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Sasha

« Petite fille » : l’émouvant docu­men­taire d’Arte sur une enfant transgenre

C’est ce soir qu’Arte diffuse à la télévision Petite fille, documentaire très attendu et déjà très commenté puisqu’il est disponible sur le site de la chaîne depuis le 25 novembre. L’histoire de Sacha, petite fille née dans un corps de garçon. Mais peut-être surtout le portrait d’une mère prête à tout pour protéger son enfant.

2020 est résolument l’année Lifshitz. Après Adolescentes, sorti tout début septembre, entre deux confinements, et dans lequel il suivait deux copines de leurs 13 ans à leur majorité, - dressant là un portrait aiguisé de cet âge où tout s’invente-, le réalisateur échappe à nouveau à la crise actuelle en sortant Petite fille à la télévision. Un an dans la vie d’une petite fille transgenre. Entre moments de grâce et déchirements.

La méthode de Sébastien Lifshitz est toujours la même. La caméra à fleur de peau, au plus près des visages et des émotions. Au plus près des personnages. Sans commentaires. Sans jugement. La vie en train de se faire, devant l’objectif. Cette fois, les personnages de l’histoire, ce sont Sacha, petite fille transgenre qui, dès ses 3 ans disait à sa maman « Quand je serai grand je serai une fille », et puis sa mère Karine. Une sorte de monstre d’amour prête à tout pour faire accepter son enfant et surtout lui éviter la souffrance que sa dysphorie de genre engendre. Il y a des frères, des sœurs, et un père. Mais c’est peu dire qu’ils passent au second plan tant ce binôme entre la petite fille et sa mère est lié par un même combat. Une même souffrance, sans doute.  « Je le sais que ce sera le combat de ma vie », dit Karine à la fin du documentaire.

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Sasha et sa mère

Alors que Sacha n’a pas 7 ans, c’est déjà la lutte. Et c’est ce chemin semé d’embûches que filme le réalisateur. Se faire accepter au cours de danse. Faire comprendre au directeur de l’école que Sacha a le droit de venir habillée avec les vêtements qui lui plaisent, plutôt des robes et des ballerines en l’occurrence. Mais surtout qu’on la nomme au féminin. Pas une mince affaire. Karine ne désarme jamais, malgré les fortes résistances d’une société pas encore prête visiblement à accueillir des enfants sortant de la norme. Elle tente la pédagogie, la colère, la menace. Elle ne pense qu’à ça. Au risque de l’obsession. Au risque peut-être aussi d’étouffer un peu son enfant avec son amour et son inquiétude. Au risque même de délaisser un peu les autres. Elle s’en rend bien compte.

Mais il faut dire qu’elle est seule, très seule. Car dans l’Aisne, où vit cette mère de cinq enfants, personne ne peut l’aider ni la renseigner. Le médecin de famille l’admet lui-même, il n’est pas compétent sur ce domaine-là. Alors le réalisateur suit notre duo à Paris. Direction l’Hôpital Robert Debré où une pédopsychiatre spécialiste de la dysphorie de genre les écoute, les entend, les rassure. Karine pose les questions qui la taraudent depuis toujours. Est-ce parce qu’elle voulait tellement une fille pendant sa grossesse que Sacha se sent comme ça ? D’ailleurs Sacha est le seul de [s]es enfants à porter un prénom non genré, constate-t-elle. Et puis : A-t-elle bien fait de laisser Sacha s’habiller avec des habits « de fille » ? Ne l’a-t-elle pas encouragée dans cette voie en faisant ce choix, comme on le lui reproche d’ailleurs à l’école de son enfant.

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Sasha avec sa mère chez le pédopsychiatre

Toutes ces questions qu’elle se pose, traversent aussi, à un moment ou un autre, d’une façon ou d’une autre, le ou la téléspectatrice. Et quand la spécialiste répond à cette mère, rongée par la culpabilité, c’est aussi à nous qu’elle s’adresse. Qu’elle explique que cela n’a rien à voir. Et qu’à ce stade de la recherche, on ne sait pas ce qui provoque la dysphorie de genre.  En cela, ce documentaire diffusé sur Arte à une heure de grande écoute fait œuvre de pédagogie. Et permettra sans doute au plus grand nombre, pas forcément familiarisé avec la question de la transidentité, de se défaire d’idées préconçues voire fausses.

En prime, et c’est ce qui fait toute la différence, Sébastien Lifshitz filme magnifiquement. Sacha en train de jouer seule dans sa chambre. De s’habiller devant la glace en essayant des chapeaux. De jouer au foot avec des petites chaussures à talons paillettes. De faire une bataille de boules de neige avec ses frères et sœurs. De courir sur la plage avec son petit maillot deux pièces. De danser avec un parapluie façon Demoiselles de Rochefort. Et toutes ces scènes sont comme des tableaux.

Petite Fille, de Sébastien Lifshitz, sur Arte le 2 décembre à 20h50 et en replay sur arte.tv

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