99 la jeunesse guidant le peuple climat 13 ©DR
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Interview, 17 ans après, de Severn Cullis-​Suzuki, la pre­mière des mini­mi­li­tantes écolo

Elle avait 12 ans lorsqu’elle a pris la parole face aux puissant·es de ce monde. C’était en 1992, à Rio de Janeiro (Brésil), premier Sommet de la Terre à se soucier du développement durable. Toujours écolo, toujours militante, la Canadienne Severn Cullis-Suzuki revient aujourd’hui sur ce discours qui a marqué les mémoires.

Causette : Quel était votre état d’esprit au moment de monter sur scène, à Rio de Janeiro ?
Severn Cullis-Suzuki :
Je me sentais calme et claire, sachant exactement ce qui allait se passer. Nous avions beaucoup travaillé en prévision de ce moment. Durant mon discours, je parlais directement aux représentants du monde. J’étais fâchée. J’étais émue. Juste après, j’étais heureuse que cela se soit produit, mais je me souviens aussi de ma détermination et de ma colère, car je croyais profondément aux paroles que j’avais prononcées.

Qu’est-ce qu’il s’est passé pour vous, après ?
S. C.-S. :
À l’automne, je suis entrée au lycée. Et j’ai commencé à être invitée partout dans le monde. Un nouveau chapitre de ma vie s’est ouvert : j’allais à l’école et je voyageais plusieurs fois par an pour prononcer des discours. Des gens nous contactaient aussi pour avoir la vidéo de mon intervention à Rio, donc nous avons commencé à envoyer des copies dans le monde entier. Puis Internet s’est développé et quelqu’un a téléchargé le discours. D’autres ont ajouté des sous-titres. Ce discours n’a jamais cessé de renaître. Aujourd’hui encore, les gens le regardent. Je crois que cela en dit long sur le pouvoir de la voix des jeunes, sur la façon dont ils peuvent influencer les adultes.

Concrètement, quel impact votre discours a-t-il eu ?
S. C.-S. :
Notre situation écologique est plus grave que jamais, les prévisions des scientifiques de 1992 se concrétisent et nous n’avons changé ni nos principaux systèmes énergétiques ni les économies capitalistes. Mais les voix de la jeunesse sont beaucoup plus fortes aujourd’hui. Et j’aime croire que le discours de Rio a fait partie de ce mouvement. Beaucoup d’enfants m’ont dit que cela les avait incités à lancer eux-mêmes des actions. Ce discours a eu un effet réel sur d’autres jeunes, plus qu’il n’en a eu sur les délégués mondiaux ce jour-là.

Cet épisode a-t-il changé votre façon d’agir pour l’environnement ?
S. C.-S. :
Après Rio, j’ai prononcé de nombreux discours, à des niveaux importants. Mais au fil des ans, j’ai perdu mes illusions sur ces grandes conférences et j’ai compris à quel niveau je devais agir. Actuellement, c’est à la base que je me trouve. Il est important de ne pas s’épuiser et, au niveau local, on peut vraiment voir les effets de ses propres actions. Avec d’autres, au Canada, nous avons ainsi réussi à stopper le projet d’oléoduc Northern Gateway d’Enbridge [destiné à transporter des énergies fossiles issues de sables bitumineux, ndlr] et nous ­luttons aujourd’hui contre l’agrandissement des oléoducs Trans Mountain de Kinder Morgan et Coastal GasLink de TransCanada.

Quel regard portez-vous sur Greta Thunberg ?
S. C.-S. :
Je suis une grande fan. Je sais ce qu’elle ressent. Je me souviens d’avoir été une enfant et d’avoir pleuré de colère contre les adultes qui ne faisaient pas ce qu’il fallait. Je suis très fière d’elle et des autres jeunes qui la rejoignent. Nous avons encore une chance d’éviter un changement climatique catastrophique. Nous devons réduire à zéro les émissions de carbone. Et créer une économie juste et inclusive, neutre en carbone. Cette fois-ci, rejoignons nos enfants et donnons vie à une véritable révolution !

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