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Suite à une erreur de convo­ca­tion au pro­cès de son ex qu'elle accu­sait de viols, Khadija se bat pour être entendue

En septembre 2020, l'ex-compagnon de Khadija a été condamné à huit ans de prison pour violences conjugales mais acquitté pour les faits de viols conjugaux dont l'accusait la jeune femme. Le procès s'est tenu sans elle, qui n'a jamais reçu sa convocation à l'audience de la cour d'Assises de Limoges.

« Je ne vais pas vous mentir, Madame, je ne vais pas bien. Je ne vis plus, je suis écrasée par le sentiment d'injustice qui m'habite et ne pourrai me reconstruire que si je suis entendue par la justice. » Au téléphone, Khadija raconte les évènements qui ont conduit à une situation ubuesque. C'est par voie de presse, avec la publication d'un article dans Le Populaire du Centre, qu'elle apprend que le procès de son ex-conjoint, contre qui elle a porté plainte en 2017 pour violences et viols conjugaux, s'est tenu à Limoges sans elle. Et si son ex a bien été condamné à une peine de huit ans de prison pour violences conjugales, il n'a pas été reconnu coupable de viols. « Forcément, je n'ai pas pu raconter ce qui m'était arrivé et lui a pu faire entendre la version des faits qu'il voulait ! », explose Khadija. Multipliant les recours judiciaires avec l'aide de sa nouvelle avocate Me Pauline Rongier, la jeune femme vient aussi de lancer sur Change.org une pétition à l'adresse du Garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti demandant un nouveau procès.

Car le droit français n'a pas prévu le cas de l'absence d'une victime à un procès pour cause de non-réception de convocation à l'audience. Le·la mis·e en cause peut contester, via la voie de l'opposition, un procès qui s'est tenu en son absence faute d'avoir reçu la convocation, mais pas sa victime. Lorsqu'elle a repris le dossier à l'automne, l'avocate a fait appel auprès de la cour d'Assises de la Haute-Vienne, sachant bien que l'appel serait irrecevable. « Seuls le parquet et le condamné peuvent faire appel mais cela m'a permis d'avoir une décision à contester dans cette affaire afin de pouvoir porter ce problème juridique devant la cour de Cassation et devant le Conseil constitutionnel via une Question prioritaire de constitutionnalité [QPC, ndlr] », précise Me Rongier. Dans le même objectif, l'avocate a également fait opposition. L'enjeu : faire changer la loi, pour éviter qu'un tel cas ne se reproduise.

En attendant, Khadija doit composer avec ce qu'elle estime être un déni de justice. Comment a-t-elle pu être écartée de ce moment qu'elle attendait avec impatience comme l'occasion de se voir rendre justice ? Elle qui, après sa plainte, avait quitté Limoges mais s'était toujours débrouillée pour se rendre aux convocations de l'enquête, reconstitution incluse de ce moment où son ex-conjoint l'avait suspendue par les pieds à un pont pour la terrifier ? Khadija et son avocate ont fini par comprendre que la convocation avait été envoyée à son ancienne adresse, et pas chez son avocate de l'époque, où elle s'était domiciliée - une pratique courante pour les victimes de violences conjugales afin de se prémunir de nouvelles agressions de leur ex, qui ont accès aux éléments de procédure.

Khadija explique à Causette avoir réussi, quand elle a pris conscience que le procès se tenait sans elle, à contacter la greffière des Assises de Limoges alors que le procès était toujours en cours. « Dans les grandes lignes, elle m'a dit que c'était tant pis pour moi et qu'elle ne pouvait rien faire », rejoue Khadija. Dépossédée de son histoire, la jeune femme espère que la pétition qu'elle lance soutenue par l'association qui l'a aidée lorsqu'elle a quitté son conjoint, Elle’s imagine’nt, atteindra Eric Dupond-Moretti. Me Rongier, elle, envisage d'autres recours, pourquoi pas jusqu'auprès de la Cour européenne des droits de l'homme si la France reste sourde oreille à l'iniquité d'une décision judiciaire rendue sans que la victime ait pu s'exprimer.

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