qui était mon tourneur sur mes premières dates. Je suis hyper heureuse d'avoir fait ce choix un peu inconscient. Si ce métier est dur physiquement et moralement, c'est le plus beau du monde. Je me suis rendu compte que je ne voulais plus rien faire d'autre lorsque j'écrivais mon deuxième album, l'année dernière. J'étais en panne d'inspiration et mon copain m'avait dit, qu'au pire, je pouvais toujours écrire des articles en tant que journaliste indépendante : j'ai angoissé à cette idée et j'ai alors écrit les premiers morceaux d'Eternal Lover... ! "

Épisode 1 - Refaire sa vie en famille à plus de 5500 km

Épisode 2 - « J’ai envie de transmettre à ma fille que le bonheur est un choix et qu’on a le droit de tout quitter pour être libre et heureuse »

Épisode 3 - Marie Gervais, ancienne victime de violences conjugales : « On peut construire une autre histoire sur les cendres de la première »

Épisode 4 - « Je suis devenu celui qu'enfant j'avais toujours voulu être » : le comédien trans Amir Baylly nous raconte sa transition

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