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© Camille Besse

Des microa­ven­tures près de chez soi

Passer un week-end low cost à Barcelone, c’est complètement has been. Clairement, la pression du bilan carbone est là. Ça tombe bien ! Grâce à Chilowé, une communauté de microaventuriers créée sur Facebook, le voyage est au bout du TER. Testé et approuvé, courbatures comprises.

Gare de Lyon, 8 heures du matin, un dimanche. Onze personnes – huit femmes et trois hommes – qui ne se connaissent pas ont rendez-vous devant le Transilien direction Montargis. Baskets, pique-nique et sac à dos, nous voilà partis pour une journée de randonnée en région parisienne. Le programme comprend la visite du château de Fontainebleau (Seine-et-Marne) et 25 kilomètres de marche en forêt, avec une pause dans le village de Barbizon. Ce programme, c’est moi qui l’ai imaginé et proposé, quelques jours auparavant, dans le groupe Facebook Chilowé Paris. Je vis à Paris depuis neuf ans et, bizarrement, je n’avais jamais pensé à faire des randos de huit heures en forêt le dimanche. Pas l’idée, pas la motiv, pas forcément de bons plans. Et puis je suis tombée sur ce drôle de groupe. 

Je l’ai découvert au printemps, au détour d’un article sur les vacances écoresponsables. N’ayant aucune velléité de voyager en long-courrier cet été, et encore moins pour projet de ramollir devant Netflix, j’ai rejoint cette communauté où chacun·e adopte un pseudo d’animal. Me voilà donc Chamois Malin. En plus de mettre en contact des gens qui ne se connaissent pas, Chilowé aide ses membres à organiser des sorties communes à portée de pieds grâce à une newsletter, des idées de balades et un guide. 

Derrière cette idée simple, Toucan Loufoque et Castor Fougueux. Thibaut Labey et Ferdinand Martinet pour les non-initiés. « La microaventure, c’est un palliatif aux expéditions lointaines et chères, qu’on ne peut pas réaliser tous les jours. Mais nous n’avons rien inventé », concède Thibaut Labey. Le concept a été formulé par l’aventurier anglais Alastair Humphreys pour désigner des sorties dans la nature courtes, locales, peu coûteuses et rafraîchissantes. Comme le proclame leur manifeste : « On a beau avoir crapahuté un peu partout dans le monde, on n’a rien trouvé de mieux que la France pour vivre des expériences extraordinaires dans la nature. Ça prend moins de temps, ça coûte moins cher et ça fait moins mal à la planète. »

Tout le monde dehors

Avant d’être le rédacteur en chef de Chilowé, Thibaut Labey a été avocat, a vécu en Nouvelle-Zélande et a parcouru 20 000 kilomètres en tuk-tuk entre le Cambodge et la France. « Et puis je me suis retrouvé à Paris avec la grosse frustration d’être enfermé à l’intérieur du périphérique et de ne pas savoir où est la nature. » Dans un post Facebook, il liste alors les trois choses qui lui manquent pour sortir de chez lui : « Des idées, des infos pratiques et des gens avec qui partir. » Ferdinand Martinet répond et l’idée de la newsletter émerge. Un recensement des sorties commence auprès de la communauté qui grandit et un guide papier pour des escapades autour de Paris voit le jour en novembre 2018 après une campagne de crowdfunding. Son slogan : « Mettre tout le monde dehors ! » Au menu, des dizaines de balades au départ de Paris. Exemple : visiter les châteaux de la Loire, mais en canoë, ou voguer sur la Seine, mais en paddle. Visiblement, la microaventure séduit : la newsletter affiche 20 000 abonné·es, le guide 7 000 ventes et le groupe Facebook de Paris plus de 3 000 membres. Des communautés sont nées à Lyon, Bordeaux, Nantes, et le site du mouvement propose des microsorties partout en France. 

Des motivations diverses

J’ai donc, au cœur du mois d’août, trouvé dix camarades prêt·es à me suivre en forêt. Un ingénieur chez Airbus, une juriste au Louvre, une chimiste, un développeur Web, une étudiante, un start-upeur… Âge moyen : 30 ans. Assez vite, on parle de nos motivations. Pauline, arrivée à Paris depuis deux mois, se dit en manque de nature, elle qui adore le trail. Fleur ne peut pas randonner avec ses amies, pour la plupart enceintes ou jeunes mamans. Margaux voulait rencontrer de nouvelles personnes. Jeff confie sa fierté de s’être levé tôt un dimanche matin pour marcher. Aurélie et Marion sont les seules habituées de ces sorties : elles ont fait 50 kilomètres à vélo la veille et du kayak le mois précédent. La première, d’origine lilloise, a alourdi son sac à dos d’une bouteille de bière pour assurer l’apéro. La seconde pose la conclusion de ce dimanche : « Personne ne se serait bougé seul·e aujourd’hui. » 

À peine remise de mon expérience à Fontainebleau, je propose une autre sortie au groupe, inspirée des bons plans du guide : découvrir la Seine en stand-up paddle. Trois jours plus tard, je retrouve Alexis, passionné de ce sport et partant pour pagayer 13 kilomètres, dont la moitié à contre-courant avec vent de face. Sur la portion que nous parcourons dans les Yvelines, les berges sont boisées et dépourvues d’habitation. On croise des péniches qui font des vagues et des oiseaux qui font des ronds. Au retour, j’ai l’impression d’être partie très loin, alors que la gare du RER se rejoint en dix minutes à pied. Pendant ce temps-là, un certain Ragondin Frileux raconte dans le groupe comment il a rallié Paris à Meaux en stand-up paddle avec bivouac sur les bords de Marne. 

Thibaut Labey jubile : « Voilà, on veut un truc à une heure ou deux de Paris qui soit aussi sexy qu’une semaine de surf au Costa Rica. On veut réhabiliter la proximité : on a visité des dizaines de pays et on ne connaît pas l’Allier ! Il y a dix ans, le Graal c’était de faire le tour du monde, mais on est en train de sortir de ce fantasme. »

Moi, en l’espace de quinze jours, j’ai aussi parcouru à pied la première étape du chemin de Compostelle au départ de Paris en compagnie d’une enseignante. Roulé à vélo jusqu’à Bobigny via le canal de l’Ourcq. Et listé un tas de trucs pour les prochains mois.

En particulier, ce que la communauté Chilowé appelle les « idées à la con ». Exemple : fin août, Zèbre Farceur et six microaventuriers ont dormi une nuit sur une île de la Seine dans le Val-d’Oise, à vingt-cinq minutes de train de la gare Saint-Lazare. Après avoir débarqué en canoë, ils ont dressé leurs tentes et sorti l’apéro. Juste comme ça, pour le challenge de dormir sous les étoiles en pleine semaine avant de retourner au bureau le matin.

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