Réforme des retraites : pour Rachel Keke, dépu­tée LFI, « pour que le gou­ver­ne­ment recule, il faut blo­quer le pays »

À l'occasion de la journée mondiale d'action en faveur du droit de grève qui se tient ce samedi 18 février, Causette a interrogé Rachel Keke, députée La France insoumise (LFI) du Val-de-Marne, et figure emblématique de la lutte par la grève. Interview.

rachel keke
Rachel Keke © Louise Rocabert

Causette : Depuis votre victoire en mai 2021 à l’issue de 22 mois de grève pour obtenir de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail à l’hôtel Ibis Batignolles où vous travailliez comme femme de chambre, vous êtes devenue un symbole des grèves qui portent leurs fruits. Que représente le pouvoir de la grève à vos yeux ?
Rachel Keke : Pour commencer, je tiens à rappeler que faire la grève n'est pas synonyme de joie. Faire la grève, c'est avant tout réclamer ses droits, et c'est ce qui fait la force des travailleurs. Le pouvoir de la grève, c'est de réussir à entamer une discussion avec les patrons et à les faire venir à la table des négociations. Le langage de la grève, c'est le seul que les patrons comprennent. C'est bizarre, mais c'est comme ça. Nous, quand on s'est lancé dans la grève des Batignolles, le patron nous avait dit : « De toute façon, je suis habitué à la grève, vous pouvez faire ça pendant quatre, cinq mois ça ne me dérange pas. » Mais quand on s'est mis vraiment en grève, en menant des actions fortes, comme empêcher les clients de dormir, là, on nous a écoutées. Dès qu'il a vu qu'on touchait à son porte-monnaie et que ses intérêts étaient menacés, il s'est mis à la table des négociations. C'est ça, la puissance de la grève.

Vous multipliez les prises de paroles remarquées à l’Assemblée contre le recul de l’âge de départ à la retraite, notamment ce moment du 10 février où vous avez demandé qui, dans l’Assemblée, avait déjà exercé un métier pénible. Votre partition est-elle là pour infléchir le vote de vos collègues député·es ou s’agit-il d'accompagner la mobilisation dans la rue ?
R.K. : Ce sont les deux à la fois. J'avais espoir de gagner des votes en touchant à la sensibilité de mes collègues à l'Assemblée. Mais ça a surtout aidé à la mobilisation. Les Français savent ce que le gouvernement leur impose. Le fait que je représente la victoire de la lutte par la grève n'est pas anodin : quand j'ai lancé cet appel à l'Assemblée nationale, les Français se sont mobilisés, ça a rassemblé beaucoup de monde dans les rues. Et maintenant, quand je vais dans les manifestations, les grévistes viennent me voir pour me dire merci de leur donner la force de se mobiliser. L'autre jour, un monsieur est venu me voir pour me dire que sa femme, qui n'avait jamais manifesté, est descendue dans la rue après ma prise de parole dans l'hémicycle. Ça me fait plaisir d'entendre tout ça. J'essaie de leur expliquer que c'est en sortant massivement dans la rue qu'on fera reculer le gouvernement. Comme j'ai l'habitude de dire : l'union fait la force.

Quel espoir mettez-vous dans l’appel à la mobilisation générale du 7 mars pour obliger le gouvernement à écouter la rue ?
R.K. : Depuis le 19 janvier, on se mobilise dans la rue et le gouvernement ne bouge pas d'un doigt. Le gouvernement s'en fiche parce qu'il n'y a pas d'actions fortes. Il faut s'organiser pour bloquer l'économie du pays et alors là, le gouvernement reculera. Là, il se rendra compte que c'est nous qui tenons le pays. Moi, j'attends avec impatience la grève du 7 mars. Mais il faut la poursuivre le 8 mars, pour la journée internationale des droits des femmes, et le 9, et le 10 et ainsi de suite. Pendant une semaine, il faut bloquer le pays. À ce moment là, le gouvernement nous prendra au sérieux et trouvera des solutions. C'est aussi ce que demandent les syndicats, de bloquer le pays. Et je veux que les Français ne se découragent pas, qu'ils soient nombreux à se mobiliser. Une très grande majorité des Français sont concernés et opposés à cette réforme des retraites, donc je pense qu'ils ne vont pas rester chez eux. Ils sont conscients qu'il faut aller dans la rue pour faire bouger les choses. Même si le gouvernement fait tout pour les décourager. Mais vous savez, moi dans une lutte, je ne me décourage jamais. On va bloquer le pays et le gouvernement va venir à la table des négociations avec les syndicats.

À lire aussi I Législatives : dans les coulisses du meeting de campagne de Rachel Keke

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