Kim K. au Met gala : être son propre fan­tasme jusqu'au bout du régime

En per­dant sept kilos en trois semaines pour entrer dans une robe taillée pour Marilyn Monroe et en s'en van­tant lors du Met gala, Kim Kardashian s'échappe du réel par le tru­che­ment de la chair.

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Kim K. dans la naked dress de Marilyn Monroe © Instagram

Édito. Être et demeu­rer « Break the inter­net1 Kim Kardashian » n'est pas chose aisée. En 2007, c'est une sex­tape d'elle et de son ex-​partenaire, le rap­peur Ray J, dévoi­lée en ligne qui la fai­sait sor­tir de l'anonymat. De cette expé­rience qu'elle dit non consen­tie, Kim tire­ra 5 mil­lions de dol­lars à l'issue d'un pro­cès, tout comme une image de sex­sym­bol et de femme d'affaires. La machine à fame était lan­cée et, deve­nue star de télé­réa­li­té fami­liale, femme-​sandwich en tout genre et patronne multi-​marques, Kim règne depuis lors sur le monde de l'influence. L'acmé de cette puis­sance d'image inter­vient peut-​être en décembre 2014, lorsqu'elle est cou­ron­née par Paper maga­zine « Break the inter­net Kim Kardashian », grâce à son fes­sier arti­fi­ciel sur lequel elle fait repo­ser en équi­libre une coupe de cham­pagne pour ser­vir les plai­sirs sco­piques cal­li­pyges déme­su­rés des années 2010 qu'elle a elle-​même contri­bué à créer. 

kim k

Comme conve­nu, la Une du maga­zine arty pro­voque l'apoplexie des réseaux sociaux et, pour d'aucuns, Kim K. devient celle qui, en expo­sant ses courbes, va décom­plexer les femmes de leurs corps. Finies, les lianes fili­formes des années 90 et 2000, au pla­card Kate Moss ! Place aux ron­deurs de Kim K. et ses sœurs, place aux « vraies femmes » avec des formes. 

Sablier Kim

Mais tout ça n'était qu'un leurre. Le dik­tat de la min­ceur est rem­pla­cé par un autre : celui de la sil­houette sablier (des ron­deurs, oui, mais bien pla­cées et sans cel­lu­lite s'il vous plaît) et de nom­breuses femmes à tra­vers le monde se mettent au Brazilian Butt Lift (BBL) comme leur influen­ceuse. La tech­nique « une pierre deux coups » consiste à pré­le­ver la graisse des hanches ou des cuisses pour la réim­plan­ter dans les fesses. Lorsqu'elles n'ont pas les moyens pour un BBL, elles prêtent leurs corps à des pra­tiques dan­ge­reuses, jusqu'à des injec­tions de béton (!) réa­li­sées par de faux·sses chirurgien·nes mais vrai·es escrocs. En fait, Sablier Kim n'a en rien décom­plexé les femmes vis-​à-​vis de leurs corps, car tout ça doit res­ter ferme et frais : elle n'a fait que renou­ve­ler les stan­dards et les exigences.

En 2022, le power couple for­mé par Kim K. et Kanye West a volé en éclat, cela fait quinze ans que la femme de 42 ans a per­cé et le spec­tacle doit se renou­ve­ler. Alors, pour le grand raout du Met gala orga­ni­sé lun­di 2 mai, la mil­lion­naire décide de s'offrir, le temps de quelques ins­tants sur le tapis rouge, le vête­ment ultime : rien moins que la naked dress signée Jean-​Louis Berthault et por­tée en 1962 par Marilyn Monroe lorsqu'elle s'échappera d'un gâteau d'anniversaire pour enton­ner « hap­py bir­th­day Mister President » à un John Fitzgerald Kennedy conquis. 

Pour épou­ser le fan­tasme de l'habit, tous les moyens sont bons

Mais revê­tir cette robe four­reau toute en trans­pa­rence et perles de cris­tal faite sur mesure pour Marilyn Monroe et dor­mant dans un musée de Floride a un prix : il faut que Kim K. mai­grisse, et de toute urgence. En trois semaines, elle perd sept kilos grâce à des vête­ments de suda­tion et un régime dra­co­nien. Et s'en vante, dégui­sée en néo-​Marilyn grâce à la robe et à un nou­veau blond per­oxy­dé, sur le tapis rouge du Met gala. La ques­tion en sus­pens reste de savoir si Kim K. a été jusqu'à faire réduire son BBL au scal­pel, ce qui serait d'une belle iro­nie, pour elle comme pour celles qui l'ont sui­vie dans l'aventure chirurgicale.

Car, au final, quel est le mes­sage envoyé ? Que pour épou­ser le fan­tasme de l'habit, tous les moyens sont bons. Que, à 42 ans et après quatre mater­ni­tés, la volon­té qui exerce la vio­lence d'un régime cara­bi­né sur la chair est plus forte que les effets du temps, encore. Que le corps est un outil plas­tique à dis­po­si­tion, trans­for­mable à l'envi, toujours.

Kim Kardashian est-​elle réelle ou n'est-elle qu'une expé­rience per­for­ma­tive ? Le réel, c'est le pal­pable, c'est donc le corps. Mais chez Kim K., le corps est par essence irréel. En le contrai­gnant à entrer dans le moule d'une autre star, la vedette qui a fait de sa vie son œuvre et son gagne-​pain semble nous rap­pe­ler qu'elle aus­si est consti­tuée de chair et d'os. À moins que ce soit la per­for­meuse qui nous prouve, plus que jamais, qu'elle n'a d'existence que dans les yeux de celles et ceux qui la fan­tasment… Et dans les lignes des articles de médias qu'elle suscite.

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