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Hélène Roques © Patrick Girardin

Hélène Roques : « La pre­mière cause du mal-​être des ado­les­cents, c’est le modèle de réus­site véhi­cu­lé par notre société »

Spécialiste des enjeux de responsabilité sociale, Hélène Roques mène, depuis dix ans, des enquêtes sur les adolescent·es. Dans Sauvons nos enfants, elle alerte sur la dégradation de la santé mentale des 11-16 ans.

Causette : Pour ce livre, vous avez rencontré une centaine d’adolescent·es de tous milieux. Qu’a révélé cette enquête ?
Hélène Roques : On parle régulièrement des jeunes adultes ou des jeunes enfants, mais les données manquent sur ce qui affecte les 11-16 ans. J’ai constaté que tous disent être exposés à une forme de pression – des parents, de l’école ou de l’actualité. Tous m’ont aussi parlé de leur fatigue. Enfin, ils sont dans une oscillation permanente entre le refus de subir et le découragement.

Votre deuxième Baromètre des adolescents (Ipsos/Notre avenir à tous) a montré qu’en 2022, 31% des 11-15 ans étaient atteint·es d’un trouble anxieux généralisé (25% un an plus tôt), quand 17% sont concerné·es par des idées suicidaires (10% en 2021). Comment expliquer cette hausse ?
H. R. : C’est une génération qui, de manière assez rare, a été frappée par deux événements fondateurs qui sont source d’isolement. D’abord, la présence des outils numériques depuis le berceau, qui a bouleversé la relation à l’autre. Deuxièmement, l’entrée dans la puberté pendant le confinement, qui aura probablement été une bombe à retardement. Pour autant, cela fait dix ans que les pédopsychiatres alertent sur le mal-être des adolescents. Et la première cause de ce mal-être, c’est le modèle de réussite véhiculé par notre société.

Quels sont les profils les plus touchés par ces troubles ?
H. R. : Tous indicateurs confondus (anxiété, dépression), les filles, les jeunes issus de foyers favorisés et ceux qui vivent dans les grandes villes sont les plus touchés. Mais la santé mentale des adolescents se dégrade dans tous les milieux, excepté dans l’ouest de la France.

Pourquoi est-ce « un angle mort des politiques de santé publique » ?
H. R. : Globalement, en France, il y a déjà un problème avec la santé mentale : la psychiatrie n’a pas été repensée depuis les années 1970, l’accès aux soins est devenu catastrophique… Et la souffrance psychique des adolescents est encore taboue. C’est un sujet complexe, qui demande des moyens et des réponses larges, à tous les niveaux de la société. Mais des solutions concrètes sont à notre portée.

Sauvons nos enfants, d’Hélène Roques. Robert Laffont, 360 pages.

Couv Sauvons nos enfants
© DR

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