Non, la domination des femmes par les hommes n’existe pas depuis la nuit
des temps, elle n’est apparue que (!) 5 000 ans avant notre ère. Marylène Patou-Mathis, préhistorienne, nous explique pourquoi cette dangereuse idée reçue n’a aucun fondement anthropologique.
Marylène Patou-Mathis est directrice de recherche au CNRS. Elle travaille au département Homme et environnement du Muséum national d’histoire naturelle. Reconnue mondialement pour ses recherches sur Neandertal, elle est l’autrice de nombreux essais. Son nouveau livre, L’homme préhistorique est aussi une femme, déconstruit pas mal de certitudes et de clichés sur les femmes préhistoriques, qui, n’en déplaise aux historiens, en avaient sous le gourdin.
Causette : Dans ce livre, vous pulvérisez les clichés sur les femmes préhistoriques, vous déconstruisez l’image de la pauvre créature fluette, consignée auprès des enfants, des plantes et des marmites (en pierre).
Marylène Patou-Mathis : C’est en effet une image totalement fausse, au moins jusqu’au milieu du néolithique [le néolithique débute 12 000 ans avant notre ère, ndlr]. Les découvertes et les analyses récentes remettent en question l’image genrée des sociétés et des activités. Prenons l’exemple des peintures rupestres : on a longtemps raconté que seuls les hommes les avaient peintes, pour représenter leurs chasses, exorciser leurs peurs, etc. Et puis, grâce à l’indice de Manning1, on a pu déterminer à qui appartenaient les traces de « mains négatives », ces sortes de signatures appliquées sur les parois. Et là, on a constaté qu’il y avait[…]
- L’indice de Manning est donné par le calcul du rapport entre la longueur de l’index et de l’annulaire de la main droite posée à plat. Le ratio entre ces deux doigts présente un dimorphisme sexuel : la différence de longueur entre index et annulaire est en moyenne plus grande chez les hommes que chez les femmes.[↩]