Après sa prestation bluffante dans la série En thérapie, Céleste Brunnquell émeut et épate dans le rôle-titre de Fifi, premier film subtil signé Jeanne Aslan et Paul Saintillan. Rencontre avec une jeune actrice de 20 ans… gentiment surdouée.
Causette : Qu’est-ce qui vous a séduite dans l’histoire de Fifi, une lycéenne des quartiers pauvres qui, le temps d’un été, noue une amitié inattendue avec Stéphane, un étudiant plus âgé et plus aisé socialement ?
Céleste Brunnquell : C’est le scénario, sa justesse, sa précision, et bien sûr ce qui se passe entre les deux protagonistes. Lui, Stéphane [interprété par Quentin Dolmaire, ndlr], a 23 ans et est à un moment de sa vie où il est un peu perdu. Elle, Fifi, a 15 ans et s’adapte aux situations en permanence. Je ne veux pas dire par là qu’elle est intéressée, ni même opportuniste, mais on ne sait pas trop vers qui ni vers quoi elle veut tendre. Donc leur rencontre, un pur hasard, elle la voit comme une ouverture sur l’horizon. Rien de plus. C’est drôle parce que, pour Quentin, il s’agit d’une histoire d’amour, alors que pour moi, non. Intéressant [rires] ! D’ailleurs, je ne pense même pas que leur amitié va durer. À la fin de l’été, chacun va reprendre son chemin, mais transformé.
Fifi est à un âge charnière, ce que raconte subtilement le film. À la fois proche et déjà éloigné du vôtre, puisque vous venez d’entrer dans la vingtaine…
C. B. : Le film a été tourné il y a deux ans, j’en avais donc 18 à ce moment-là, mais on m’a toujours assuré que je faisais plus jeune que mon âge [rires] ! Plus sérieusement, il y a quelque chose de dur dans l’adolescence, je trouve. Je ne sais pas comment exprimer cela… Les gens sont durs, acérés ! Cela dit, même si je commence à entrer dans la post-adolescence, ça me semble tout aussi compliqué.
De fait, les protagonistes de Fifi sont l’un et l’autre flottants. Est-ce à dire qu’avec eux, Jeanne Aslan et Paul Saintillan ont voulu parler d’une génération… désorientée ?
C. B. : Je suis trop près de ma génération pour m’en rendre compte, et puis je ne veux pas parler en son nom. Mais quand même, c’est extrêmement violent ce qui déboule actuellement. La crise politique – je suis allée à beaucoup d’occupations d’étudiants –, l’urgence climatique, la violence dans la rue… Je suis à un âge où normalement tu te dis que tout est possible, or là, il est très difficile de se projeter. C’est un curieux mélange, ce sentiment d’impuissance combiné à l’énergie de la jeunesse.
En parlant d’énergie, tout est allé très vite pour vous. Vous êtes remarquée dès votre premier film, Les Éblouis, en 2019, puis vous cartonnez dans la série En thérapie sur Arte, en 2021. Pas mal pour quelqu’un qui a du mal à se projeter !
C. B. : C’est grâce à Elsa Pharaon, la directrice de casting qui m’a repérée dans mon cours de théâtre quand j’avais 15 ans. Une personne formidable. Parce qu’au départ je ne cherchais pas à déclencher tout ça. Je voulais finir ma scolarité tranquillement, aller à la fac et aussi dans une école de théâtre pour me retrouver dans un groupe… Et voilà qu’aujourd’hui on m’interpelle dans la rue à cause de mon rôle dans En thérapie ! Bon, les gens sont assez émus, ils me racontent leur vie, ça déclenche des choses hyper chouettes, mais quand même, ça fait bizarre…
Fifi, de Jeanne Aslan et Paul Saintillan. En salles.