people protest after leak of u.s. supreme court draft majority opinion on roe v. Wade abortion rights decision in Washington
Des manifestantes pro-IVG à Washington D.C. mardi 3 mai (©EVELYN HOCKSTEIN / Reuters)

Menaces sur le droit à l'avortement : vagues de mani­fes­ta­tions à tra­vers les États-Unis

De Washington D.C. à New York et Los Angeles, des manifestant·es pro-​IVG ont pro­tes­té en nombre dans l'ensemble des États-​Unis, face à l'inquiétude de voir le droit à l'avortement disparaître.

« Nos corps, nos choix », « Régulez vos propres bites », « Avorter est un droit humain »… De Washington D.C. à New York, en pas­sant par Los Angeles, Austin et Denver, des dizaines de mil­liers de per­sonnes se sont réunies mar­di à tra­vers les États-​Unis, de peur de voir le droit à l'avortement dis­pa­raître. Déjà vio­lem­ment atta­quée dans de nom­breux États, l'IVG est au centre d'un brouillon de déci­sion du juge de la Cour suprême Samuel Alito, daté de février et révé­lé par le site d'information amé­ri­cain Politico. Il sou­haite détruire défi­ni­ti­ve­ment le droit à l'avortement, ren­du pos­sible par l'arrêt Roe ver­sus Wade de 1973, en don­nant la pos­si­bi­li­té à chaque État du pays de conce­voir sa propre légis­la­tion sur l'IVG. Car, selon lui, « l'avortement repré­sente un pro­fond pro­blème moral sur lequel les Américains entre­tiennent de lourdes divi­sions ».

Une menace réelle sur le droit à l'avortement, qui a moti­vé de nombreu·ses Américain·es, majo­ri­tai­re­ment des femmes de tous les âges, à se mobi­li­ser dès le soir sui­vant la publi­ca­tion de Politco lun­di 2 mai. Parmi les ras­sem­ble­ments les plus mar­quants, celui de nom­breuses per­sonnes à Washington, mas­sées sur les marches de la Cour suprême, pan­cartes à la main et chan­sons pro­tes­ta­taires aux lèvres. « Nous sommes là parce que nous vivons une époque où il est effrayant d'être une femme », ont expli­qué à la chaîne USA Today Ellie Small et Emma Hearns, deux étu­diantes de 19 et 18 ans à l'université George Washington. « Je suis une sur­vi­vante de viol et de plu­sieurs trau­mas, avoir accès à l'avortement est néces­saire et sauve la vie des femmes. Je ne pour­rais pas ima­gi­ner voir tous les jours le visage de mon vio­leur dans un enfant », a de son côté racon­té Gabrianna Andrews, une ensei­gnante de 26 ans. 

À New York, plus d'une cen­taine de manifestant·es se sont réuni·es à Foley Square, juste devant le palais de jus­tice. Dans la foule, la pro­cu­reure géné­rale de l'État Letitia James, qui a dévoi­lé avoir elle-​même eu recours à une IVG. « C'est un appel à l'action, une alerte rouge. Il faut agir main­te­nant, ce n'est pas le moment d'être silen­cieux parce que le silence est notre enne­mi », a‑t-​elle lan­cé pour moti­ver l'assemblée, selon le New York Times. Parmi les per­sonnes pré­sentes, Theresa Swink, 82 ans, qui se sou­vient, « le cœur bri­sé », d'une époque où il fal­lait se rendre « dans un trou pau­mé » pour avor­ter. « Je ne pen­sais pas revivre ça aujourd'hui », a‑t-​elle ajou­té, émue. De son côté, Derek Holmes, un jeune homme de 26 ans, a regret­té auprès du quo­ti­dien que « beau­coup d'hommes ne voient pas l'importance de ce droit ». Avant de pour­suivre : « Je ne peux pas ima­gi­ner ce que ça peut faire d'avoir un enfant non-​désiré. »

À lire aus­si I Fuites à la Cour suprême : graves menaces sur le droit à l'avortement aux États-Unis

« Nous avons trop enten­du les extrêmes »

« Je suis en colère », a lâché, furieuse et dans une sor­tie remar­quée, la séna­trice démo­crate Elizabeth Warren à quelques pas de la Cour suprême des États-​Unis mar­di. « Pendant des décen­nies, les Républicains ont tout fait pour arri­ver à ce jour. Ils étaient là à com­plo­ter, obte­nant petit à petit des juges à la Cour suprême, afin d'avoir une majo­ri­té de per­sonnes pour accom­plir ce qu'une majo­ri­té d'Américains ne veulent pas. 69% des Américains ne veulent pas ça. Démocrates et répu­bli­cains, jeunes et vieux, veulent que l'arrêt Roe ver­sus Wade reste tel quel. Nous avons trop enten­du les extrêmes. Et nous en sommes fati­gués », a‑t-​elle pour­sui­vi, la voix trem­blante, visi­ble­ment gagnée par l'émotion. L'élue fait réfé­rence à un son­dage d'octobre 2020 de la Kaiser Family Foundation, dans lequel 69% des adultes interrogé·es affir­maient ne pas vou­loir voir la cour suprême remettre en ques­tion l'arrêt Roe ver­sus Wade. 

À lire aus­si I Elizabeth Warren, sur la route de Washington

Juste avant cette vidéo, la séna­trice s'était expri­mée sur les marches de la plus haute juri­dic­tion des États-​Unis, et avait poin­té du doigt l'injustice der­rière ce pos­sible chan­ge­ment de loi : « Je suis en colère parce que je sais qui va payer le prix de ceci. Ce ne sont pas les femmes riches. Les femmes riches peuvent prendre l’avion. Elles peuvent se rendre dans un autre État, dans un autre pays. Elles peuvent obte­nir la pro­tec­tion dont elles ont besoin. »

Dans un com­mu­ni­qué, Joe Biden a de son côté mar­te­lé que le droit à l'avortement est « fon­da­men­tal » : « Roe vs Wade est la loi de notre pays depuis plus de 50 ans. Au nom de la jus­tice et de la sta­bi­li­té de nos lois, il ne faut pas qu'il soit annu­lé. » Selon CNN, il a qua­li­fié devant la presse de « radi­cale » la déci­sion de vali­der le brouillon de déci­sion, car cela mar­que­rait « un tour­nant impor­tant » dans la manière dont les États-​Unis fonc­tionnent. Si un porte-​parole de la Cour suprême a recon­nu l'authenticité du docu­ment, il a sou­li­gné qu'il ne repré­sente pas « une déci­sion de la Cour ou la posi­tion finale de n'importe quel membre ». La menace est cepen­dant suf­fi­sam­ment sérieuse pour que le pré­sident appelle mas­si­ve­ment à voter pour des sénateur·trices et représentant·es pro-​choix lors des pro­chaines mid-​terms, ces élec­tions de mi-​mandat cru­ciales en novembre. Afin de pou­voir « codi­fier Roe vs Wade ».

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