Ce 1er décembre, c'est la journée mondiale de lutte contre le VIH. L'occasion pour Causette de s'intéresser cette année à la communauté lesbienne pendant l'épidémie du sida, de son invisibilisation à l'impact de celle-ci sur la prise en charge actuelle de la santé sexuelle.
Années 80, l'effervescence de la libération sexuelle initiée vingt ans plus tôt laisse soudainement place à la peur, alors qu'un nouveau virus décime la communauté gay. Repéré sur la côte est des États-Unis, mais déjà présent en Afrique centrale depuis le début du 20e siècle, qualifié de "cancer", puis rapidement de "cancer gay", le sida se répand aussi en France et contamine peu à peu des milliers de personnes, principalement des jeunes hommes homosexuels. L'effroi est amplifié par le flou qui entoure la transmission du VIH. "En l'absence de données épidémiologiques, on fonctionne par hypothèse à partir de ce que l'on voit", explique Yaël Eched, doctorante en sociologie à l'EHESS dont la thèse porte sur les pratiques de prévention et la conception du risque des lesbiennes face au VIH. "Et ce qui se voit, c'est la sexualité des hommes gays, qui sont considérés comme étant hyper sexuels avec un mode de vie dépravé. On est à la fin des années 70, au début des mouvements homosexuels". La sexualité des hommes gays est visible, et ils sont les premiers impactés par le virus. Au contraire, "les femmes sont invisibilisées dans l'épidémie de VIH des années 80, parce qu'elles ne sont pas repérées dans les populations particulièrement exposées", raconte Lydie Porée, chercheuse au sein du bureau confédéral du Planning Familial. A fortiori, les lesbiennes, "une minorité à l'intérieur d'une minorité", poursuit-elle, se retrouvent écartées du discours de prévention contre le sida.
Soeurs de lutte
Elles sont pourtant loin d'être écartées de la lutte. Très rapidement, elles prennent part à l'activisme de défense des droits des personnes affectées par le VIH. "Il y avait des relations de camaraderie, mais aussi affectives entre les personnes" de la communauté LGBTQIA+, explique Lydie Porée. Les personnes lesbiennes "sont très investies sur la question du VIH, parce qu'il y a une urgence épidémique. Les gens meurent, elles le voient autour d'elles. Et donc, les lesbiennes – qui sont aussi depuis des années, depuis les années 70 au cœur des mobilisations homosexuelles – prennent à bras le corps un problème urgent qui est celui de la survie de leurs proches", ajoute Yaël Eched. Elles entretiennent de ce fait une grande histoire de militantisme, souvent oubliée. "Les lesbiennes sont toujours à la tête des mouvements sociaux importants", rappelait à ce propos Anne-Christine d’Adesky, journaliste et militante des droits des femmes et des personnes LGBT américaine, citée par Alice Coffin dans son livre Le génie lesbien. C'est donc sans surprise que l'on retrouve des lesbiennes au sein des associations françaises de lutte contre le VIH, comme AID ou Act-Up Paris. "Les lesbiennes sont[…]