Concours d’éloquence : Mélissa Aabaid veut chan­ger le regard sur les jeunes de l’aide sociale à l’enfance

A 23 ans, Mélissa Aabaid fait partie des huit finalistes du Concours national d’éloquence qui se tiendra ce 25 juin à Aix-en-Provence. La jeune femme, qui a grandi en famille d’accueil, est déterminée à faire changer le regard sur les enfants placés. Portrait.

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Mélissa Aabaid © L.F.

Mélissa Aabaid est de celles dont l’énergie est communicative et la détermination inspirante. Derrière son sourire et sa voix chaleureuse, la jeune étudiante en master 2 de droit et pratique des contentieux publics, ne cache rien de son histoire. Placée alors qu’elle est bébé dans une famille d’accueil de Saint-Mamert-du-Gard, Mélissa n’en partira qu’à l’âge adulte. « Je n’ai manqué de rien », assure-t-elle. Au contraire Mélissa a désormais deux familles : sa mère et son frère biologique, et sa famille d’accueil. « Dans “famille d’accueil”, il y a quand même le mot famille et ça je l’ai pleinement ressenti », confie-t-elle. Pourtant, être une enfant placée à l’aide sociale à l’enfance (ASE) n’a pas toujours été une étiquette facile à assumer pour la jeune femme : « Je n’en parlais pas, c’était tellement mal vu, j’avais honte de le dire ! Mais en grandissant, j’en ai fait une fierté. J’ai un vécu plein de richesses et moi, cette étiquette, je veux la revendiquer et montrer qu’avec, on peut faire de très belles choses. »

C’est justement à l’occasion de sa participation à un concours d’éloquence qu’elle choisit de mettre en avant son passé d’enfant placée et souligne dans son discours le rôle du système qui, selon elle, lui a permis d’arriver jusqu’ici. Un propos qui a particulièrement ému Marie, la mère de sa famille d’accueil. « Ça me touche car elle ne cache pas d’où elle vient. Elle a raison d’en parler parce que pour beaucoup d’enfants, c’est un tabou. Pourtant, il y a tant à dire qu’elle a raison de l’évoquer » affirme Marie, qui, désormais retraitée, a accueilli plusieurs enfants sur de longues périodes et insiste sur le rôle important qu’ont joué éducateurs et assistantes sociales dans le parcours de Mélissa.

L’éloquence comme exécutoire

Et l’attrait de Mélissa pour les joutes oratoires n’a rien d’étonnant. « Depuis l’école déjà on l’appelle Pipelette, rigole son meilleur ami Romain. Elle adore apprendre, connaître des gens et elle est aussi très déterminée. » Car Mélissa ne brille pas qu’à l’oral, c’est aussi une passionnée de danse et en particulier de rock acrobatique. Discipline qu’elle pratique avec Romain depuis l’adolescence et dans laquelle ils ont enchaîné les victoires, notamment en championnat de France. « C’est un sport dynamique, de paillettes et de prestance qui, en plus, oblige à faire confiance à son partenaire » raconte la jeune femme. Mener tous les combats de front n’inquiète pas l’obstinée Mélissa. Habituée aux emplois du temps chargés, combinant compétitions et préparation d’un double bac d’économie et d’espagnol, Mélissa intègre les vertus de l’organisation. 

La jeune femme qui aime passer du temps avec ses ami.es et ses proches sait parfaitement « gérer son temps à bon escient ». Un atout pour les compétitions d’art oratoire, une passion que Mélissa se découvre il y a quelques années. Un moyen de faire passer ses idées, d’émouvoir et convaincre en toute sincérité. Comme une revanche, aussi, sur les clichés. « Moi, je suis tout le contraire de ce qu’on entend à la télé sur l’aide sociale à l’enfance, tranche la jeune femme. Ce n’est pas parce qu’on est de l’ASE qu’on doit être connotée négativement. Montrer à la société qu’on peut être de belles réussites et qu’on n’est pas forcément un pourcentage négatif, c’est important pour moi. Je veux dire qu’au même titre que les autres, on a la possibilité de réussir. Je fais vraiment une éloge des instances qui nous entourent sinon, je n’en serais pas là aujourd’hui. Et même si l’égalité des chances n’existe pas toujours, qu’effectivement il y a des dérives, je ne veux pas en faire de généralité. Mon but c’est de faire avancer les choses, et de faire entendre la voix de ceux qui ont réussi, ça peut peut-être aider. » La jeune femme est aussi investie en tant qu’élue locale dans sa commune et au sein de l’Adepape, un réseau d’entraide d’anciens enfants placés.

Dans quelques jours, la finaliste découvrira son sujet pour le concours national d’éloquence organisé par l’Atelier de la langue Française. Mélissa, qui a finalement refusé de devenir juge pour enfant par crainte de juger avec son cœur, devra, ce jour-là, ouvrir le sien.

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