Chaque mois, on demande à quelqu’un·e pourquoi il ou elle se lève le matin. La réponse en dessins.
Sophie Gagnard a 36 ans. Historienne de formation, elle est aujourd’hui conférencière au Mémorial de la Shoah. Deux conférences par jour, tous les jours. Le Mémorial, au départ, c’était un job à temps partiel, le temps de finir sa thèse sur les Italiens en France pendant la Seconde Guerre mondiale. « Tous les jours, je cherche à comprendre. Comprendre pour rationaliser. Le sujet me laisse encore sidérée. Quand on entre ici, ça devient un engagement, une mission. Il y a de plus en plus de demandes, les enjeux de la Shoah ne se sont pas arrêtés en 1945. » C’était il y a six ans. Le job est devenu un emploi à plein temps, et la thèse attend toujours.
La visite commence devant le Mur des noms. Sur de la pierre de Jérusalem, les noms des 76 000 Juifs et Juives déporté·es de France sont gravés. Seul·es 4 000 ont survécu.

« Vous avez une idée du nombre de Juifs assassinés pendant la Seconde Guerre mondiale ?
– Des milliards ?
– Six millions. Il faudrait un lieu 80 fois plus grand pour écrire tous leurs noms. »

« On s’adapte à chaque public. C’est tous les jours une rencontre. Je dois m’adapter en fonction de l’âge, du niveau de la classe, de la demande du prof. Il faut savoir improviser. J’essaie d’ajuster mon discours à des repères qu’ils connaissent. Là, je reçois des élèves marseillais. Je vais leur parler du camp des Milles, à côté de Marseille. Je suis allée chercher des documents sur un déporté marseillais pour illustrer mon propos. »

« Quand les jeunes arrivent ici, certains ont des préjugés, ils ont entendu des théories du complot, qu’ils y croient ou non. C’est la méconnaissance du sujet qui fait le préjugé. Ils ne sont pas juifs, ils n’ont pas d’amis juifs. On explique, on questionne, on fait appel à leur intelligence. On les attrape[…]