Noémie de Lattre : « Je me suis fait lipo­su­cer la culotte de cheval »

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© Causette

Humoriste, comédienne, féministe, Noémie de Lattre n’hésite pas à faire de ses opérations de chirurgie esthétique des sujets de sketchs. Vous en connaissez d’autres, vous, aussi sincères ?

Causette : Dès le début de votre spectacle, vous jouez cartes sur table : chez vous, tout n’est pas d’origine et vous vous en réjouissez. En quoi faire de la chirurgie esthétique puis en parler est une démarche féministe ?
Noémie de Lattre : Je me suis fait liposucer la culotte de cheval après mon premier gros cachet, à 28 ans, car ça faisait des années que j’en étais hyper complexée. À l’époque, je n’étais pas féministe, j’étais même plutôt à côté de la plaque, du genre « moi je ne suis pas en guerre contre les hommes ». Par contre, lorsque, à la suite de mon allaitement, je me suis fait refaire les seins, j’avais opéré une révolution intérieure sur le sujet. Et je me suis dit : je ne vois pas en quoi mon engagement pour des droits m’empêcherait de trafiquer un peu mon corps. Être féministe, pour moi, c’est faire ce dont j’ai envie. Si j’avais hésité à me refaire les seins, c’est mon féminisme qui aurait achevé de me convaincre de le faire.
Si j’en parle ouvertement, c’est parce que je m’ancre dans ma réalité pour créer mes spectacles, c’est la meilleure façon de ne pas donner de leçon. Je ne suis pas philosophe ou universitaire, ce que je peux apporter à la cause, c’est une incarnation grand public d’une femme qui veut être libre. Ce que je montre, c’est qu’on peut être apprêtée, sexy, refaite tout en étant une féministe véhémente.

N’avez-vous pas le sentiment de plier devant un idéal de beauté dicté par le patriarcat en recourant au bistouri ?
N. de L. : Évidemment que le patriarcat joue un rôle dans ces normes, mais se les approprier en conscience, n’est-ce pas un outil de lutte comme un autre ? Qui peut dire qu’on n’a pas plus de pouvoir, d’aplomb, de possibilités quand on prend soin de son apparence ? Je ne dis pas du tout qu’il faut être sexy, féminine ou avoir des faux seins, mais je dis que c’est une possibilité.
À l’inverse, les misogynes d’aujourd’hui veulent nous empêcher d’utiliser ces outils : « Tu es féministe, sois moche et poilue. » Oui, il peut y avoir une joie à être poilue, mais choisir l’épilation ne devrait pas me mettre en porte à faux avec mes sœurs féministes. Ces accusations de « mauvaise féministe » viennent de personnes sexistes, mais aussi de la part de certaines féministes, quand il s’agit d’opérations esthétiques : elles me refusent le droit d’être de leur côté.

Les femmes publiques qui assument le recours à la chirurgie esthétique sont peu nombreuses. Pas trop seule ?
N. de L. : Ma première colère va contre toutes ces comédiennes qui mangent un quart de salade par jour et disent en interviews qu’elles se gavent du matin au soir de choux à la crème de chez Angelina. Là, j’ai envie de tirer à vue. Ça peut avoir des conséquences gravissimes sur des jeunes femmes. Je suis de plus en plus suivie sur les réseaux sociaux et j’ai une responsabilité énorme, dire à ma communauté : « J’ai 20 000 euros de chirurgie sur moi, car je suis privilégiée, mais j’en chie autant que vous pour me plaire. »

Féministe pour homme, de Noémie de Lattre. Théâtre de la Pépinière, à Paris. À partir du 7 octobre.

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Écrit par Anna Cuxac

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