A l'occasion de la sortie de Wish : Asha et la bonne étoile, le dernier Disney (en salles), l'universitaire Célia Sauvage, autrice de Décoder Disney-Pixar (éditions Daronnes), revient sur les questions de genre, de classe et de race déployées par le géant de l'animation.
Causette : Le nouveau Disney, Wish : Asha et la bonne étoile raconte l'histoire d'une jeune fille de 17 ans en lutte contre un roi maléfique et aidée par une petite étoile. Est-ce un film féministe ? Quel est l'arc narratif de son héroïne ?
Célia Sauvage : Le personnage d'Asha s'inscrit parfaitement dans la lignée nouvelle génération des héroïnes célibataires et totalement désintéressées par les hommes et l'amour. Comme Elsa, la reine des neiges ou encore Vaiana, la romance n'est jamais un arc narratif envisagé. Au sein de l'imaginaire Disney-Pixar, elle appartient donc aux rares héroïnes débarrassées de l'hétérosexualité, ce qui est super pour l'identification du plus grand nombre. Le film oriente davantage vers la force de l'amitié comme moteur d'émancipation, à l'image de ce que proposaient des films comme La Reine des neiges, Les Mondes de Ralph, Luca, ou encore Alerte rouge. Sans spoiler, le film démontre également que seule la solidarité, l'action collective permettra de renverser le système injuste en place, ce qui est un message fort contre l'individualisme à l'américaine.
Wish est un film de rébellion, celle de la jeune génération contre toutes les normes standardisées à Hollywood. Comme toujours chez les personnages qui détiennent le pouvoir dans l'imaginaire Disney-Pixar, le personnage du roi Magnifico est associé à la couleur blanche (ses cheveux, ses vêtements, les portraits de lui) alors que l'ethnicité du personnage est floue. Mais contrairement aux classiques, la domination blanche est désignée comme dangereuse : Magnifico se croit tout permis, y compris décider qui a le privilège de réaliser son vœux le plus cher. C'est contre cette toute puissance blanche qu'Asha et ses ami·es résistent pour rendre à chacun·e une forme d'autonomie. Autre changement sûrement invisible pour la majorité du public, mais pour une fois, l'ennemi désigné est aussi hétéronormé : Magnifico n'est pas codé comme un méchant queer, il est hétéro, en couple et adore narcissiquement sa propre[…]