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Iris Brey (à gauche) et Victoire Tuaillon (à droite) le 30 juin à Paris © A.C.

Entretien avec Iris Brey et Victoire Tuaillon, lau­réates du prix de l’essai fémi­niste Causette !

Iris Brey, autrice du Regard féminin, une révolution à l’écran, et Victoire Tuaillon, autrice des Couilles sur la table, viennent de remporter le prix du jury et le prix du public du premier Prix de l’essai féministe Causette. Entretien commun.

Et voici les deux lauréates de la première édition du Prix de l’essai féministe Causette. Cela n’a pas été facile : de l’avis de toutes et tous parmi les membres du jury, les huit ouvrages sélectionnés étaient de grande qualité. Il a fallu pas moins de trois tours de vote pour les départager, mais les résultats sont tombés : le prix du jury a été décerné à Iris Brey pour Le Regard féminin, une révolution à l’écran, tandis que nos lectrices élisaient Les Couilles sur la table, de Victoire Tuaillon, pour le prix du public. 

La première est docteure en études cinématographiques et en littérature et enseignante aux États-Unis, journaliste pour, entre autres, Les Inrockuptibles et également réalisatrice de documentaires. Avec Le Regard féminin, publié en février aux éditions de L’Olivier, elle propose une définition du female gaze, ce fameux regard féminin dont les médias et le milieu féministe parlent tant ces derniers mois. Un essai crucial, alors que le male gaze a, lui, été défini dès 1975 par la chercheuse Laura Mulvey comme étant le plaisir visuel ressenti par le spectateur (ou la spectatrice !) face aux images de femmes, grâce au prisme du regard du héros masculin. Loin d’être, selon Iris Brey, le simple miroir du male gaze, le female gaze est plus complexe à identifier : il ne suffit pas de regarder un film de réalisatrice pour en faire l’expérience, ni même de visionner un film dont la protagoniste est une femme. Non, le female gaze est une expérience vécue par les spectateurs lorsqu’ils ou elles peuvent éprouver le vécu et l’expérience d’une héroïne qui remet en question l’ordre patriarcal à l’écran. En puisant dans une filmographie choisie, Iris Brey nous permet d’appréhender ce concept jusqu’à nous « retourner le cerveau » comme l’a formulé la philosophe Camille Froidevaux-Metterie, membre de notre jury, lors des délibérations. Pour l’autrice, le film de Paul Verhoeven, Elle, qui porte un regard dérangeant sur le viol puisque l’héroïne va choisir d’avoir de nouveaux rapports avec son violeur, est une œuvre de female gaze. La mise en scène nous pousse en effet à vivre le ressenti de Michèle après son viol et sa décision de fréquenter son violeur la rend maîtresse de son destin et la replace donc en sujet pensant et agissant plutôt que subissant. « C’est une claque. Un livre très actuel qui raconte l’époque et propose une révolution féministe via le cinéma », a souligné Lauren Bastide, journaliste et membre du jury, durant les délibérations.

La deuxième lauréate, Victoire Tuaillon, a décroché l’intérêt et l’estime de nos lectrices et lecteurs, invité·es à voter pour le prix du public, avec son ouvrage Les Couilles sur la table, du même nom que le podcast qu’elle anime depuis trois ans au sein du studio Binge. Publié à l’automne dernier par la maison d’édition Binge, créée spécialement pour l’occasion, Les Couilles sur la table a remporté le même succès que le podcast : les rencontres en librairie avec l’autrice pleine à craquer, et l’engouement sur les réseaux sociaux en témoignent. Preuve, s’il en est, que le travail auquel s’attèle Victoire – vulgariser grâce à de longs entretiens les connaissances universitaires sur la masculinité afin de comprendre et déconstruire l’ordre patriarcal et les injonctions viriles faites aux hommes – était attendu et passionne. En choisissant un chapitrage thématique, Victoire Tuaillon évite l’écueil d’une simple synthèse des entretiens de son podcast et nous apporte de nouvelles pistes de réflexion sur son sujet de prédilection.

Iris et Victoire se connaissaient : en février dernier, la chercheuse cinéphile était l’invitée de deux épisodes du podcast de la journaliste, juste avant les Césars et la claque qu’a été la remise du prix de la meilleure réalisation à Roman Polanski pour J’accuse, malgré les accusations de viol le concernant et la présence en compétition de l’excellent Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma. Mais Iris comme Victoire font partie de celles qui voient dans cet hommage les derniers sursauts d’un monde de vieux hommes blancs voués à disparaître. Nous les avons réunies pour un entretien.

Causette : Félicitations à vous deux pour vos prix ! Vous vous êtes donc rencontrées pour la première fois pour les deux épisodes des Couilles sur la table consacrés au male gaze. Victoire, quand vous avez tweeté votre épisode, vous avez tenu à faire acte de sororité en précisant : « N’en déplaise aux vieux patriarches blancs critiques du cinéma, les idées développées par Iris sont étayées et passionnantes. » Pourquoi une telle interpellation à la vieille garde du cinéma français ?

Victoire Tuaillon : Quand Iris a publié son bouquin, j’ai tout de suite compris qu’il n’allait pas plaire à tout le monde dans le milieu du cinéma. Les retours étaient assez virulents, notamment avec cet article de la revue Transfuge qui avait convoqué une psychanalyste pour qu’elle détruise les thèses d’Iris qu’elle n’avait manifestement pas lues. 
J’ai trouvé ça assez ridicule et me suis dit qu’ils devaient se sentir assez menacés pour attaquer son essai de la sorte. J’observe que c’est comme ça dans tous les arts lorsqu’on prétend les déconstruire, les voir autrement, les replacer dans un contexte institutionnel pour savoir qui produit quoi et d’où vient l’argent : les critiques en place – ceux qui ont droit d’user de leur esprit critique pour commenter une œuvre – ne veulent pas du tout que l’ordre soit remis en question. Mais je crois, Iris, que tu t’étais préparée à ce que cela se passe ainsi.

Iris Brey : Je ne pensais pas que la critique traditionnelle allait être unanimement contre le livre, ça reste toujours assez étonnant. Mais ça raconte quelque chose, quand on hait un objet d’une telle force. Je pense que ça parle d’eux plus que de moi : de leurs peurs. À partir du moment où on valorise le féminin, beaucoup de personnes se sentent attaquées par l’entreprise. 
Ce sont majoritairement des hommes d’un certain âge et dans une profession en perdition : la critique, aujourd’hui, plus grand monde ne la lit, il y a un véritable besoin de renouveau. Mon livre, c’était juste une autre manière de parler de cinéma et je ne vois pas comment cet ajout peut enlever leur voix. J’ai l’impression qu’ils ont eu peur que je pique leur place, mais je n’ai aucune envie de la prendre [Iris collabore elle-même au magazine Les Inrockuptibles, ndlr]. J’ai apprécié la réponse à ces critiques d’Emily Barnett dans Les Inrocks, j’apprécie en fait qu’un débat collectif se soit créé autour. Avec ce livre, j’ai essayé de mettre des mots autour d’un terme, maintenant il faut qu’il évolue, grandisse et qu’il m’échappe, et c’est très bien.

Le livre n’est pas encore traduit en anglais, mais est une sorte de réponse au concept de male gaze développé par l’Américaine Laura Mulvey en 1975. Pensez-vous qu’il sera reçu de la sorte aux États-Unis, s’il est traduit ?

Iris Brey : Je ne sais pas s’il sera officiellement traduit, mais ce qui est très chouette, c’est qu’il fait déjà l’objet de traductions sauvages : certains passages sont traduits et diffusés par des jeunes personnes féministes sur Twitter. 
Je suis contente qu’il devienne un texte pirate, car c’est de cette manière que j’ai moi-même découvert le texte de Laura Mulvey, lorsque j’étais étudiante. Son propos sur le male gaze avait, à la base, été publié dans la revue Screen, en 1975, et toutes les bibliothèques des facs ne possédaient pas ses archives. Nous nous refilions donc un vieux polycopié de son article, c’était donc un objet qui avait quelque chose de subversif. 
En tout cas, si mon livre est publié aux États-Unis, je pense qu’il aura une meilleure réception qu’en France. Je suis en train d’en préparer une adaptation pour un documentaire et je suis en contact avec le milieu du cinéma américain pour le réaliser. Je vois bien que pour eux, la définition que je donne du female gaze, un regard qui permet de partager une expérience d’un personnage féminin, leur paraît couler de source.

De votre côté Victoire, quelle réception ?

Victoire : Je n’ai jamais eu à faire face à de telles critiques. Il est vrai que mon travail peut déstabiliser, c’est d’ailleurs le but, puisqu’il s’agit de remettre en cause la domination masculine. Mais pour l’heure, je suis passée au travers des critiques masculinistes.

Iris : Par contre, ce qui est intéressant, c’est que toi aussi tu as fait un boulot pirate : cette publication redonne de la place au pouvoir de l’autrice puisque vous avez fait le choix, chez Binge, de créer une maison d’édition ad hoc.

Victoire : C’est vrai, j’avais oublié cette dimension, merci Iris ! Nous avons dit non à plein de maisons d’édition, qui en retour nous ont répondu « vous ne saurez pas faire sans nous. » Mais nous avons travaillé avec une éditrice indépendante, Karine Lanini, qui comprenait mon travail, contrairement à d’autres. Elle a fait un incroyable boulot de bout en bout, de la maquette au choix du papier en passant par l’aide à la rédaction.

Vous avez toutes deux en commun d’interroger des pans très peu défrichés des luttes féministes : le poids du regard masculin au cinéma et la déconstruction de l’idéal masculin. Comment vous sont venues ces marottes ? 

Iris : Pour ma part, j’ai commencé à observer qu’en regardant certains films, il se passait quelque chose pour moi de physique, de corporel, que je n’arrivais pas à nommer. En parallèle, on commençait beaucoup à utiliser le terme de female gaze comme un équivalent de « films de femmes », et je ne trouvais pas ça satisfaisant. 
Je me suis rendu compte que j’avais le même ressenti physique d’intériorisation du vécu de l’héroïne en regardant certains films réalisés par des hommes et j’ai donc essayé de défricher tout ça, en me plongeant dans le visionnage de nombreux films pour tenter de définir et théoriser mon expérience. 
J’ai lu les livres de la philosophe Camille Froidevaux-Metterie [membre du jury du prix Causette, ndlr], qui s’appuie sur la phénoménologie [courant philosophique qui s’attache à l’expérience vécue] et, dans son sillage, j’ai lu Merleau-Ponty, le philosophe qui a conceptualisé cette vision des choses. Ça a été un déclic : je me suis détachée du champ psychanalytique, qui était celui de Laura Mulvey, mais dans lequel je n’arrivais pas à trouver de réponse théorique au male gaze. La phénoménologie m’a permis de comprendre que je voulais parler d’expérience incarnée au cinéma.
Durant le confinement, j’ai envoyé mon essai à Laura Mulvey… J’ai hâte d’avoir son retour !

Victoire : Quant à moi, la domination masculine et la masculinité sont déjà étudiées aux États-Unis, en Australie et en Angleterre depuis les années 1970, et en France depuis les années 1990. Ces études de genre, version masculinité, répondent exactement aux interrogations vitales que je me posais comme petite fille et jeune femme : pourquoi est-ce qu’on parle tout le temps des hommes, mais pas dans les violences faites aux femmes et un certain nombre d’autres problèmes sociaux. Là, ils disparaissent. On a l’impression qu’elles sont violées et battues par on ne sait qui, comme si on ne pouvait pas retourner le regard. Il y a pourtant, je crois, une nécessité de retourner le regard sur cette masculinité qui était perçue comme neutre, évidente, non problématique, alors qu’elle l’est, vraiment très fort. Je veux savoir pourquoi les hommes violents sont si violents, d’où ça vient cette idée qu’ils ne sont pas censés pleurer, pourquoi c’est aux femmes qu’on dit qu’il manque quelque chose, alors qu’on peut retourner la question tout le temps. Ce n’est pas qu’il n’y a pas assez de femmes aux postes de direction, c’est qu’il y a trop d’hommes. 
Je ne voulais surtout pas faire un podcast de témoignages : il y a des concepts, des chiffres, des statistiques qui nous sont indispensables pour penser le monde dans lequel nous vivons. L’Université produit de la pensée cruciale sur le sujet et ma place de journaliste, c’est de la faire circuler. 

À propos de cette domination masculine, Iris, vous écrivez dans votre essai que la « puissance sismique du female gaze pourrait faire tomber le patriarcat ». Quid du retour de bâton, dont vous avez pu voir la couleur à la sortie de votre livre, et comment le contrer ?

Iris : Je pense qu’on arrive déjà à contrer ces résistances conservatrices grâce aux réseaux sociaux. C’est un espace démocratique qui rebat les cartes de la critique, jusque-là chasse gardée d’une certaine élite. Les réseaux sociaux sont une ouverture sur d’autres voix, d’autres plumes. 
C’est extrêmement étonnant pour moi, mais je reçois tous les jours des messages, de jeunes personnes, mais aussi beaucoup de personnes beaucoup plus âgées, par exemple de femmes qui enseignaient le cinéma et qui me font part d’un impact sur leur vie. Ces personnes et les étudiants qui ne se retrouvent plus dans ce qui est enseigné à l’Université font partie d’un mouvement de contre-culture très à l’œuvre dans notre société et qui va prendre le dessus. La vieille garde est amenée à disparaître, car la nouvelle génération n’est pas à la recherche de pères, mais de pairs. 

Vous avez toutes deux la trentaine. Avez-vous l’impression de faire partie d’un cercle générationnel de féministes ?

Victoire : Clairement ! on n’en était pas là, il y a dix ans. Dans la sphère culturelle, les idées féministes n’étaient pas valorisées et je pense que ça a commencé à changer il y a cinq ou six ans. Ça ne veut pas dire qu’elles n’existaient pas, les militantes et chercheuses n’ont jamais lâché l’affaire, mais leurs propos n’étaient pas du tout aussi médiatisés. 
On n’y est pas encore, mais quand même, il y a du mieux. Je crois qu’on s’est toutes rendu compte au même moment qu’on était nombreuses à être enthousiasmées et admiratives des travaux des unes et des autres, et ce dans une perspective horizontale, sans déférence. Enthousiastes de se lire les unes les autres, de s’écouter, de se rencontrer, de savoir partager des expériences très personnelles, mais dont on s’apercevait qu’elles résonnaient en nous avec nos propres expériences. J’ai l’impression d’y participer en ayant choisi ce rôle de journaliste, que j’envisage un peu comme une médiatrice.

Iris : Je pense que c’est grâce à l’arrivée de nouveaux médias qu’on a vu de nouvelles voix émerger. Le podcast a été hyper important pour la diffusion d’une pensée féministe, mais aussi les blogs, Instagram, les chaînes YouTube, Twitter. C’est grâce aussi à ça qu’on s’est toutes rencontrées et qu’il y a un écho entre nos discours.

Vous abordez toutes deux à un moment donné dans vos livres la question raciale, soit pour dire d’où vous parlez comme Victoire, soit pour évoquer la « double peine » que peut être, pour une femme noire, d’être écrasée par les représentations de cinéastes hommes et blancs à l’écran. Vous inscrivez-vous toutes deux dans une perspective intersectionnelle ?

Victoire : Ah oui ! définitivement, c’est ce qui m’intéresse.

Iris : C’est une grosse question. Évidemment, et surtout il faut porter plus de voix de femmes noires. À ce titre, les figures d’Amandine Gay ou d’Aïssa Maïga incarnent quelque chose de nouveau dans une génération d’activistes, de cinéastes, de féministes. Elles portent des idées assez anciennes, mais leur incarnation est extrêmement importante.

Quel regard portez-vous sur l’actuel écho français du mouvement américain Black Lives Matter ? Comment le féminisme doit-il s’inscrire dedans ?

Iris : Il était temps. Je me souviens d’un entretien que j’avais fait avec Aïssa Maïga et Assa Traoré en avril 2019 dans Les Inrocks, où il était beaucoup question de représentation des femmes noires. Je vois qu’en un an, les choses ont changé : c’est devenu un débat national, alors qu’à l’époque, c’était pour des personnes conscientisées.

Victoire : Moi, je suis frappée par la cécité, la surdité voire la bêtise aussi des discours politiques sur ces questions, de la part de personnes qui sont élues, y compris du président de la République. Ces personnes ne sont pas du tout dans l’ignorance, mais on voit très bien les rapports de force qui sont à l’œuvre dans le refus de combattre le privilège blanc, dans le refus de reconnaître sur qui s’exercent les violences policières. Comme féministe, je pense qu’on ne peut jamais faire l’impasse sur les questions de races et de classes, et je pense qu’il ne faut pas être aveugle non plus à comment celles-ci peuvent s’opposer. Là, par exemple, je m’intéresse au féminisme abolitionniste carcéral, qui explique que la punition des auteurs de violences à l’encontre des femmes n’est pas une solution. 

Iris : Victoire vient d’utiliser le terme de privilège blanc et c’est quand même Virginie Despentes qui l’a remis dans l’espace public, à l’occasion d’une carte blanche sur France Inter. Tout le monde s’en est emparé (on voit par exemple des vidéos pédagogiques sur YouTube « qu’est-ce que le privilège blanc ? »), mais il n’est pas inventé, il vient de quelque part – de l’Université. Cela montre qu’on a besoin de concepts et de mots pour faire avancer les choses. C’est intéressant que ce soit une féministe qui l’ait inséré dans le débat public. On a besoin de figures fortes qui puissent articuler ces notions-là, qui sont difficilement audibles en France. Ici, on préfère le color blind [l’aveuglement aux couleurs par stratégie universaliste, ndlr], comme s’il n’y avait pas de différences entre nous, mais notre culture est façonnée par des stéréotypes racistes inconscients, donc à un moment il faut aussi en parler. Aux États-Unis, personne ne va être offusqué par le terme, qui porte ces idées. Nous sommes en retard et avons besoin d’un gros coup d’accélérateur sur la question.

Si vous deviez retenir un élément des travaux de l’une et de l’autre, qu’est-ce que ce serait ?

Iris : L’un des podcasts qui m’a le plus marqué, c’est celui avec Carol Gilligan [Ce que le patriarcat fait à l’amour, ndlr] et que j’ai écouté à plusieurs moments de ma vie : il m’apporte toujours quelque chose de différent.

Victoire : Moi, c’est sûr que je ne regarde plus les films et les séries de la même façon. Tout ce que tu dis, Iris, sur l’importance d’écouter son corps quand on regarde, comment tu te sens face à certaines scènes. Est-ce que tu vis avec ou est-ce que tu contemples, et que les images sont en train de t’écraser, ou est-ce qu’elles te prennent avec elles et te donnent une place ? Je suis moins cinéphile que lectrice de romans et je me suis mise à l’appliquer aussi en lisant des romans, car je me suis dit que c’était la même chose. 

Quels sont vos projets pour la suite ?

Iris : Le documentaire adapté de mon livre paraîtra dans longtemps, mais il est en préparation. Je suis très heureuse, car il est produit par Totem, au sein duquel travaille Bérénice Vincent, qui a créé l’association Le Deuxième Regard, devenue par la suite le Collectif 50/50. Ça fait plus de dix ans qu’on est en conversation toutes les deux sur la représentation des femmes au cinéma, donc c’est très réjouissant pour moi de voir comment une amitié se développe et nous propulse vers des chemins nouveaux. 
Je prépare aussi un autre documentaire sur les coordinatrices d’intimité, ce nouveau métier au cinéma américain dont la mission est de s’assurer que les scènes de sexe sont filmées avec le consentement intégral des acteurs. 
Il y a une vraie résistance à bénéficier de leurs services en France, car le réflexe du milieu est de crier à la censure artistique, probablement parce que s’assurer du consentement des actrices et des acteurs, c’est leur donner plus de pouvoir. 

Victoire : De mon côté, je continue avec la saison 4 des Couilles sur la table, c’est un sujet inépuisable ! J’ai un autre projet secret, mais je ne peux rien dire.

Un conseil culture pour nos lectrices cet été ?

Iris : La série Normal People, qui va sortir en France, sur la naissance d’une histoire d’amour. Je ne sais pas si c’est vraiment du female gaze, mais en tout cas, ils ont fait appel à une coordinatrice d’intimité. Ça parle de ressentis dans l’intimité sexuelle, et je trouve ça encore tellement rare, surtout pour un personnage masculin ! C’est un personnage masculin qui est troublé face à son désir, qui ressent tout le temps et est beaucoup moins dans la parole ou le regard, et c’est quelque chose d’assez nouveau dans la mise en scène. Et la série I May Detroy You, sur OCS.

Victoire : Moi, toujours le même : lire des romans écrits par des femmes. Là, j’ai une passion pour Emmanuelle Bayamack-Tam et son double Rebecca Lighieri. Le racisme est un problème de Blancs, de Reni Eddo-Lodge et La Deuxième Femme, de Louise Mey, particulièrement female gaze, il me semble !
Ah, et de lire toute la sélection du prix Causette ! C’était vraiment une belle sélection et j’étais super fière d’en être.

Iris : Tout pareil. Et se dire qu’il y a une telle production d’écrits féministes, ça fait du bien.

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