La mort de Nahel, 17 ans, tué par un tir policier mardi 27 juin à Nanterre, a mis une nouvelle fois en lumière la place des « mères tampons » dans les quartiers populaires. En septembre 2020, à l'occasion de la sortie de l'essai de Fatima Ouassak, La Puissance des mères, nous avions enquêté auprès de ces mères qui s'imposent comme des actrices politiques incontournables.
On les a vues, toutes de jaune vêtues, coiffées de serre-tête tournesols, bras dessus, bras dessous, former un « mur des mères » en guise de bouclier contre la police à Portland (États-Unis), après la mort de George Floyd. On les a vues, en 2019, former une ZAD de Mamas dans le sud de l’Italie, pour s’opposer à la construction d’un gazoduc qui défigurerait les terres léguées à leurs enfants. On les a vues structurer la
lutte écolo en Argentine, au nom de leurs petit·es atteint·es de maladies inexpliquées dans les zones proches des usines de Monsanto. Et puis, on les a aussi vues en France, dans les assos féministes, militer pour l’allongement du congé paternité ou pour protéger leur quartier. Ces luttes éparses, on les a bien vues à droite, à gauche. Mais derrière elles se dessinent les contours d’un phénomène politique majeur. L’émergence d’un nouveau type d’actrices cruciales dans les débats sociaux, écologistes, médicaux et politiques. Les mères. Des mères vénères, auto-organisées et féministes.
S’il fallait immortaliser le tournant, graver dans le marbre le fait qu’il se passe bel et bien quelque chose, c’est, en plus, chose faite. Vient de paraître, le 27 août, La Puissance des mères (éd. La Découverte). Essai coup de poing de la militante antiraciste et féministe Fatima Ouassak, cofondatrice du syndicat Front de mères, à Bagnolet (Seine-Saint-Denis). Elle y appelle les daronnes de tous horizons à s’organiser politiquement pour lutter contre les discriminations que subissent les enfants des quartiers populaires. Racisme « structurel », souligne-t-elle, inégalités scolaires, mais aussi exclusion environnementale – le manque d’accès à la nature dans un paysage bitumé, l’absence d’alternatives bio dans les quartiers ou de repas végétariens à l’école.
Une offre “politique révolutionnaire”
L’actu et l’Histoire forcent au constat : beaucoup de mères montent au front pour les mêmes motifs. En particulier, les violences policières et le racisme. C’est le cas aux ÉtatsUnis. C’est le cas en France. Mais aussi en Italie, où le collectif Mamme in piazza s’indigne depuis que leurs enfants « font l’objet de mesures policières » pour avoir[…]