img 2675
Manifestation de syndicats, professeurs et élèves en Seine-Saint-Denis, ce jeudi 14 mars 2024 ©KN

Contre le manque de moyens et le “choc des savoirs”, syn­di­cats d’enseignant·es, parents et élèves de Seine-​Saint-​Denis sont dans la rue

Des mani­fes­ta­tions ont eu lieu ce jeu­di 14 mars, en Seine-​Saint-​Denis, pour obte­nir davan­tage de moyens pour l’école et empê­cher la mise en place de groupes de niveau. Les professeur·es et parents d’élèves dénoncent des condi­tions maté­rielles “insa­lubres” dans le dépar­te­ment et pro­testent contre la réforme du “choc des savoirs”. Reportage.

“Pas de moyen ? Pas de ren­trée !” Ce jeu­di, trois mani­fes­ta­tions se sont élan­cées depuis trois villes du dépar­te­ment de la Seine-​Saint-​Denis, La Courneuve, Dugny et Montreuil, avec pour pro­jet de conver­ger à Bobigny, devant la Direction des ser­vices dépar­te­men­taux de l’Éducation natio­nale (DSDEN). Plusieurs cen­taines de per­sonnes étaient pré­sentes. Parmi elles, professeur·es, membres de syn­di­cats (CGT, Sud Éducation93, FSU 93…), mais aus­si parents et élèves. 

Depuis trois semaines, leur mobi­li­sa­tion prend de l’ampleur, les grèves se mul­ti­plient et les bancs des col­lèges se vident pour ten­ter de pro­duire un rap­port de force sur le gou­ver­ne­ment. À l’origine du mou­ve­ment, deux déclen­cheurs. D’abord une grande enquête publiée par l’intersyndicale du 93 sur les manques de per­son­nel. Elle estime qu’il faut recru­ter au moins 5 000 enseignant·es, 2 200 accompagnant·es d’élèves en situa­tion de han­di­cap, 650 assistant·es d’éducation et des cen­taines d’assistant·es sociaux·ales et infirmier·ères dans le dépar­te­ment. La réforme des “chocs des savoirs” annon­cée par Gabriel Attal est éga­le­ment au centre des reven­di­ca­tions pour les manifestant·es, qui sou­haitent l’annulation du projet. 

"Des condi­tions maté­rielles et humaines abso­lu­ment épouvantables"

Pour une délé­guée syn­di­cale et pro­fes­seure de col­lège à Romainville, ren­con­trée dans la mani­fes­ta­tion par­tant de Montreuil, des “carences sont par­tout” et s’illustrent d’abord par l’insalubrité de cer­tains éta­blis­se­ments du dépar­te­ment : “Une école sur trois en Seine-​Saint-​Denis fait face aux nui­sibles qui infestent les bâti­ments. On observe par exemple des rats, punaises de lit, blattes, c’est assez impres­sion­nant.” Pour pou­voir tra­vailler cor­rec­te­ment et amé­lio­rer les condi­tions d’apprentissage des élèves, il faut “éga­le­ment des moyens humains”, ajoute-​t-​elle.

Le manque de per­son­nel médico-​social est un vrai pro­blème, notam­ment dans le cas de pre­mières mens­trua­tions qui arrivent au col­lège. “C’est un sujet qui n’est pas for­cé­ment facile à abor­der pour elles, explique la délé­guée syn­di­cale. Parfois, elles n’osent pas en par­ler à leurs parents. Et là, de trou­ver porte close, c’est par­ti­cu­liè­re­ment dra­ma­tique, parce que c’est des gamines qui ose­ront moins deman­der à un prof ou à la vie sco­laire.”

Des reven­di­ca­tions qui ont une por­tée natio­nale, mais qui doivent répondre “aux besoins spé­ci­fiques de cha­cune des régions”, pré­cise une ensei­gnante de fran­çais à Romainville. Elle rap­pelle que la Seine-​Saint-​Denis, compte tenu de sa den­si­té et de ses caté­go­ries socio­pro­fes­sion­nelles, est “beau­coup plus tou­chée par ce manque de moyens”. “Mais on sait que cela existe aus­si par­tout”, déplore-​t-​elle. Ce qu’il faut donc, c’est de l’argent, et pour elle, mettre “400 mil­liards pour l’armée” est un choix poli­tique. On peut bien “trou­ver une enve­loppe aus­si consé­quente pour l’avenir de nos enfants”.

Contre la réforme “choc des savoirs”

Bien qu’essentiel pour les manifestant·es, un meilleur finan­ce­ment ne résou­dra pas tout. Le texte de réforme du “choc des savoirs” doit être a prio­ri publié demain et, pour la pro­fes­seure de fran­çais, la mobi­li­sa­tion ne s’arrêtera pas si le pro­jet n’est pas aban­don­né. Au centre des pré­oc­cu­pa­tions de cette réforme, les groupes de niveaux. 

“C’est toute la recherche en sciences et en socio­lo­gie de l’éducation qui le dit : les groupes de niveaux sont extrê­me­ment défa­vo­rables aux élèves les plus en dif­fi­cul­té. Ils cassent toute forme de soli­da­ri­té entre des élèves qui viennent de milieux dif­fé­rents”, ana­lyse un pro­fes­seur d’histoire-géographie au collège. 

De nombreux·euses élèves et parents sont aus­si inquiet·ètes et mobilisé·es contre ce pro­jet. “L’école doit être un endroit bien­veillant, où on accueille sans trier, sans cloi­son­ner, tous les enfants. Le tri est un stress sup­plé­men­taire pour nos enfants”, rap­porte une mère. Sa fille, Thaïs, élève de CM1, a donc adres­sé une lettre à la ministre de l’Éducation natio­nale pour ten­ter de pro­tes­ter à son échelle. “Elle a écrit avec ses propres mots son inquié­tude face aux groupes de niveau. Aujourd’hui, elle ne veut plus aller au col­lège pour cette rai­son.” Espérons que son cri du cœur soit entendu.

Partager
Articles liés

Inverted wid­get

Turn on the "Inverted back­ground" option for any wid­get, to get an alter­na­tive sty­ling like this.

Accent wid­get

Turn on the "Accent back­ground" option for any wid­get, to get an alter­na­tive sty­ling like this.